Les migrations ont forgé l’histoire de l’humanité depuis ses origines et lui ont permis de se développer. Un·e Français·e sur cinq est immigré·e ou enfant d’immigré·e, et au moins 10 % de la population a un·e ancêtre immigré·e dans les deux générations antérieures. Sont français·es, et donc égaux en droits, toutes celles et ceux qui adhèrent au principe « Liberté, Égalité et Fraternité » : la France résulte de cette créolisation, de ce mélange toujours renouvelé, où chaque être humain s’enrichit de sa relation à l’autre. Le repli sur une prétendue identité “Française de souche” relève du fantasme, car elle n’a jamais existé.
La question migratoire est une question politique. À la peur, à la surenchère sécuritaire et aux grandes phrases sans lendemain, nous opposons une politique migratoire humaniste, solidaire, raisonnée et réaliste qui ouvre la perspective d’un Avenir en commun pour tous les peuples.
Notre constat : l’Union européenne ne sait pas accueillir les migrant·es, l’État français développe un rejet inquiétant des étranger·es
Fin 2020, sur les 7,7 milliards d’êtres humains, 3,7% seulement sont migrant·es. 82,4 millions sont forcé·es de fuir leur foyer à cause des conflits ou de la persécution – à peine une personne sur cent. On compte aujourd’hui 21 millions de personnes réfugiées dans le monde, dont 86 % qui sont accueillies par des pays en développement. Les études n’indiquent ni crise migratoire, ni vague déferlante ni accroissement rapide de la population étrangère.
L’augmentation récente des flux migratoires a trois origines : la multiplication des conflits armés, la destruction des économies locales par la mondialisation et le réchauffement climatique. Ces causes sont entretenues depuis l’Europe, par des interventions militaires illégales et illégitimes, le financement de dictatures à travers les fonds européens de développement, le pillage des ressources naturelles et alimentaires, les accords de libre-échange et le soutien aux énergies fossiles ou à l’extractivisme.
Actuellement, les flux migratoires sont principalement provoqués par les conflits au Proche et Moyen-Orient. Les guerres en Irak, en Afghanistan et en Syrie, ont conduit 7 millions de Syriens et Syriennes à se déplacer à l’intérieur de leur pays et 4 millions d’entre eux à franchir leurs frontières pour s’installer dans les pays voisins (Turquie, Liban, Jordanie) ou en Europe. Leurs conséquences dramatiques ont été encore renforcées par les sécheresses qui détruisent les récoltes et raréfient l’eau.
La diplomatie solitaire des États-Unis d’Amérique, qui ont remis l’Afghanistan aux taliban après 20 ans d’occupation, a provoqué une fuite désespérée des habitantes et habitants. La réaction d’Emmanuel Macron ? Appeler à se « protéger contre les flux migratoires irréguliers importants ». Or, seulement 3 300 Afghans et Afghanes sont arrivé·es en France depuis la prise de pouvoir des taliban. Un tiers a obtenu l’asile. Aux États-Unis, 25 000 réfugié·es afghan·es ont été accueilli·es et il en resterait encore 45 000 dans les sept centres d’accueil du pays.
La majorité des réfugié·es ne souhaite pas venir en Europe : elle s’installe plutôt dans les pays voisins. En 2020, les deux tiers des migrant·es originaires de pays ouest-africains vivaient dans un autre pays de la région. Les déplacements forcés internes et transfrontaliers dans les régions du bassin du lac Tchad et du Sahel central ont fortement augmenté ces dernières années du fait de l’insécurité et la violence induite par les islamistes de Boko Haram. En Europe, ces arrivées de populations ne sont pas massives : les réfugié·es représentent, en 2020, 0,6% de la population totale.
Pourtant, les politiques d’accueil des États membres de l’Union européenne sont inadaptées et arbitraires. À l’occasion de la soi-disant « crise migratoire » de 2015, l’UE a montré son incapacité à coordonner les États membres. Elle s’est contentée d’improviser à la hâte l’accueil de 160 000 réfugié·es syrien·nes, au travers d’une clé de répartition refusée par le groupe de Visegrád (République tchèque, Pologne, Hongrie et Slovaquie).
La Commission européenne a soumis en 2020 un nouveau “Pacte sur la migration et l’asile”. Présenté comme un outil de coordination globale des migrations, il renforce surtout l’hostilité actuelle envers les migrant·es. Ce Pacte favorise uniquement un contrôle préalable imprécis de leur situation, au détriment du respect des droits fondamentaux, et l’accélération des retours à l’aide d’accords avec des pays tiers, ayant pourtant démontré leur inefficacité. Il accrédite la politique d’« immigration choisie », qui est absurde (les besoins économiques évoluent plus vite que les flux de population !) et réduit les migrant·es au statut de main-d’œuvre sous-payée.
Les politiques migratoires de l’UE sont avant tout des politiques sécuritaires. Cela se traduit par la construction de murs entre pays, la fermeture des frontières (via le rétablissement des contrôles et l’ouverture de hotspots, aires géographiques où règne un droit dérogatoire permettant d’identifier les nouvelles et nouveaux arrivant·es, et de séparer les demandeur·ses d’asile des migrant·es économiques) et leur militarisation (modifications du statut de Frontex qui est l’agence européenne disposant du budget le plus important). Les accords de Khartoum (2014), de La Valette (2019), l’accord UE-Turquie (2016) et les accords de partenariat économique ont consacré cette politique d’externalisation de la gestion des migrant·es, renforçant des régimes autoritaires sous-traitants
Ces politiques migratoires ont créé une « Europe forteresse » dont voici le bilan :
- Depuis le début des années 2000, au moins 50 000 personnes sont mortes ou portées disparues en tentant de rejoindre l’Union européenne. Avec plus de 3 000 décès enregistrés pour l’année 2020 malgré le confinement de la grande majorité de la planète, la Méditerranée reste de loin le plus grand cimetière à ciel ouvert du monde.
- Au premier trimestre 2021, 1 146 personnes avaient déjà péri en Méditerranée. Frontex, l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, est particulièrement pointée du doigt pour être impliquée dans des incidents de refoulement de bateaux de migrant·es entre la Grèce et la Turquie mais aussi l’expulsion de plus de 10 000 êtres humains.
- La remise en cause des droits humains par l’atteinte portée par les États membres aux droits des demandeurs et demandeuses d’asile souvent privé·es de liberté et d’un accès à des procédures d’asile équitables et efficaces.
- La banalisation de l’enfermement des migrant·es.
Ces politiques sécuritaires entraînent le développement d’un « business » de la peur et de la xénophobie, gavant d’argent public les industries multinationales de la sécurité. En France, la remise en cause du droit du sol, la démarche « d’immigration choisie » et la politique du chiffre dans la traque aux personnes en situation irrégulière mettent en danger notre République elle-même.
Ces orientations maintiennent les migrant·es dans des situations d’insécurité permanente, à disposition des employeurs désireux d’utiliser une main-d’œuvre corvéable à merci, incapable de faire respecter ses droits les plus élémentaires. Certains qualifient ce système de « délocalisation sur place ». Elle touche des secteurs à fort besoin de main-d’œuvre – tels que le BTP, l’hôtellerie-restauration, les services à la personne – et affaiblit l’ensemble des salarié·es.
On ne quitte pas son pays pour le plaisir. Émigrer est toujours une double souffrance pour celui ou celle qui part : coupé·e de son pays d’origine, relégué·e dans son pays d’arrivée. Il est donc de notre devoir d’accueillir dignement.
« Nous assistons à un changement de réalité où les déplacements forcés sont à la fois beaucoup plus fréquents, et où le phénomène n’est plus à court-terme et transitoire. On ne peut attendre des gens qu’ils vivent dans la tourmente pendant des années, sans possibilité de rentrer chez eux ou de se bâtir un avenir là où ils se trouvent. Nous devons adopter une attitude fondamentalement novatrice et davantage accueillante à l’égard de ceux qui fuient, conjuguée à un effort résolu pour mettre fin aux conflits qui perdurent depuis des années et sont à l’origine même de ces intenses souffrances. »
Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugié·es
La montée en puissance de Frontex comme solution contestable à l’impasse des politiques migratoires
Frontex est présentée comme une agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. Créée en 2004, ce n’est finalement qu’après la prétendue « crise migratoire » de 2015 qu’elle s’est imposée jusqu’à sembler devenir l’unique réponse aux maux de la politique migratoire européenne. Les États membres de l’Union européenne qui refusaient jusque-là l’intervention d’un corps européen de garde-frontières au nom de leur souveraineté ont alors permis le développement de Frontex.
En 10 ans, son budget démesuré a été multiplié par dix pour atteindre les 544 millions d’euros en 2021. Cette augmentation concerne également le personnel puisque l’objectif est d’atteindre un corps permanent de 10 000 personnes d’ici 2027, avec 7 000 garde-frontières. Son rôle en matière de retour n’a fait que croître. Cette agence organise désormais elle-même 10 % des vols charter de retour, elle affrète les avions, déploie des escortes et traite avec les compagnies aériennes.
Or, notamment à travers son activité de garde-côte, l’agence européenne a fait l’objet de nombreuses allégations de mauvais traitements ou encore de refoulements illégaux des migrant·es cette dernière décennie. Cela a été dénoncé concernant Lampedusa en 2013, mais également dernièrement à travers un premier recours historique, déposé par des associations devant la Cour de justice de l’Union européenne le 21 mai 2021, suite à l’abandon de migrant·es vers l’île de Lesbos.
La Cour des comptes européenne affirmait elle-même dans son rapport de 2021 que la gestion des frontières par Frontex ne fonctionne pas. Pourtant, alors même que son action est refusée par de nombreux États européens tels que la Pologne, Frontex a été appelée à agir dans la Manche par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Cette décision est plus que controversée : Frontex mène une mission de surveillance des frontières extérieures et non de sauvetage. En réponse au discours sur l’insécurité, l’agence européenne s’est déployée jusqu’à devenir omniprésente en Europe.
La « carte des camps » est un outil à travers lequel, depuis 2003, Migreurop s’attache à faire connaître et à dénoncer la multiplication des lieux et des formes d’enfermement des étrangers en Europe et au-delà.
Notre projet : accueillir dignement les migrant·es et agir sur les causes des migrations forcées
Les migrations sont un sujet trop sérieux pour les réduire à des surenchères et à des peurs incontrôlées. La première tâche est de permettre à chacune et chacun de vivre chez soi lorsqu’on le souhaite. Pour cela, il faut arrêter les guerres, les accords commerciaux destructeurs et affronter le changement climatique, qui entraînent déjà de très nombreuses migrations forcées. Bref, lutter contre les causes des migrations et accueillir dignement les migrant·es.
Les États membres de l’UE doivent agir sur les causes des migrations et élaborer un véritable dispositif d’accueil et d’accompagnement des migrant·es.
Il est primordial d’agir en amont des migrations sur les causes qui contraignent les populations à quitter leur pays, parce qu’une vie digne n’y est plus possible. Pour cela, il est fondamental d’œuvrer pour la paix, d’accroître et de mieux concevoir l’aide au développement et de ne pas engager les pays européens dans de nouvelles interventions militaires.
Il est également urgent d’agir contre le réchauffement climatique par une aide financière et matérielle à la bifurcation écologique dans les pays les plus vulnérables, fondée sur des transferts de technologies. Cela passe par la reconnaissance d’un statut de détresse environnementale dépassant le cadre des catastrophes liées au seul climat. Les institutions internationales, notamment à l’ONU, ne sont jamais parvenues à formaliser un statut de réfugié·e climatique ou environnemental·e, et pour cause : la majorité des déplacements sont temporaires et au sein d’un même pays. De plus, il est impossible de hiérarchiser les catastrophes environnementales pour décider de qui peut obtenir une protection. En revanche, il est urgent de créer un statut juridique de détresse environnementale, permettant la mise à l’abri des victimes de catastrophes environnementales.
Dans le même temps, les gouvernements de l’UE doivent construire un véritable dispositif d’accueil pour les migrant·es qui sont là. Une gestion humaine de leurs déplacements est parfaitement possible au regard du degré de développement global de la planète.
Le régime d’asile européen commun, dont le règlement de Dublin, qui est devenu l’emblème de nos politiques de non-accueil, doit être dénoncé. Une politique volontariste d’accueil des migrant·es implique par ailleurs la mise en place d’un système de sanction à l’égard des États membres qui ne respectent pas le droit d’asile.
Quand les pays de l’Europe de l’Est se barricadent
Depuis cet été se déroule une crise humanitaire sans précédent à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie. Minsk est ainsi responsable d’avoir instrumentalisé des migrant·es originaires du Moyen-Orient et d’Afrique en leur promettant de les aider à franchir les frontières européennes. Cette stratégie politique scandaleuse est née à la suite de diverses sanctions économiques infligées par l’Union européenne à la Biélorussie du fait de l’élection présidentielle contestée.
Or, la Pologne est connue pour ses violations des droits humains. Les autorités nationales se sont livrées au refoulement inhumain de milliers de migrant·es démuni·es. Les demandes d’asile ne sont ainsi plus prises en compte tandis que les ONG humanitaires et les médias se voient refuser l’accès à la frontière. De plus, le pays a pour projet l’érection d’un mur, à l’image de son voisin hongrois, confirmant l’idée d’une Europe qui se barricade.
Le bras de fer entre la Biélorussie et l’Union européenne ignore totalement les destins humains dont il est pourtant principalement question. Alors que la mort de plusieurs enfants semble émouvoir l’opinion publique, les solutions proposées par l’Union européenne sont insuffisantes, inefficaces et attentatoires aux droits et libertés.
Dernièrement, la Commission européenne a ainsi proposé de permettre à la Pologne, à la Lituanie et à la Lettonie de suspendre certaines dispositions du droit d’asile pour six mois. Une telle suspension autorise les trois États à étendre la période d’enregistrement des demandes d’asiles à quatre semaines contre dix jours d’ordinaire, et repousser le délai d’examen d’une demande à seize semaines. En septembre 2015, la Hongrie avait déjà modifié sa législation et réglementation en matière de « pays d’origine sûr », de franchissement des frontières et d’obtention du statut de réfugié afin de réduire le plus possible le nombre de demandeur·ses, constituant ainsi une violation de l’obligation de non-refoulement, consacrée à l’article 33 de la Convention de Genève de 1951.
Nos propositions : une politique migratoire humaniste et réaliste
Conformément au droit international et aux principes fondamentaux de la République universaliste, la France proposera un accueil dans des conditions humaines, sociales et sanitaires dignes.
Les priorités ci-dessous impliquent une refondation des politiques migratoires européenne et française. Elles seront portées au niveau de l’Union européenne, notamment dans le cadre des négociations sur la politique migratoire. En cas de blocage, nos propositions seraient mises en œuvre à un niveau national ou en coopération renforcée avec d’autres États membres.
Agir pour la paix et mener une politique de codéveloppement
Dans un premier temps, les pays de l’UE, et plus particulièrement la France, doivent mettre un terme aux interventions militaires illégales et illégitimes, notamment dans les pays africains. Celles-ci engendrent des conflits armés sans fin et la radicalisation de sections entières de la population.
Nous proposons d’instituer une coopération euro-méditerranéenne de progrès social, écologique et de codéveloppement en direction des pays du Maghreb, du Machrek, d’Afrique subsaharienne et du Moyen-Orient.
Dans un deuxième temps, la France proposera aux dirigeants africains d’établir des accords de coopération et d’échange économiques respectueux des normes environnementales et sociales, axés vers l’intérêt général des populations afin que celles-ci bénéficient et profitent de leurs ressources et de leur travail au lieu d’en être dépossédées. Il est également essentiel que la politique de codéveloppement ne soit plus utilisée comme une monnaie d’échange lors de la conclusion d’accords de réadmission migratoire avec les États concernés.
La France agira également pour que les politiques créant une « Europe forteresse » et de stigmatisation des étranger·es non-communautaires soient abandonnées, et les accords de Schengen renégociés au profit d’une action résolue en faveur de politiques nouvelles de migrations internationales et de codéveloppement, en particulier avec les pays du pourtour méditerranéen. Ces politiques auront pour objectif principal de refonder la politique européenne de contrôle des frontières extérieures, en refusant la militarisation et l’externalisation de la politique de contrôle des flux migratoires. Dans ce cadre, des dispositifs ambitieux favorisant le concours des migrant·es au développement de leur pays d’origine seront mis en œuvre : aides à des projets de réinstallation ou à d’autres formes de contribution qui n’impliquent pas nécessairement un retour définitif (retours pour des périodes temporaires, abondement public à de l’épargne issue de la migration en faveur d’actions de développement, etc.) Ceci implique notamment de laisser ouverte une possibilité de fluidité des migrations (possibilités de retours temporaires sans crainte de perdre son droit à revenir en France, etc.)
L’Avenir en commun propose donc une approche globale, concertée à l’échelle internationale et européenne afin d’arrêter la guerre aux migrant·es et permettre à chacun·e de « vivre et travailler au pays ».
- Sortir de l’OTAN. La France doit se porter aux avant-postes d’une nouvelle alliance universelle pour la paix
- Renforcer les missions de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en combinant lutte contre les causes de l’exil forcé, réponses d’urgence, soutien aux pays d’accueil, préparation du retour des réfugié·es et anticipation des futur·es déplacé·es climatiques
- Stopper les accords commerciaux et économiques inégaux, dont les accords de libre-échange adoptés par l’UE envers les pays africains, avec les pays en développement, qui les déstabilisent et détruisent leurs agricultures locales, et permettre ainsi la souveraineté de chaque pays
- Refonder la politique européenne de contrôle des frontières extérieures, refuser la militarisation de la politique de contrôle des flux migratoires afin de sortir de l’impasse de Schengen et de Frontex. Il est donc nécessaire de mettre fin aux opérations de Frontex dont les missions et les actions ne sont pas compatibles avec le respect des droits fondamentaux
- Renégocier les accords du Touquet avec le Royaume-Uni, qui lui permettent d’externaliser sa frontière à Calais, et proposer la création d’un bureau d’asile commun à Calais
- Suspendre le règlement de Dublin et mettre en place des règles d’harmonisation du système d’asile, déconnecté des politiques migratoires et non soumis aux impératifs de gestion des flux migratoires
- Mettre fin à l’instrumentalisation de l’aide au développement, qui a conduit l’UE à signer l’accord de la honte « visa+adhésion contre migrants » avec la Turquie en mars 2016
- Créer un corps européen civil de secours et de sauvetage en mer pour éviter les milliers de noyé·es en Méditerranée et permettre le transport maritimes des migrant·es vers l’Angleterre. Actuellement les accords du Touquet obligent la France à empêcher le franchissement de la Manche par les migrant·es
- Défendre la création d’un statut de détresse environnementale. D’après l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), les catastrophes climatiques déplacent entre 21 et 24 millions d’êtres humains par an, soit plus de 60 000 personnes chaque jour. Certains pays sont menacés de submersion et les mégalopoles côtières, comme Jakarta, Tokyo, Shanghai ou Bombay, mais également Londres, Istanbul et l’ensemble des villes des Flandres et des Pays-Bas, pourraient durement souffrir de la montée des eaux. L’ONU a d’ailleurs déjà annoncé qu’il devrait y avoir plus de 250 millions de réfugié·es climatiques d’ici à 2050. La France pourrait décider de la création de ce statut de manière unilatérale afin de mieux le promouvoir dans les accords internationaux.
Assurer notre devoir d’humanité
La France est le premier pays au monde à intégrer le droit d’asile dans sa Constitution, dès 1793. En dépit des reculs récents, notre pays incarne toujours dans le monde les principes issus de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : liberté, égalité et résistance à l’oppression. De ce fait, tout·e étranger·e persécuté·e dans son pays peut trouver asile en France.
Patrie révolutionnaire, elle naturalise en 1848 les ouvrier·es étranger·es qui participent à l’insurrection. Elle accueille ensuite les Arménien·nes fuyant le génocide turc, des citoyen·nes d’Europe centrale persécuté·es pour leur origine, des républicain·es espagnol·es après la guerre civile de 1936-1939, des boat people d’Asie en 1979. L’accueil fonde notre identité républicaine. Ainsi, le peuple français est le résultat d’intégrations successives et notre pays s’est continuellement enrichi de ces apports extérieurs. Notre mission collective est de respecter la dignité humaine des migrant·es et leur droit fondamental à une vie de famille. Les refuser, c’est être étranger aux principes de la patrie républicaine.
Nous proposons de mettre en œuvre un plan national qui repose sur les mesures suivantes.
- Inscrire dans la loi française le principe de responsabilité des pouvoirs publics à offrir un accueil digne
- Prendre en charge les personnes exilées grâce à des structures d’accueil et d’hébergement en nombre suffisant, en concertation avec l’ensemble des acteurs locaux et coordonnées sur tout le territoire français de l’Hexagone et des Outre-mer, accompagnée d’un accueil spécifique des personnes fragiles et vulnérables
- Rétablir la carte de séjour de dix ans comme titre de séjour de référence pour les étranger·es, respectant le droit au regroupement familial, régularisation automatique pour tout conjoint·e marié·e ou pacsé·e
- Régulariser tous les travailleurs et travailleuses sans-papiers et faciliter l’accès à la nationalité française pour les personnes étrangères présentes légalement sur le territoire
- Régulariser les étudiant·es et parents sans papiers d’enfants scolarisé·es
- Rétablir l’unicité de la loi sur le territoire en soumettant l’octroi des titres de séjour à des critères objectifs ne souffrant d’aucune différence d’interprétation d’une préfecture à l’autre
- Mettre en place une commission du titre de séjour pouvant être saisie de tous les cas de demandes de rendez-vous sans suite ou de refus de délivrance de titre, dotée d’un pouvoir de décision, lieu d’un débat public et contradictoire
- Restaurer la liberté de circulation au sein de l’espace Schengen (avec un encadrement strict de sa suspension temporaire)
- Mettre en œuvre un accueil digne des migrant·es avec une répartition sur l’ensemble du territoire européen mettant fin à l’approche hotspots
- Dépénaliser le séjour irrégulier et abolir le placement en centres de rétention administrative des enfants et de leurs parents
- Construire des centres d’accueil aux normes internationales avec le concours de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) pour proposer aux migrant·es des conditions dignes
- Remettre en cause le fichage des étranger·es et la biométrie dans le contrôle des frontières de l’UE
- Assouplir les politiques de visas « au titre de l’asile », en veillant notamment à empêcher que les coûts des visas nationaux soient utilisés comme des mesures de dissuasion
- Garantir l’accès effectif aux soins de toutes et tous face aux instrumentalisations politiques de l’aide médicale d’État (AME)
Protéger les mineur·es non accompagné·es
La France accueille sur son sol environ 17 000 jeunes mineur·es non accompagné·es (enfants de moins de 18 ans hors de leur pays d’origine et séparés de leurs parents ou responsables légaux). Ces dernier·es ont le droit, au sein de l’UE, d’exercer leurs droits fondamentaux, notamment ceux promus par la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), adoptée par l’Organisation des Nations Unies le 20 novembre 1989.
En France, leur accueil et leur protection relèvent de la compétence des départements. Ainsi actuellement, les conditions et procédures d’accès aux services de protection diffèrent considérablement d’un département à un autre.
Pourtant, les mineur·es non accompagné·es doivent bénéficier, comme tous les enfants, des droits fondamentaux : scolarisation, hébergement, protection sociale. Nous proposons de :
- Appliquer la présomption de minorité. Cela revient à respecter les articles 2 et 20 de la Convention internationale des droits de l’enfant, à savoir l’inconditionnalité de la protection de l’enfance. L’aide sociale à l’enfance (ASE) doit mettre à l’abri l’ensemble des mineur·es qui se présentent aux départements, en attente de la décision finale du juge pour enfants
- Supprimer la méthode des tests osseux pour déterminer l’âge des mineur·es non accompagné·es (MNA)
- Rendre obligatoire la présence d’un avocat pour l’ensemble des enfants en assistance éducative, pour informer correctement les mineur·es non accompagné·es lors de cette phase fondamentale dans l’établissement d’une situation administrative
- Renforcer le budget de l’aide sociale à l’enfance pour qu’elle puisse accompagner les mineur·es dans la démarche de demande de nationalité française
- Augmenter la capacité d’accueil et d’accompagnement des établissements et services du médico-social pour que les départements n’aient plus recours à des hébergements à l’hôtel pour les MNA. Les services de l’ASE doivent proposer un hébergement décent et adapté à l’âge et l’autonomie du ou de la jeune (hébergement collectif, placement en famille d’accueil, appartement en semi-autonomie)
- Recruter du personnel éducatif qualifié et proposer des formations appropriées aux problématiques des MNA
- Systématiser la prolongation des prises en charges de ces jeunes après 18 ans conformément à l’article L.221-1 du Code de l’action sociale et des familles, par la délivrance de contrats jeunes majeurs (CJM)
- Affecter directement et immédiatement les jeunes francophones dans les dispositifs classiques de l’Éducation nationale
- Augmenter le nombre d’unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants (UPE2A) pour les jeunes de moins de 16 ans et de Missions de lutte contre le décrochage scolaire (MLDS) pour les plus de 16 ans
- Réaliser, dès la prise en charge des MNA par l’ASE, des examens de santé physique et psychique. Les mineur·es n’ont pas à justifier d’un titre de séjour pour être en situation régulière sur le territoire français, et l’ouverture de leur droit à l’assurance maladie ne saurait donc y être conditionnée. Ainsi, les MNA, sans distinction, seront affilié·es au régime général de l’assurance maladie et bénéficieront de la couverture maladie universelle complémentaire
Garantir le droit d’asile
Pour nombre de personnes dans le monde, la France est le pays des droits humains, une terre d’asile, avec un rayonnement culturel universel. Cependant, les politiques d’asile sont désormais remises en cause au nom de la limitation des flux migratoires, en France comme en Europe.
Nous proposons de garantir le droit d’asile via les mesures suivantes.
- Rompre avec les directives européennes, notamment le règlement de Dublin, et abroger les lois successives ayant eu pour objectif de restreindre le droit d’asile en France. Nous souhaitons la pleine garantie et le renforcement du droit d’asile et la suppression de la procédure accélérée
- Instaurer une procédure unique pour les demandes d’asile assurant pleinement le respect du droit d’asile et les droits fondamentaux
- Rattacher l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) au ministère des Affaires étrangères (et non au ministère de l’Intérieur) afin de rétablir un droit d’asile déconnecté des politiques migratoires et augmenter son budget de fonctionnement
- Autoriser les demandeur·ses d’asile à exercer un emploi pendant la période d’attente d’examen de leur dossier
- Augmenter le nombre de places en Centre d’accueil de demandeurs d’asile (CADA)
- Organiser la répartition des demandeur·ses d’asile sur l’ensemble de l’Hexagone
- Construire un programme pour l’aide au retour des réfugié·es qui le souhaitent lorsque la situation de leur pays de départ le permet
Permettre une citoyenneté pleine et entière
La France est une communauté politique et non une réalité ethnique. Dès lors, c’est l’existence d’un destin commun qui doit fonder l’accès à la nationalité. Pour cela nous proposons de :
- Rétablir le droit du sol pour les enfants nés en France, sous réserve de leur consentement
- Lancer un programme ambitieux de la maîtrise de la langue française écrite et parlée, intégrant la transmission des principes républicains et l’information sur l’ensemble des droits sociaux
- Modifier la Constitution pour reconnaître le droit de vote et d’éligibilité des résident·es extracommunautaires (hors UE) aux élections locales et européennes. La participation citoyenne des résident·es étranger·es aux élections locales, promise en France depuis 1981, serait un facteur de cohésion territoriale et d’égalité, sachant que le cadre européen actuel permet déjà aux résident·es communautaires de voter aux élections locales