Tout au long de la campagne, de nombreuses organisations (associations, syndicats, collectifs, etc) sollicitent Jean-Luc Mélenchon pour qu’il détaille ses propositions sur des enjeux qui les concernent. L’équipe du programme et les groupes thématiques répondent, pour chacune de ces demandes, en développant des points précis de notre programme l’Avenir en commun.
Nous répondons ci-dessous aux questions du SNU Pôle Emploi FSU.
Pôle emploi est aujourd’hui un établissement public national, ce qui garantit une égalité de traitement pour l’ensemble de nos concitoyens sur l’ensemble du territoire. Des groupes d’influence portent la régionalisation d’une partie de nos activités, ce qui remettrait en cause le caractère national de notre établissement.
● Vous Président·e, maintiendrez-vous le caractère national ainsi que les missions de Pôle emploi et quelle politique de l’emploi souhaitez-vous instaurer entre les conseils régionaux et Pôle emploi ?
Le service public d’emploi demeurera une institution nationale publique, sans tutelle des collectivités. D’une part, car nous sommes favorables à un recentrage des régions sur des compétences environnementales, notamment la gestion de l’eau. D’autre part, car nous parlons avec Pôle emploi d’un opérateur national : il n’a pas à traiter différemment des usagers selon leur lieu de vie. Ce serait d’ailleurs absurde sur le strict plan de l’intermédiation, puisque les frontières régionales casseraient les réseaux de placement, que les offres risqueraient d’être balkanisées entre régions, que la circulation de la main-d’œuvre (quand même la mission initiale de l’ANPE !) serait mise en péril et que seules les plateformes privées ou jobboards assureraient le placement à l’échelle de la France. C’est une mise en danger de Pôle emploi, ses agents et son public.
Bien entendu, les offres disponibles, les modes de recrutement les plus répandus et les prestations utiles varient géographiquement, selon le bassin d’emploi concerné. Mais ces bassins ne coïncident pas du tout avec l’échelle régionale, et assez fortement avec le périmètre des agences locales. Celles-ci sont largement capables d’apprécier la situation locale. C’est donc à elles de constituer les interlocutrices des collectivités territoriales sur le terrain, et en aucun cas les courroies de transmission des exécutifs régionaux.
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A l’encontre des intérêts et des besoins de nos usagers·ères, les effectifs permanents de notre établissement sont grignotés d’année en année dans le cadre du plafond d’emplois inscrit dans le Projet de Loi de Finances. Malgré de récents recrutements en CDD qui ne comblent pas les manques, les conditions de travail des salarié·e·s et le service rendu aux usagers se dégradent.
● Vous Président·e, quelle sera votre politique de maintien et de renforcement des effectifs en CDI au sein de notre établissement ?
Une augmentation des effectifs sera nécessaire afin de diminuer la charge de travail qui pèse sur les épaules des agents en charge de l’accompagnement et de l’indemnisation et pour mener à bien les nouvelles missions qui seront données au service public de l’emploi.
Nous limiterons à 5% des effectifs en CDD telle que le prévoyait initialement votre CCN et proposerons la cédéisation de tous les personnels précaires qui le souhaitent.
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Notre organisation syndicale, avec d’autres, a combattu les décrets instaurant les nouvelles mesures pour l’indemnisation des privé·e·s d’emploi. Les effets concrets de cette « réforme » commencent à se faire sentir et montrent déjà une diminution drastique des montants d’indemnisation, un renforcement de la précarité et des tensions accrues entre les agent-e-s de Pôle emploi et les privé·e·s d’emploi indemnisé·e·s.
● Vous Président·e, comment envisagez-vous le système d’indemnisation des privé·e·s d’emploi ? Remettrez-vous en cause cette « réforme » ?
Le chômage tue 14 000 personnes par an, à cause du stress, de la dépression, du manque de sommeil. Les chômeur·ses ne sont pas les responsables du chômage, ils et elles en sont les principales victimes ! L’assurance chômage doit les protéger. Nous faisons les propositions suivantes :
- Refuser la réforme Macron : indemniser les chômeur·ses en fonction de leurs derniers salaires grâce à une assurance calculée à partir du premier jour de travail, sans délai de carence
- Élargir la médecine du travail aux chômeur·ses dès le premier jour de la fin de contrat
- Supprimer l’obligation d’accepter une soi-disant “offre raisonnable d’emploi”
- Cesser la radiation des chômeur·ses à la première absence à un rendez-vous et en finir avec la logique de radiation au moindre prétexte pour faire baisser artificiellement les chiffres du chômage
- Rétablir un régime d’assurance chômage spécifique pour les intermittent·es de l’emploi et les intérimaires permettant de leur assurer une meilleure couverture chômage entre deux périodes d’emploi
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La fiscalisation/suppression de la cotisation chômage des salarié·e·s a détourné une part des moyens financiers de cette partie de la protection sociale.
● Vous Président·e, comment assurerez-vous le maintien et le renforcement du régime d’Assurance Chômage ?
Vous retrouverez notre réponse à cette question dans notre réponse à la question précédente.
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Depuis quelques années, les outils numériques sont imposés par nos directions comme la baguette magique pour répondre aux besoins de nos usagers. Les conséquences de l’utilisation à outrance de ces outils sont la mise à distance de nos publics et la mise en difficulté d’une partie de ces publics (y compris avec des usagers qui sont en difficulté pour faire valoir leurs droits).
● Vous Président·e, quelle sera votre politique pour garantir l’accès aux services publics, notamment le nôtre ?
Nous garantirons le maintien de guichets et de formulaires papier malgré la dématérialisation des services publics et la transformation numérique des administrations et déployerons un service public de proximité pour accompagner les 20 % de Français·es en difficulté avec le numérique (illectronisme).
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Les méthodes managériales appliquées à Pôle emploi comme dans tous les Services publics sont issues du « Lean management ». Ce type de management détruit les collectifs de travail et le sens de nos métiers. En conséquence, un grand nombre de nos collègues sont à bout et il en résulte une augmentation des arrêts de travail.
● Vous Président·e, quelle sera votre politique RH pour l’ensemble des Services publics ?
L’application du New Public Management, transposant dans le public le fonctionnement du privé, s’est faite à coup de restructurations et de politiques du chiffre. Chaque service ayant des obligations de résultats, une injonction à la rentabilité s’est installée, et ce, peu importe le sens de la mission.
Le management inhumain n’est plus un tabou, mais est progressivement reconnu comme un crime contre les salarié·es. Il faut continuer dans cette voie, pour mettre fin à la barbarie quotidienne et aux coûts sociaux gigantesques qu’elle entraîne – 13 milliards d’euros annuels pour la branche accidents et maladie professionnelle de la Sécurité sociale.
Le secteur public subit depuis des années des coupes dans ses effectifs. Depuis 2007, la fonction publique d’État a été privée de 158 000 postes. Nous manquons de tout : de soignant·es, d’enseignant·es, de magistrat·es.
Dès l’été 2022, le gouvernement de l’Union populaire engagera l’embauche immédiate de plusieurs milliers de fonctionnaires dans des services essentiels, avec l’objectif d’un million de nouveaux emplois publics.
Ces fonctionnaires viendront notamment renforcer l’hôpital public aujourd’hui à bout de souffle ; soutenir des enseignant·es épuisés par l’improvisation sanitaire et les contre-réformes Blanquer ; secourir une justice qui a été clochardisée par ses ministres successifs et qui n’a plus les moyens d’assurer ses missions fondamentales ; accompagner et soigner nos aîné·es dignement face à la perte d’autonomie.
Ils viendront aussi renforcer l’État pour faire face aux immenses défis qu’il aura à aborder sans attendre : la planification écologique et son corollaire la relocalisation de notre économie.
Notre gouvernement décidera également la titularisation des agent·es volontaires parmi les 1,1 million de contractuel·les des trois fonctions publiques – 20 % des emplois ! – pour lutter contre la précarité et stabiliser les effectifs.
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Au sein de Pôle emploi, il existe deux statuts d’agent·e·s : le statut public (environ 4 000 personnes) et le statut privé (environ 50 000). Même si ces personnels exercent le même emploi, des disparités importantes existent en termes de rémunération et de droits.
● Vous Président·e, envisagez-vous une harmonisation statutaire par le haut, pour l’ensemble des personnels ?
Nous sommes alertés de la situation de double statut des agents de Pôle emploi, et particulièrement de celle des agents publics.
Les agents publics de Pôle emploi bénéficieront, comme tous les fonctionnaires et agent·es, de l’augmentation de 10% du point d’indice. Un travail sera également fait sur leurs grilles. Concernant les disparités, nous devrons là aussi être en mesure d’avoir un état des lieux afin d’examiner ce qui dépend de différences statutaires et ce qui peut être harmonisé.
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Les Ordonnances Travail de 2017 (fusion des Instances Représentatives du Personnel dans le seul CSE) et la Loi de Transformation de la Fonction Publique ont fortement diminué les capacités d’intervention des personnels et de leurs représentant·e·s dans la conduite quotidienne de notre établissement, comme dans beaucoup d’entreprises.
● Vous Président·e, comment voyez-vous le dialogue social dans les entreprises ? Envisagez-vous des réformes et si oui, lesquelles ?
La mise en avant du « dialogue social » par le gouvernement n’a été que le prétexte pour légitimer et accroître le pouvoir patronal. En face-à-face, l’employeur a toujours plus de pouvoir que le salarié. Le capitalisme contemporain imite de plus en plus le monde féodal, avec ses suzerains et ses serfs, abandonnant tout espace de dialogue, de négociation et de contestation. C’est le retour de la domination absolue qui provoque toujours des erreurs stratégiques, des investissements erronés et des choix coûteux.
En effet, la nature du comité d’entreprise (CE) a été bouleversée. À l’origine, le CE est une instance chargée du contrôle de la marche générale de l’entreprise, un contrepoids au pouvoir de décision unilatéral de l’employeur·euse. Le gouvernement l’a transformé en un comité social et économique (CSE) qui s’apparente à une courroie de transmission auprès des salarié·es de la vision qu’ont de l’entreprise ses actionnaires. Il a utilisé dans ce but la promotion d’une hypothétique démocratie sociale, dont il a liquidé dans le même mouvement une grande partie des fondements et des moyens.
C’est tout l’inverse qu’il convient de faire en étendant les droits des salarié·es et en abrogeant l’ensemble des réformes du Code du travail mises en œuvre sous les quinquennats Hollande et Macron (loi dite de Sécurisation de l’Emploi, loi Rebsamen, loi Macron, loi El Khomri, ordonnances Macron). La mondialisation et le développement de la financiarisation de l’économie ne justifient pas une réduction des droits au nom de la compétitivité, mais bien au contraire leur extension, afin d’élever l’intelligence collective et la capacité à développer de nouveaux processus de production, tout en protégeant les salarié·es contre les fonds de pension internationaux ou les actionnaires cupides.
La logique de moins disant social prendra fin lorsque nous rétablirons une hiérarchie des normes :
- Abroger les ordonnances Pénicaud et la loi El Khomri, et rétablir le “principe de faveur” : un accord d’entreprise doit être plus favorable qu’un accord de branche, lui-même plus favorable que la loi
- Étendre systématiquement les accords de branches à l’ensemble des salarié·es du secteur
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Pour terminer, toutes les organisations syndicales de Pôle emploi ont appelé les personnels à la grève le 1er février dernier. Ce mouvement social a été très suivi, démontrant ainsi l’attachement des personnels aux revendications portées par l’intersyndicale :
– Une augmentation générale des salaires et traitements de l’ensemble du personnel (de droit public et de droit privé)
– L’amélioration des conditions de travail par le recrutement de personnels en CDI et l’arrêt de l’empilement des plans d’actions
– L’arrêt de la perte de sens du travail par la reconnaissance du métier de chacune et chacun.
Notre direction et nos ministères de tutelle (Travail et Budget) ne répondent pas à ces revendications. Ils n’ont même pas daigné recevoir les organisations syndicales le 1er février…
● Vous Président·e, serez-vous prêt·e à entamer le dialogue avec les organisations syndicales afin de répondre aux revendications des personnels de Pôle emploi ?
Oui.
Nos propositions recoupent celles de l’intersyndicale :
- Une augmentation des effectifs afin de diminuer la charge de travail qui pèse sur les épaules des agent·es en charge de l’accompagnement et de l’indemnisation
- La limitation à 5% des effectifs en CDD telle que le prévoyait initialement le CCN et le passage en CDI de tous les personnels précaires qui le souhaitent
- Une planification des actions à mener afin d’éviter l’empilement des plans à mener, qui engendre aujourd’hui parmi les agent·es de Pôle emploi une perte de sens au travail
- La reconnaissance de l’expertise des agent·es de Pôle emploi par une revalorisation des grilles (pour les agent·es privés et publics) et une augmentation de la valeur du point d’indice et du point de la convention collective
- Des liens plus étroits avec le Médiateur pour développer une activité préventive