Notre constat : la République oublie les quartiers populaires

Les politiques successives de relégation économique, sociale et politique ont cassé notre pays. L’urbanisme des grands ensembles a regroupé les populations les plus vulnérables, éloignées des syndicats et des associations, à la merci des monopoles : commerces aux prix des beaux quartiers, équipements en ruine facturés à prix d’or, marchands de sommeil sans scrupules. Désormais, la proclamation des droits fondamentaux butte sur une réalité essentielle : selon son lieu de naissance puis de vie, on n’a pas les mêmes opportunités, ni les mêmes efforts à faire pour choisir son destin. Ces inégalités ne cessent de s’accentuer, alimentées par le sous-investissement public dans les quartiers populaires, la paupérisation de la population, l’inaccessibilité des centres urbains en transport public et les discours de stigmatisation routiniers dans l’audiovisuel public ou privé. Aujourd’hui :

Ce n’est qu’un extrait de la longue liste des reculs de la République, qui délaisse des pans entiers de sa population.

Alors que leur mode de vie est bien moins polluant que celui des riches, les habitant·es des 1 500 quartiers classés « prioritaires » par la politique de la ville subissent pourtant les catastrophes environnementales de plein fouet. Le réchauffement climatique est particulièrement insupportable dans les appartements mal isolés, il est invivable lorsqu’on n’a guère d’alternative verte, ombragée ou aquatique à l’extérieur. En outre, le bruit est omniprésent, causé par les grandes routes voisines du foncier à bas prix ou par le trafic aérien qui a tiré les loyers vers le bas : les populations n’ont pas le droit au silence, donc à la concentration ou au sommeil réparateur. À cela s’ajoute la triple peine de la pollution de l’air et du sol, causée par l’emplacement des quartiers populaires construits dans les années 1970.

Là, les environnements sont laissés à l’abandon, entre friches et absence de nettoyage régulier, entre infrastructures et équipements intérieurs non-remplacés. La conséquence n’est pas qu’esthétique : des centaines de personnes aux boîtes aux lettres détériorées ne reçoivent pas les courriers de relance pour des paiements ou, au contraire, de notifications de droits, ce qui leur coûte des sommes immenses chaque année.

De surcroît, les injustices n’ont pas épargné le champ des droits civiques et politiques. Les discriminations fondées sur la couleur de peau, l’origine ethnique ou la religion touchent tout particulièrement ces quartiers. Elles durent toute la vie, à chaque refus d’embauche ou de location en raison d’une adresse postale ou d’une origine supposée. Les tensions que provoque une telle situation sont tout particulièrement perceptibles dans la relation entretenue par les habitant·es avec les forces de l’ordre. Avant toute chose, nous voulons l’égalité, que tou·tes les habitant·es puissent vivre dans de bonnes conditions, accéder aux biens vitaux et culturels, au loisir et au sport, et de manière digne. Que tou·tes les habitant·es soient des acteurs et actrices dans la vie citoyenne locale. 

La confiscation du pouvoir par une oligarchie, le clientélisme et l’affairisme ont dégoûté le peuple de la politique, telle qu’elle se présente à lui la plupart du temps. Les habitant·es ne se sentent plus citoyen·nes ni concerné·es par la politique. C’est dans ces conditions que la colère populaire se manifeste par l’insurrection froide de l’abstention. Désorientée et désemparée, la majorité devient dès lors invisible dans les scrutins.

Loin de poser un diagnostic rigoureux ou de s’intéresser aux conditions de vie des populations sur place, les médias multiplient les documentaires sensationnalistes et les propos méprisants. Ces territoires ne sont pas seulement à la périphérie des services publics et de l’accumulation capitaliste, ils subissent des attaques télévisuelles incessantes.

Mais cette France créolisée des cités et des villes populaires ne correspond pas au désert politique et culturel pointé du doigt par les puissants. Elle est riche d’histoire et de luttes, de créativité et de solidarités. Notre responsabilité est d’aider le grand nombre qui y vit à retrouver une fierté collective.

Notre projet : vivre dignement dans les quartiers populaires

Il est urgent d’affirmer que les quartiers populaires et leurs habitant·es sont une chance et une richesse pour notre pays

Ils sont aussi une chance démographique car ces territoires sont jeunes et dynamiques ; une chance culturelle et artistique puisque ces quartiers fourmillent de lieux de création musicale, chorégraphique, en arts plastiques ou en littérature ; une chance économique, car malgré le chômage, ici s’inventent chaque jour de nouveaux modèles d’économie sociale et solidaire, le tissu associatif y crée des liens et fabrique de l’émancipation ; une chance civique enfin, puisque ces endroits constituent le terreau de la lutte contre les discriminations et le racisme, pour une société plus juste et solidaire à l’heure où tant d’autres renoncent et se replient sur des illusions sécuritaires et identitaires.

Au contraire de ces gouvernants qui n’ont eu de cesse de traiter les quartiers populaires comme un problème à gérer à moindre coût et qu’ils qualifient de “territoires perdus de la République”, nous réaffirmons une réponse globale, concertée et coordonnée aux difficultés qui minent la vie de ces quartiers, qui nécessitera des moyens financiers investis à réelle hauteur des besoins avec une obligation d’évaluation et de résultat pour chaque dispositif.

Toutes et tous, dans les quartiers populaires, nous voulons bien vivre : avoir un emploi et des revenus stables, des services publics de qualité́, une éducation de qualité, l’accès aux soins, une bonne retraite, l’égalité des droits, la même justice pour tou·tes, un environnement sain, un habitat et un cadre de vie agréables, avoir accès à la culture, aux loisirs et aux sports.

La nouvelle France des villes et des quartiers populaires a besoin de retrouver la dignité et le respect dans le regard que lui porte l’ensemble de la société, à commencer par les institutions publiques. Pour cela il faudrait commencer par cesser de demander à certain·es habitant·es plutôt qu’à d’autres de justifier leur intégration alors qu’elles et ils font partie intégrante de la nation depuis plusieurs générations maintenant. Pour devenir des citoyen·nes libres, les personnes ont besoin qu’on les laisse tranquilles avec leurs origines qui relèvent de leur sphère privée. Elles savent très bien vivre en pleine harmonie et en conscience de leurs doubles cultures, et c’est une richesse totalement compatible avec les espaces communs de notre République. Reconstruire durablement le respect et la dignité suppose de faire France de tout bois.

Nos propositions : Liberté, Égalité, Fraternité pour tout le monde

Éduquer et former tout le monde, de la maternelle aux études supérieures

L’éducation est l’affaire de tous et toutes. Elle concerne donc les parents, les institutions locales, les associations, les partenaires de tous ordres, et bien sûr, les enseignant·es et le personnel de l’Éducation nationale. Dans les quartiers, nous devons affirmer que l’échec scolaire n’est pas une fatalité. Nous devons affirmer notre but de transformation sociale qui passe par une éducation émancipatrice de qualité et d’excellence pour toutes et pour tous. Afin d’atteindre cet objectif, nous voulons :

Nous croyons en un enseignement professionnel de qualité – doté, là aussi, de moyens augmentés, transmis par des enseignant·es dont les élèves auront un emploi garanti par le grand plan de bifurcation écologique. Nous proposons différentes mesures :

Il faudra aussi rétablir le droit à l’enseignement supérieur de qualité et avec des moyens. 

Garantir l’accès aux droits 

Nous proposons d’organiser des états généraux des quartiers populaires pour construire une véritable égalité territoriale, notamment dans les services publics. Notre objectif sera de défendre et reconstruire le maillage de transports en commun et de services publics dans les quartiers populaires afin de garantir une distance maximale (de quinze à trente minutes, en voiture ou en transport collectif) entre tout lieu d’habitation et les services publics essentiels (école, gare, hôpital, bureau de poste).

Afin d’en finir avec les discriminations à l’embauche, de faciliter la recherche d’emploi, de sécuriser les employeurs de bonne foi et de réprimer ceux qui usent de cette discrimination, nous proposons de : 

Ces mesures ne suffiront pas à en finir avec le chômage et la précarité qui culminent dans les quartiers populaires. L’Avenir en commun propose aussi de : 

Améliorer les conditions de vie des habitant·es

Un logement digne pour toutes et tous

Pour combattre l’inégalité dans l’accès à une mobilité résidentielle, nous proposons d’agir sur le nombre et la diversité de l’offre de logement. 70 à 75 % de l’ensemble des familles françaises ont des revenus autorisant l’accès à un logement social. Élargir le public du logement social est aujourd’hui une priorité : il faut y introduire des classes moyennes, dont la situation sociale leur permet de protester en cas de problème dans l’habitat et de supporter des charges supérieures, immédiatement, face à toute urgence. En plus d’imposer la mixité, le logement social limite la spéculation immobilière et sort des familles de logements insalubres. Ainsi, nous proposons de :

Nous voulons également lutter contre l’indécence et l’insalubrité des logements. Nous exigeons le droit à un logement décent pour toutes et tous. Voici nos propositions :

Permettre l’accès aux réseaux et aux biens communs

En matière de transports, il faut favoriser les transports collectifs et les circulations actives (à pied et à vélo). Les difficultés de transports, notamment inter-banlieues, pénalisent les habitant·es des quartiers en matière de déplacements, d’études et en premier lieu d’emploi. Il nous faut prendre en compte d’une part le développement des bassins d’emploi en proximité des lieux de résidence, d’autre part les réseaux de circulation active, à une époque où près de 50 % des déplacements concernent des distances inférieures à 5 kilomètres. 

Voici nos propositions :

Dans les quartiers populaires, il y a urgence à développer les énergies renouvelables. L’habitat collectif est utilisateur d’énergies fossiles et le coût qui en résulte, tant écologique que financier, porte plus fortement sur les foyers populaires. Nul moyen d’échapper à la chaufferie centrale, pour se doter de panneaux solaires ou d’éolien comme dans un pavillon ; nul moyen d’échapper au contrat avec le fournisseur d’eau ou l’entreprise d’ordures ménagères. Notre objectif : diviser par deux l’empreinte carbone des quartiers dans les dix prochaines années. Pour cela, il faut :

Généraliser la gratuité : 

La crise sanitaire a mis en évidence la situation critique de la santé dans les quartiers populaires. L’offre de soins y est insuffisante. Nous devons garantir un système de santé de qualité, de proximité et des soins pris en charge intégralement. Nous proposons donc :

Le progrès humain partout

Notre projet sportif pour les quartiers populaires passe par la revalorisation de la pratique sportive scolaire en lien avec les associations qui mènent un travail d’éducation par le sport. Nous proposons les mesures suivantes :

L’accès aux arts, à la musique, à la danse, aux arts plastiques permet le développement d’un esprit critique, l’autonomie et l’ouverture à l’autre. La richesse culturelle constitue aujourd’hui un marqueur des quartiers populaires. Des compléments sont présentés dans le livret thématique sur la culture dans la même collection. Nous proposons en outre plusieurs mesures : 

Vivre en sûreté, en finir avec les violences policières

Les habitant·es des quartiers populaires ont le droit à la sûreté et à la tranquillité. Il nous faut repenser le fonctionnement de la police et de la gendarmerie pour revenir à une logique de gardiens de la paix. Nous réformerons la police de la cave au grenier pour qu’elle retrouve son rôle de service public de proximité au service des habitant·es. Nous proposons de :

Garantir la République exemplaire

La citoyenneté constitue la clé indispensable pour bâtir la société de l’harmonie. Cela fait bien longtemps que les habitant·es des quartiers populaires subissent une relégation urbaine, économique, sociale et bien sûr politique. Celle-ci n’a fait que s’aggraver avec la période sécuritaire qu’a engendrée la lutte contre le terrorisme. Il existe aujourd’hui une rupture de l’unité républicaine. La lutte contre les discriminations urbaines, ethniques, sociales, et économiques vécues quotidiennement passe par le rétablissement d’une totale égalité de traitement d’avec tout autre citoyen. Ici, notre proposition de convoquer une Constituante pour passer à la 6e République trouve tout son sens. Elle permettra notamment de : 

Cela passe également par les mesures suivantes :