Notre constat : un service public sacrifié sur l’autel du consumérisme et du bon plaisir des plus riches
Le service public de la culture et des arts en France est unique au monde. Il est le fruit d’une vision ambitieuse, incarnée dans la mémoire partagée par des personnalités comme André Malraux ou Jack Lang, par des concepts comme la francophonie, l’indépendance, l’exception culturelle, la créolisation. La permanence d’un ministère de la Culture, à travers les décennies et les alternances, participe du rayonnement français. Cette ambition a permis la richesse des arts et de la culture dans notre pays. Les plus de 5 000 salles de cinéma, plus de 6 000 festivals, plus de 10 000 maisons d’éditions, plus de 200 000 intermittent·es du spectacles… sont autant d’atouts et de motifs de fierté pour notre pays.
Mais ce service public est désormais menacé. La crise sanitaire a accéléré les dynamiques nocives dans la culture à l’œuvre depuis trois quinquennats. Après les avoir qualifiés de « non-essentiels » pendant des mois, le pouvoir macroniste persiste à considérer les arts et la culture comme de simples éléments de consommation ou de communication. Absence totale de direction politique au ministère de la Culture, obsession réformatrice portée par des gens qui ne sont pas des représentant·es légitimes, gestion du patrimoine confiée à un présentateur télé, improvisation autoritaire dans les protocoles sanitaires, pendant que le gouvernement brade aux grandes entreprises et aux multimilliardaires les biens communs des arts et de la culture. Dans tous les domaines, le sentiment est le même : le pouvoir a abandonné le service public de la culture en France.
Ce recul n’est pas nouveau. Depuis 20 ans, les plans d’austérité se sont succédé aussi vite que les ministres, coupant dans les budgets et les effectifs des services publics de la culture et faisant de la « démocratie culturelle » un slogan vidé de son sens. Conséquence directe : les inégalités de pratiques culturelles subsistent. Pire, certains de ces écarts se creusent : les diplômé·es du supérieur sont désormais 4 fois plus nombreux·ses que les peu diplômé·es à avoir visité un musée ou un monument au cours des 12 derniers mois en 2018, un écart historique.
Ce retrait du pouvoir politique laisse le champ libre aux mastodontes de la finance et des industries culturelles. Dans l’audiovisuel, le livre, la musique, les jeux vidéo, le patrimoine, ces géants ont étendu leur mainmise en écrasant les acteurs indépendants, fragilisés par la crise sanitaire. Parmi eux, le milliardaire Vincent Bolloré, soutien de l’extrême-droite, s’accapare des filières entières, de la production à la distribution et la diffusion dans le livre, l’audiovisuel, le cinéma et la presse, pour son entreprise d’influence sur le débat public. Les plateformes étasuniennes comme Netflix, Amazon, Apple, ou Disney ont accéléré leur offensive contre le cinéma qu’elles veulent achever de convertir en simple « contenu » addictif pour n’être en concurrence qu’avec notre sommeil. C’est un véritable règne de la culture par algorithmes qui s’installe, sacrifiant l’humain, la curiosité et l’altérité au profit de l’automatisation, de la « satisfaction client » et du plus long et lucratif usage possible du « temps de cerveau disponible ».
Alors que cet appauvrissement de la diversité culturelle nuit à la multiplicité des récits et des idées et donc à la démocratie, les travailleur·ses de l’art sont les premiers à en pâtir matériellement. Ce sont les éclaireur·ses de la précarité systémique : isolement, pauvreté généralisée, administration kafkaïenne, ultra-concurrence pour survivre, injonction constante à déformer leur métier pour rentrer dans les cases de la bureaucratie néolibérale, etc. Une situation que les aides au rabais arrachées de haute lutte durant la crise sanitaire n’ont fait que prolonger, sur un fond d’incertitude constante qui pousse de plus en plus d’entre elles et eux à changer de métier, et qui menace donc clairement la liberté de création. Pour celles et ceux qui poursuivent, on leur demande de faire d’autres métiers, comme de la médiation dans les quartiers populaires ou développer l’attractivité touristique.
Tout cela alors que tous les services publics sont asséchés, que le ministère de la Culture fond à vue d’œil et que l’on enferme ses agent·es dans des tâches comptables où la pensée, leur connaissance des politiques culturelles et de leur histoire et le sens de leurs métiers n’ont pas leur place.
Enfin, alors que le manque de moyens reste la norme dans toutes les infrastructures culturelles publiques, c’est aux milliardaires et aux grandes entreprises qu’on offre le nouveau marché de pallier les investissements nécessaires. Des opérations très lucratives, grandement déduites de leurs impôts qui leur offrent de nombreux avantages en nature : de l’usufruit des biens publics pour des soirées privées au droit de regard de plus en plus insistant sur les œuvres et les programmations. Certains bénéficient directement des faveurs des responsables politiques complices, comme François Pinault qui vient d’ouvrir sa gigantesque galerie à la Bourse de commerce, offerte pour 50 ans par la mairie de Paris et dont les missions sont loin de celles du service public.
Le quinquennat Macron aura achevé la mutation du ministère de la Culture entamée durant les années Sarkozy et Hollande : remplacer l’émancipation collective par le consumérisme individuel.
Notre projet : réinstituer et pérenniser le service public des arts et de la culture
L’action publique dans les arts et la culture est depuis trop longtemps absente du débat public et considérée comme un bonus cosmétique et artificiel. L’émancipation collective doit faire partie des priorités d’un pouvoir politique soucieux de la dignité de tou·tes les citoyen·nes. La possibilité pour toutes et tous d’accéder à des expériences sensibles d’altérité et de pouvoir soi-même exprimer un rapport critique et poétique au monde est un élément constitutif de la citoyenneté.
Le temps libre doit pour cela prendre toute la place qu’il mérite dans nos vies. Mais pour que ce temps soit pleinement libre, il doit être également affranchi de l’injonction au consumérisme. C’est ce pourquoi un service public de la culture fort est nécessaire pour concevoir la société d’harmonie entre les êtres humains et avec la nature à laquelle nous aspirons.
Notre proposition est celle d’un ministère de la Culture guidé par des orientations politiques claires. Réaffirmant le rôle de l’État en matière de politiques culturelles, il doit affirmer le primat de sa politique sur les logiques financières, afin de garantir la souveraineté culturelle. Réaffirmant la création comme valeur fondatrice de société en tant que productrice des biens symboliques, il doit garantir le socle social nécessaire à l’indépendance des travailleur·ses de l’art – artistes, auteur·ices, intermittent·es, indépendant·es, etc. –, pallier les inégalités territoriales, créer les conditions de la rencontre de chacun avec l’art. Le ministère de la Culture et le service public de la culture seront dotés des moyens nécessaires pour mener leurs missions à bien, en portant le budget consacré aux arts et à la culture à 1 % du PIB par an. Cela entraînera notamment une augmentation de plus d’un tiers du budget du ministère de la Culture, et augmentera également les budgets consacrés à la culture des autres ministères et des collectivités territoriales ainsi que celui de l’audiovisuel public.
L’action publique doit aussi changer de méthode, d’horizon de temps et d’objectifs. À toutes les échelles, le temps long doit devenir la perspective principale, et non plus des critères quantitatifs immédiats, absurdes et inadaptés. Les opérateurs publics de la culture ne doivent pas viser la rentabilité, mais un travail de qualité au bénéfice du plus grand nombre.
Le rapport aux arts et à la culture se fait tout au long de la vie. Pour cela, il est essentiel que l’action publique dans la culture s’articule avec d’autres pans de l’action gouvernementale, comme l’Éducation nationale ou l’Enseignement supérieur et la Recherche, mais également la Ville, la Ruralité, la Santé et bien d’autres. La planification sera la clé pour mener à bien nos objectifs, parmi lesquels :
➔ Inscrire les arts et la culture dans une écologie politique à l’inverse des logiques productivistes et consuméristes
La bifurcation écologique fait partie des grands défis que nous devons relever. Le service public de la culture y tiendra une place cruciale. Tout d’abord, en offrant aux travailleur·ses de l’art de meilleures conditions de création, il favorisera la multiplicité des imaginaires et des récits qui peuvent être autant d’alternatives au récit individualiste de la publicité et du consumérisme. Ensuite, au sein des pratiques mêmes, dont un service public fort permettra la bifurcation écologique en accompagnant les changements structurels et techniques qui répondront aussi aux enjeux politiques d’une culture de proximité, à échelle humaine.
Cette volonté infusera dans l’ensemble de l’action publique dans les arts et la culture, permettant autant d’expérimentations qu’il y a d’écosystèmes de vie différents en France tout en dessinant un projet politique global nouveau.
➔ Reprendre la démocratisation culturelle, garantir et développer les droits dans les arts et la culture
Si l’échec de la démocratisation culturelle est un mythe, son ralentissement, en revanche, est réel : il est la conséquence de décisions politiques. L’ambition qui nous anime est de poursuivre cette démocratisation afin d’en finir avec les inégalités.
En ce sens, la pensée actuelle autour de la politique culturelle est l’objet de nombreux débats. Parmi eux, celui sur le concept des droits culturels, qui vise à faire reconnaître le droit pour chaque personne de vivre et d’exprimer sa culture. Nous refusons cependant son détournement pour justifier le démantèlement de l’action publique dans la culture ou justifier sa conversion au consumérisme. Pour nous, la garantie d’égalité et de droits pour toutes et tous est au cœur de la notion de service public. Beaucoup de ses agent·es et de travailleur·ses de l’art mettent déjà en application ces préceptes d’égalité, de respect de l’intégrité de l’autre.
L’exercice plein et entier de ces droits passe par le développement de la familiarité de toutes et tous avec les arts et l’acte de création. C’est pourquoi il faut développer l’éducation artistique et culturelle, en donnant les moyens à ses acteur·ices d’effectuer au mieux leur mission d’intérêt général et en lui donnant la place qu’elle mérite tout au long de la vie.
➔ Permettre à la création d’être à l’image de la diversité
La société française est riche d’une diversité précieuse de cultures. Nous devons être à la hauteur de la créolisation, rencontre entre altérités qui produit des situations nouvelles, alternative à l’universalisme abstrait et à l’ethnicisme rabougri. Pour qu’elle bénéficie à tou·tes, il nous faudra mener une lutte active et structurelle contre toute forme de discrimination sexiste, raciste ou de classe. Alors que la parole se libère dans tous les domaines de l’art pour mettre en lumière les violences subies par les femmes, notre action portera dans tous les pans des chaînes de création, et ce dès les structures de formation.
Nous agirons pour permettre à la création d’être à l’image de la diversité qui compose la France en visant une équité dans les moyens attribués et dans la commande publique, notamment dans l’audiovisuel, mais aussi en agissant contre la concentration dans les industries culturelles et dans les médias. Enfin, c’est dans la mémoire commune que cette diversité prendra place, par la valorisation des cultures populaires trop longtemps invisibilisées.
➔ Définir un nouveau pacte social avec les travailleur·ses de l’art et de la culture où priment la confiance et le temps long
Cheville ouvrière de la démocratisation culturelle, c’est avec les travailleur·ses de l’art et de la culture que nous concevrons les grands chantiers que nous proposons. Cela passe par une action publique qui leur fait confiance, qui accepte le pari de l’expérimentation à leurs côtés et qui sort des logiques néolibérales où la concurrence prime sur l’émancipation collective.
Nous reconnaîtrons le travail de l’art, ce qui passera donc par faire des organisations professionnelles de travailleur·ses les premières interlocutrices de cette action publique. Nous travaillerons donc à rendre effectifs tous les droits sociaux que les travailleur·ses méritent, négocierons avec ces syndicats pour les améliorer et nous inspirerons des systèmes vertueux comme l’intermittence du spectacle pour l’adapter à d’autres professions discontinues.
Nos propositions : Les arts et la culture au service du progrès humain
Le service public des arts et de la culture tiendra une place centrale pour que la France puisse être une nation phare de l’émancipation collective en dialogue avec le monde et faire du partage du sensible un droit effectif pour toutes et tous.
L’éducation artistique et culturelle, fer de lance du service public de la culture
- Lancer un plan de formation et de recrutement dans les métiers de l’accompagnement culturel et de la médiation culturelle de proximité en lien avec les associations d’éducation populaire
- Professionnaliser et revaloriser la place de l’éducation artistique et culturelle tout au long de la scolarité, dans les temps scolaires, périscolaires et extrascolaires pour assurer un véritable parcours croisant découverte, pratique et connaissances
- Développer la formation aux arts et à la culture des enseignant·es du primaire et du secondaire, notamment dans le cadre des dispositifs de formation continue
- Jumeler tous les établissements scolaires avec des établissements culturels pour des projets profitant à tous les élèves et leur permettant la pratique artistique, la relation aux savoirs, le contact avec les œuvres et la rencontre avec les artistes
- Permettre l’accès à l’éducation artistique et culturelle tout au long de la vie, notamment à l’université, dans les comités d’entreprise, les lieux de santé, les lieux de privation de liberté, en encourageant la pratique et en développant l’accompagnement autour de propositions artistiques
- Encourager la coopération des médiations culturelles entre les lieux de vie, les structures et les associations pour développer un écosystème des arts et des cultures, c’est à dire la mise en réseau de ses différents acteurs
Former les créatrices et les créateurs de demain
- Donner aux écoles supérieures d’art (arts visuels, théâtre, danse etc.) les moyens adéquats pour assurer la spécificité de leurs enseignements, garantir les passerelles avec la recherche et harmoniser les statuts du personnel de l’enseignement artistique
- Garantir aux étudiant·es des écoles supérieures d’art les mêmes droits que les autres étudiant·es, notamment en ce qui concerne le logement, la médecine universitaire et la restauration abordable
- Développer une vraie politique d’insertion professionnelles pour les travailleur·ses de l’art diplômé·es en lien avec les collectivités territoriales, notamment par la commande publique
- Soutenir et développer la formation dans les métiers d’art, toujours veiller à la préservation et la transmission de ces savoir-faire uniques au monde
- Réengager le ministère de la Culture dans le soutien financier aux conservatoires et permettre, en lien avec les collectivités, l’embauche durable d’un plus grand nombre d’enseignant·es qualifié·es, l’ouverture de nouvelles classes, notamment pour les disciplines les moins présentes telles que la danse et le théâtre, et l’ouverture de nouveaux établissements afin de garantir un accès à toutes et tous à la formation et à la pratique artistique
- Accroître les effectifs des professeur·es spécialisé·es, des artistes enseignant·es chercheur·ses, dans l’enseignement artistique et dans l’Éducation nationale (notamment par le maintien ou la réouverture des classes à horaires aménagés musique, théâtre, danse, arts plastiques…)
- Valoriser la place des enjeux écologiques dans la formation des architectes et des designers, ainsi que dans toutes les autres formations supérieures artistiques
Reprendre les grands travaux pour un service public de la culture du 21e siècle
- Redonner au ministère de la Culture sa capacité d’agir en le dotant de moyens budgétaires et humains, avec un fonctionnement fondé sur le temps long, la coopération interministérielle, la connaissance des métiers, l’analyse, l’évaluation qualitative et le dialogue avec les travailleur·ses de l’art
- Donner le statut de fonctionnaire à tou·tes les agent·es des établissements publics administratifs du ministère de la Culture
- Mener la bifurcation écologique dans les arts et la culture, notamment en accélérant la rénovation des bâtiments, en permettant la formation massive des travailleur·ses de l’art à ces enjeux, en subventionnant et valorisant les initiatives collectives en faveur de l’éco-conception, des mobilités douces, des circuits courts, du recyclage (récupérathèques), du respect de la biodiversité, ou encore de la sobriété numérique
- Valoriser la place des enjeux écologiques dans la formation des architectes et des designers, ainsi que dans toutes les autres formations supérieures artistiques
- Réaffirmer le cadre de vie comme bien commun et se doter d’outils de planification permettant de concilier création architecturale et conservation du patrimoine
- Systématiser le recours à un·e architecte dans la construction de lotissement et y garantir la présence d’espaces communs de pratique et/ou de création artistique
- Conditionner les financements au respect du code du travail et des conventions collectives et renforcer l’inspection du travail dans les secteurs artistiques et culturels
- Aller vers l’égalité territoriale en matière de structures de création, de pratique, de mémoire, de présentation, notamment dans les zones rurales, les quartiers populaires et les Outre-mer en donnant les moyens aux structures existantes de mener leurs missions et en construisant des nouveaux espaces de commun
- Augmenter de manière substantielle les moyens alloués aux arts et à la culture pour les régions ultramarines, accompagner les politiques culturelles des collectivités, mettre en place des filières de formation de l’enseignement spécialisé au supérieur, encourager les collaborations interrégionales et ouvrir les lieux de diffusion de l’Hexagone aux cultures ultramarines
Pour les publics, une culture de proximité et du quotidien, accessible et plus écologique
- Redonner leur capacité d’action aux associations artistiques et culturelles ainsi qu’aux maisons des jeunes et de la culture (MJC) par des conventionnements durables et les moyens financiers adaptés afin de leur permettre d’accomplir pleinement leurs missions, agir pour les préserver de toute tentative d’instrumentalisation de la part de leurs financeurs
- Étendre la gratuité dans tous les musées et monuments publics à commencer par les dimanches
- Encadrer à la baisse les tarifications dans l’offre publique comme privée (cinéma, salles de concerts, etc.) et imposer des tarifs progressifs de manière à garantir l’accès à tous les publics dans le cadre d’un plan de soutien au cinéma
- Valoriser et soutenir les lieux physiques (librairies indépendantes, cinémas avec un ou quelques écrans, lieux physiques pour le jeu vidéo, scènes de spectacle vivant, salles de concerts, disquaires etc.), en veillant à leur déploiement accru sur tout le territoire
- Encadrer les loyers commerciaux de lieux culturels et mettre en oeuvre un programme public de développement de lieux culturels à loyers modérés
- Mettre en place des plans de grande envergure consacrés à l’implantation à long terme et à l’itinérance des travailleur·ses de l’art
- Systématiser le recours à un·e architecte dans la construction de lotissement et y garantir la présence d’espaces communs de pratique et/ou de création artistique
- Défendre le maillage national des bibliothèques et médiathèques :
- Garantir leur budget de fonctionnement
- Titulariser et embaucher des professionnel·les pour assurer de plus larges ouvertures et de meilleures conditions de travail, en partant des revendications des mobilisations récentes
- Généraliser la gratuité du prêt
- Renforcer la participation des usager·es pour en faire des outils de l’éducation populaire
- Garantir leur accès à toutes et à tous : accessibilité physique, absence de pass sanitaire ou vaccinal, collections adaptées aux handicaps visuels, etc.
Une révolution citoyenne dans les arts et la culture
- Lutter activement contre les discriminations de genre et d’origine qui persistent dans les arts et la culture, par la formation, la prévention et l’accompagnement. Rééquilibrer les moyens alloués et diversifier la composition des commissions de financement pour permettre une création à l’image de la France d’aujourd’hui, et valoriser cette même diversité dans la mémoire commune
- Abroger les niches fiscales sur le mécénat et en finir avec les cadeaux aux milliardaires, comme la Bourse de commerce offerte pour 50 ans par un bail emphytéotique signé avec une filiale de la holding familiale de François Pinault
- Intégrer les revenus tirés de la vente des œuvres d’art au barème usuel de l’impôt sur le revenu, imposer progressivement les œuvres cotées et garantir la mise à disposition des dites œuvres au public
- Renforcer le rôle des représentant·es des employé·es et des usager·es et mettre fin à l’intrusion de la finance et des mécènes dans les conseils d’administration des établissements culturels
- Interdire le sponsoring privé dans les services publics et événements culturels et cesser le recours systématique aux cabinets de conseil privés dans l’action publique dans la culture
Reconnaître le travail de l’art
- Améliorer le régime des intermittent·es du spectacle sur la base du socle commun de revendications du mouvement des occupations de théâtre de 2021 et l’étendre aux autres professions culturelles et événementielles discontinues, comme les extras de l’hôtellerie-restauration et les guides conférencier·es
- Créer un Centre national des artistes-auteur·ices qui organisera des élections professionnelles pour négocier et mettre en place une protection sociale adaptée à ces professions, encourageant la création comme l’intermittence du spectacle et mettre en place une continuité de revenus d’urgence pour les artistes-auteur·ices le temps de la mise en place de ce nouveau régime
- Garantir aux travailleur·ses de l’art l’accès à tous les droits sociaux, comme la retraite, les congés maladie et parentaux, la médecine du travail, notamment adaptée pour les danseur·ses et circassien·nes, etc.
- Titulariser les précaires et les permittent·es du service public de la culture et de l’audiovisuel public
- Garantir la pérennité des ensembles et orchestres permanents et l’emploi statutaire, conditions de la mise en œuvre de leurs missions et de leurs cahiers des charges
- Instituer un « domaine public commun » pour financer la création nouvelle, constitué d’une redevance sur les droits patrimoniaux des créateur·ices à partir de leur décès et d’une taxe sur les usages exclusivement commerciaux des œuvres qui ne sont plus soumises à droits d’auteur
Favoriser la multiplicité des imaginaires
- Développer une nouvelle politique de la création artistique, en sortant des logiques d’appels à projet et en revoyant à la hausse les moyens consacrés à la création dans tous les domaines, en dotant les artistes et équipes indépendantes de moyens supplémentaires pour permettre leur indépendance vis-à-vis des structures de diffusion, et favorisant les conventionnements pluriannuels
- Initier le ralentissement du cycle de production-diffusion pour favoriser des temps de création plus longs, de meilleures conditions de travail pour les équipes et des rencontres de la population avec les œuvres dans la durée
- Mieux accompagner et subventionner les équipes réalisant un travail de proximité et accompagner de manière volontariste les disciplines les moins soutenues aujourd’hui
- Interdire la publicité numérique et lumineuse, ainsi que l’affichage de publicité commerciale dans les gares, aéroports et stations de transports publics de personnes
- Créer un fonds d’appui aux communes qui transforment les panneaux publicitaires en espaces d’affichage culturel et d’expression libre
- Encadrer et réglementer la production de produits dérivés d’œuvres culturelles afin de sortir du consumérisme, notamment face au phénomène des NFT (certificats de propriété numériques)
Le patrimoine, bien commun pour le futur
- Sortir le patrimoine national, ses établissements et ses agent·es des logiques de privatisation rampantes en commençant par abroger la réforme du Mobilier national et réintégrer le Mont Saint-Michel et la Cathédrale de Paris dans le Centre des monuments nationaux
- Organiser des travaux de rénovation du patrimoine en s’appuyant sur les services publics dans l’État et les Directions régionales des affaires culturelles (DRAC) et en leur donnant les moyens de fonctionner. Sortir des mesures de pure communication dans le patrimoine (Loto du Patrimoine, mission confiée à Stéphane Bern, etc.)
- Faire appliquer l’obligation de consacrer 1 % des budgets de construction à la création d’une œuvre artistique et l’étendre à tous les chantiers, en lien avec la société et l’environnement social
- Revenir sur la réforme de la loi Littoral et sanctuariser les règles de protection du patrimoine en matière d’urbanisme
- Mettre fin à la concurrence dans l’archéologie préventive et créer un pôle public de l’archéologie permettant une action concertée et une circulation des savoirs entre l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), les collectivités locales et la recherche publique
- Investir dans les Archives nationales, notamment dans les locaux nécessaires à leurs missions, et démocratiser l’accès aux archives en refusant les lois d’exception dans ce domaine
- Protéger et numériser les fonds photographiques nationaux
Défendre la diversité et l’indépendance de nos industries culturelles, par un protectionnisme solidaire et la lutte contre les concentrations
- Mettre en place des lois de déconcentration (anti-monopole) dans les secteurs culturels (cinéma, audiovisuel, livre, jeu vidéo, spectacle vivant, musique…) afin de garantir l’indépendance et favoriser la diversité d’expression et de création
- Préserver et développer l’ambition de service public dans les industries culturelles et les systèmes de financement redistributifs et garantissant la diversité et l’indépendance
- Créer une médiathèque publique en ligne gratuite regroupant les œuvres (livres, cinéma, audiovisuel, théâtre, arts visuels…) tombées dans le domaine public et une proposition d’œuvres récentes programmées temporairement, sur la base de Gallica
- Fixer aux chaînes du service public de l’audiovisuel des objectifs de diversité, de renouvellement et d’émergence dans leurs acquisitions
- Élaborer pour chaque branche, en associant constamment l’ensemble des composantes, organisations professionnelles, des plans de développement qui développent des objectifs ambitieux de protectionnisme solidaire, d’indépendance, de diversité et d’émancipation
- Créer un Centre national du jeu vidéo sur le modèle du Centre national du cinéma (CNC)
- Reconnaître le jeu vidéo en tant qu’art et lui faire bénéficier du service public qu’il mérite : éducation artistique et culturelle, valorisation et partage du patrimoine, formation (en particulier aux écritures), pratique amateure et professionnelle, etc.
- Développer les écoles publiques de jeu vidéo et une filière de la création numérique dans l’enseignement professionnel
- Garantir l’indépendance, la transparence et la gouvernance démocratique des Centres nationaux du livre, de la musique et du cinéma, notamment par l’élection de leurs représentant·es par les professionnel·les et l’intégration du public dans les commissions.
- Lancer un grand plan pour le développement du cinéma français, de sa diversité, de son indépendance, notamment par la lutte contre la concentration
- Réaffirmer le principe de souveraineté culturelle du cinéma français, défendre ses valeurs d’indépendance et de diversité
- Redonner place à des émissions de cinéma sur les chaînes de service public de la télévision et de la radio
- Augmenter les obligations d’achat d’œuvres audiovisuelles françaises pour les chaînes de télévision française, avec des critères précis de diversité, pour valoriser le cinéma indépendant, les nouveaux cinéastes, renforcer la production d’œuvres au sein du service public de l’audiovisuel et garantir le respect des obligations d’investissements de l’ensemble des chaînes privées
- Remettre l’audiovisuel public au cœur de la création audiovisuelle, grâce à son rôle dans le financement et la diffusion, sa place dans la chronologie des médias et dans la valorisation, avec notamment des obligations renforcées, une place rehaussée de la diffusion des films dans la grille de programmation et la programmation d’émissions de cinéma sur les chaînes du service public
- Protéger les catalogues de films et nos lieux culturels des opérations de rachat par des acteurs extra-européens comme des risques posés par la concentration
- Instaurer et appliquer les obligations de diversité ambitieuses dans les salles de cinéma : réaffirmer la définition du label Art et Essai ; refuser aux multiplexes la programmation d’un même film dans plusieurs salles d’un même complexe, restituer au médiateur du cinéma une véritable autorité de régulation, avec un pouvoir de sanction
- Remettre à plat le système des aides du Centre national du cinéma (CNC) et conditionner les financements au respect de la norme sociale et de la lutte contre les discriminations
- Obliger les plateformes de diffusion en ligne (streaming) à rendre leurs algorithmes publics et à permettre à tou·tes de changer les paramètres de préférences de contenus. Les choix éditoriaux devront également respecter des règles de diversité
- Lancer un plan d’envergure pour le livre en faveur de la diversité et de la déconcentration, qui comprendrait notamment :
- La mise en place d’un tarif postal préférentiel pour les livres vendus par les librairies indépendantes
- La hausse de la commande publique dans l’édition indépendante ainsi que dans les librairies indépendantes
- L’interdiction de la création de nouveaux grands entrepôts dédiés au stockage et à la vente à distance de livres neufs afin de lutter contre la concurrence de la FNAC et d’Amazon et de maintenir un réseau dense de librairies
- L’assujettissement d’Amazon à l’impôt sur les sociétés français, au même titre que les entreprises physiquement implantées en France
- Une refonte des circuits de distribution et de diffusion garantissant la lutte contre la concentration
- Une valorisation des différents registres littéraires dans l’audiovisuel public
- Relancer les négociations afin de rééquilibrer les contrats avec les diffuseurs pour améliorer la rémunération des créateur·ices de musiques et de films, en particulier sur les plateformes de streaming et de webtoon
- Faire de l’audiovisuel public un outil actif de valorisation de la diversité dans tous les registres artistiques, à travers une programmation mettant en avant différents registres cinématographiques, littéraires musicaux et de spectacle vivant à des heures de grande écoute
La culture, levier d’émancipation et de rayonnement dans les échanges internationaux et pour la paix
- Désobéir aux règles de concurrence « libre et non faussée » dans l’Union européenne concernant le secteur culturel dans le cadre de l’option de retrait
- Défendre de façon intransigeante la langue française dans toutes les instances européennes et internationales. Soutenir l’expression artistique et culturelle francophone, tant en France qu’à l’étranger
- Renforcer le réseau des Instituts et Alliances françaises à l’étranger. Favoriser la diversité et l’indépendance en repensant les choix de nominations de leurs dirigeant·es . Ce soutien accru concerne aussi les Écoles françaises à l’étranger (Rome, Athènes, Le Caire, etc.) ainsi que les missions archéologiques
- Renforcer l’usage du français dans la production des films des pays francophones tout en adoptant une politique soutenue de sous-titrage en langue nationale. Étendre la diffusion des films de langue française
- Être ouvert à la discussion quant aux demandes de restitution et de circulation des biens culturels issus de la colonisation
- Sortir des logiques néocoloniales de vente d’expertise culturelle et néolibérale de vente de marque (ex : Louvre Abu Dhabi) et mener une vraie politique de coopération culturelle