Notre constat : la surconsommation est devenue insoutenable

« Produisez n’importe quoi et consommez-en tous, ceci est le pain des actionnaires » !

La planète croule sous les déchets et la France aussi. Chaque année, le pays produit 326 millions de tonnes de déchets. Si 39 millions de tonnes sont du fait des ménages, la majorité provient de l’industrie et surtout du secteur de la construction. 

Contrairement à ce qu’essaient de nous faire croire les industriels, le problème des déchets n’est donc pas simplement une affaire de recyclage des déchets ménagers. Dans le secteur de la construction, beaucoup des acteurs se livrent à un véritable gaspillage de ressources. Aujourd’hui, le secteur du bâtiment et des travaux publics produit plus de 200 millions de tonnes de déchets. 93 % de ces déchets sont des déchets inertes (gravats, béton, enrobé…). Si une partie est valorisée principalement en sous-couche routière et en remblais de carrière, beaucoup ne sont ni recyclables, ni réemployables, ni valorisables. Pire encore, ils sont potentiellement toxiques et dissimulés pour partie dans des décharges sauvages. 

Cette accumulation de déchets de toutes natures doit cesser. Une grande partie des déchets auxquels nous sommes confrontés ne peut pas être revalorisée : 42 % sont recyclés ou compostés, tandis que 32 % sont incinérés et 29 % enfouis en décharge. Si la plus grande proportion des déchets est recyclée, il s’agit parfois d’un « sous-cyclage», c’est-à-dire que le matériau recyclé est d’une qualité inférieure à la matière première lorsque celle-ci est difficilement recyclable. L’incinération a un impact néfaste sur l’environnement et sur la santé. Elle émet notamment des dioxines qui entraînent une surmortalité autour des lieux d’implantations, souvent situés dans des quartiers populaires. 

La production massive de déchets est aussi un gaspillage de ressources stratégiques. Le renouvellement incessant des gammes d’ordinateurs, de smartphones et d’objets connectés bien souvent absurdes monopolise des métaux rares qui sont indispensables à la bifurcation écologique, par exemple dans les batteries et les énergies renouvelables. Alors que des millions de familles n’ont pas les moyens de se nourrir convenablement, 150 kilos par personne de nourriture sont jetés chaque année. 381 millions de tonnes de matériaux de construction ont été utilisés en 2017, avec à la clé plus de 200 millions de tonnes de déchets. Réduire la production de déchets, c’est donc préserver et mieux utiliser nos ressources.

Les conséquences environnementales sont terribles. Les déchets plastiques, par exemple, sont un véritable fléau. Nous produisons 360 millions de tonnes de plastique chaque année. Dans les océans, d’énormes « continents de plastique » grossissent à vue d’oeil et menacent la biodiversité, la qualité sanitaire de la chaîne alimentaire et l’avenir des secteurs économiques dépendants de la mer. Il y aurait plus de 24 milliards de particules de microplastiques en suspension dans les mers du globe, soit cinq fois plus que dans les estimations faites en 2015. 

Les causes sont pourtant connues. La première est évidemment le système économique qui vit de la surconsommation. Le fétichisme de la marchandise déshumanise les êtres humains, obligés de consommer tout et n’importe quoi pour assurer la survie du système économique. Les entreprises s’acharnent à créer des besoins « artificiels » théorisés par le sociologue Razmig Keucheyan. Pour les profits de quelques multinationales, la course aux terres rares fait par exemple subir aux populations du Kivu en République Démocratique du Congo travail forcé, sévices et viols. 

Plutôt que d’encourager la réparation et le réemploi, les entreprises ont actuellement intérêt à renouveler toujours plus rapidement leurs gammes pour que les consommateur·ices rachètent sans arrêt. Elles préfèrent bien souvent le jetable au durable, le neuf à la réparation et l’obsolescence programmée à la qualité. Nous portons aujourd’hui deux fois moins longtemps un T-shirt qu’il y a 20 ans et 88 % des téléphones qui sont remplacés fonctionnent encore selon l’ADEME.

Les produits sont devenus tellement compliqués et chers à réparer pour inciter les consommateur·ices à racheter que jeter est devenu la solution de facilité. Au bout du compte, le consommateur ou la consommatrice est perdant·e puisqu’il ou elle doit racheter sans cesse pour remplacer les produits qui tombent en panne prématurément. 

Enfin, une fois le produit en fin de vie, le recyclage est insuffisamment développé et n’est pas la solution miracle que les industriels veulent nous vendre. Par exemple, les matières plastiques sont encore difficiles voire impossibles à retraiter pour certaines d’entre elles. Une partie de ces activités est actuellement gérée par des géants industriels oligopolistiques qui absorbent de nombreux crédits publics et bénéficient de traitements fiscaux avantageux.

Les dispositifs de consigne sont devenus totalement marginaux sous la pression des industriels alors qu’ils permettent de réduire la quantité de déchets produits. La loi dite « anti gaspillage et économie circulaire » matérialise le manque de volonté politique dans le développement de la consigne qui fonctionne pourtant très bien dans d’autres pays. Elle nécessite des investissements de départ pour reconstruire les filières nécessaires et organiser la logistique et les capacités de stockage. 

Mais plutôt que d’affronter ces problèmes, le gouvernement préfère exporter une partie des déchets pour s’en débarrasser. Voilà au moins un domaine où la balance commerciale de la France se porte bien, puisque nous exportons près de trois fois plus de déchets que nous importons. Certains pays ont commencé à refuser des déchets d’exportation, ne pouvant plus supporter le poids de tout ce qu’il y avait à recycler. Les conditions de traitement des déchets font peser sur les populations locales un risque sanitaire majeur et les trafiquants en tirent des bénéfices faramineux. 

5 ans de Macron auront accéléré le mouvement : laisser faire les industriels et ne pas se soucier des conséquences. La loi « anti gaspillage et économie circulaire » entérine le choix du tout recyclage, du solutionnisme technologique, de la place privilégiée des industriels dans la gouvernance. Elle n’a aucune ambition à la hauteur à proposer face aux déchets industriels et du BTP.

Notre projet : produire autrement pour diminuer le poids des déchets

Le système économique actuel n’est pas soutenable. Pour appliquer la « règle verte » et ne plus prélever à la nature plus que ce qu’elle peut reconstituer, il faut changer de logique. Nous devons sortir du cercle vicieux « produire plus pour consommer plus ». Nous substituerons la société du réparable et du durable à celle de l’obsolescence programmée et du tout-jetable. L’économie circulaire que nous développerons réindustrialisera localement le pays.

Pour mener ces changements à bien, il faut agir tout au long de la chaîne.

D’abord, il faut interroger en amont l’utilité sociale des objets produits, pour ne plus produire de déchets facilement évitables. La question de la gestion de la fin de vie des produits doit être rendue centrale dans le processus de production par des réglementations plus ambitieuses. En d’autres termes, les entreprises seront mises face à leur responsabilité pour produire des biens plus durables, moins emballés et facilement recyclables. Il faut développer l’approvisionnement durable en prélevant le moins possible de matériaux et de ressources non renouvelables. Au-delà des biens de consommation, les processus de production des industries et de la construction devront être refondés pour diminuer leur production de déchets.

Ensuite, une fois le produit acheté, la transformation en déchet doit devenir l’exception et non plus la norme pour de nombreuses catégories de produits, notamment électroniques et électroménagers. Nous prolongerons au maximum la durée de vie des produits en développant la réparation et le réemploi et mettrons un terme à l’obsolescence programmée. 

Dernière étape, les déchets restants seront mieux retraités. La priorité sera donnée au réemploi via des dispositifs de consigne puis au recyclage et au compost, pour réduire au maximum le poids de l’incinération et de la mise en décharge. Il faut donner aux collectivités les moyens de prendre elles-mêmes en charge le retraitement des déchets quand elles le souhaitent.

En résumé, notre philosophie est la suivante : produire le moins de déchets possibles et bien recycler ceux qui subsistent. En parallèle, nous réparerons les dégâts que le système a déjà causés.

Nos propositions : vers une France « zéro déchet »

Changer la production pour réduire la quantité de déchets et faciliter leur traitement

Réduire la quantité de déchets ménagers

Réduire la quantité de déchets issus des entreprises et des collectivités

Faire émerger une filière industrielle de l’économie circulaire

Pour une consommation plus durable

Promouvoir le réemploi et la réparation

Contrer l’influence de la publicité

Mieux traiter les déchets restants 

Favoriser les modes de traitement durables

Remettre le secteur au service de l’intérêt général

Mettre les éco-organismes au service de l’intérêt général

Les éco-organismes gèrent les filières responsabilité élargie du producteur (REP). Ce sont des sociétés de droit privé assurant la mission d’intérêt général de prendre en charge la fin de vie des produits mis sur le marché, à partir de ressources propres, tirées de la taxation de ces produits et de leurs emballages (écotaxe). 

Créés à l’origine pour favoriser la prévention des déchets, l’éco-taxe payée par les consommateur·ices finit par créer un marché, dans des structures privées sans cahier des charges contraignant, et où les ONG désespèrent face aux multinationales qui siègent dans les conseils d’administration.

La transition vers l’économie circulaire est portée par les acteurs privés avec un projet global peu ambitieux et presque uniquement tourné vers le recyclage, quand il faudrait poser des limites à la production elle-même et pousser fortement au réemploi et à la réparation. 

Réparer les dégâts