France Université & Recherche

Tout au long de la campagne, de nombreuses organisations (associations, syndicats, collectifs, etc) sollicitent Jean-Luc Mélenchon pour qu’il détaille ses propositions sur des enjeux qui les concernent. L’équipe du programme et les groupes thématiques répondent, pour chacune de ces demandes, en développant des points précis de notre programme l’Avenir en commun.

France Université & Recherche adresse aux équipes des candidates et des candidats à l’élection présidentielle une liste de questions qui intéressent l’ensemble de la société et qui permettent de mesurer la place de la recherche, de l’enseignement et de l’Université dans leur vision de notre avenir collectif

Santé

  1. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre en matière de recherche, de prévention, de politique vaccinale et de reconstitution d’un arsenal sanitaire large pour protéger la santé publique ? 

La vaccination est un outil important dans l’ensemble du dispositif sanitaire. Dans le cas du COVID, il permet de limiter les risques de formes graves. Nous proposons donc de produire et de diffuser massivement les vaccins et les traitements en les passant sous licence d’office. Nous proposons la création d’un pôle public du médicament pour : (i) assurer une relocalisation de la production de médicaments, (ii) garantir l’approvisionnement d’une réserve stratégique, (iii) assurer le contrôle des prix sur l’ensemble des produits de santé et communiquer sur leurs coûts réels.

Enfin le travail de conviction sur les vaccins ou les autres moyens de la politique sanitaire passe par le retour de la confiance des citoyens vis-à-vis de la production scientifique. Le statut de fonctionnaire est un un des gages de l’indépendance des agents : c’est la raison pour laquelle le plan d’emploi que nous prévoyons pour l’enseignement supérieur et la recherche est de 30 000 emplois de fonctionnaires, en plus de la titularisation de tous les contractuels exerçant actuellement des fonctions pérennes. Un autre gage d’indépendance est que les équipes de recherche bénéficient de crédits récurrents suffisants pour leurs recherches. Aucun colloque de la recherche médicale ou aucune société savante ne doit plus être subventionné par les laboratoires pharmaceutiques. 

  1. La question du maillage sanitaire du territoire est cruciale pour une politique de prévention médicale efficace. Quels moyens humains ce maillage implique-t-il ? Que pensez-vous de la création d’éventuels corps publics d’arpenteurs médicaux, d’infirmiers et de médecins généralistes de proximité ? 

D’abord, il faut augmenter les moyens des facultés de médecine pour permettre une véritable suppression du numerus clausus. Ensuite, il faut en finir avec les suppressions de lits, de maternités et d’hôpitaux de proximité qui ont été la règle durant les derniers quinquennats, y compris pendant la pandémie. 

Nous réouvrirons des services d’urgences, de maternités et des EHPAD publics assurant un service de santé public de proximité à moins de trente minutes de chaque Français.

Pour favoriser l’installation des professionnels de santé, médicaux ou paramédicaux, il faut avant tout améliorer leurs conditions d’exercice. Il faut partir de ce qui fonctionne : les structures d’exercice regroupé et coordonné, pluri-professionnelles et la médecine salariée sont aujourd’hui plébiscités. Nous proposons donc de mailler le territoire de centres de santé pluri-professionnels, avec des professionnels salariés. 

En parallèle, nous créerons massivement des postes d’infirmier de pratique avancée. Nous confierons et pérenniserons des missions de santé publique à l’ensemble des professionnels de santé (pharmaciens, kinésithérapeutes, sage-femme, etc.), tout en favorisant leur coordination et le travail en équipe. Ceci permettra de constituer de véritables équipes de santé de proximité agissant de concert pour notre bien commun : notre santé à tous.

Les étudiants en santé restent le plus souvent à proximité des lieux de leurs formations puisqu’ils s’y épanouissent. Nous mettrons donc les moyens pour développer de nouvelles antennes universitaires, notamment dans les territoires les plus touchés par la désertification. 

Il faut aussi agir pour que les professionnels de santé restent. De ce point de vue, le maillage du territoire en services publics est essentiel. Nous voulons que chaque Français ait accès aux services publics essentiels (école, gare, maternité, urgences, bureau de poste, crèche…) à moins de 15 à 30 minutes de chez lui. 

Enfin, il faut associer les professionnels de santé : nous organiserons des assises participatives de la médecine de proximité dans chaque département avec les acteurs concernés (professionnels de santé, usagers de santé, institutions, élu.es etc..) pour que les projets soient élaborés ensemble. 

  1. La pandémie a montré la nécessité d’un maillage sanitaire pérenne doublé de capacités hospitalières accrues et d’une meilleure formation continue des personnels de la santé et du soin à l’évolution des connaissances scientifiques. Quelles sont les implications de ce constat pour la réorganisation du système hospitalier et hospitalo-universitaire ?

Notre système de santé a longtemps été le meilleur au monde. Mais l’austérité et la marchandisation le disloquent. Il n’est plus en mesure de faire face à la multiplication des maladies chroniques et aux épidémies. Nous devons déployer une politique de soins, de prévention et de santé publique capable de prévenir, de soigner tout le monde et d’en respecter les acteurs. 

Nous proposons de ré-ouvrir des services d’urgences, de maternités et des EHPAD publics assurant un service de santé public de proximité à moins de trente minutes de chaque Français. Nous reviendrons sur les suppressions de lits et de personnels. Nous engagerons un plan pluriannuel de recrutement des professionnels du soin et du médico-social (médecins, infirmiers, aides-soignants et personnels administratifs), revaloriserons les métiers et les revenus et augmenterons les capacités d’accueil des établissements de santé publics, notamment les hôpitaux. Nous supprimerons la tarification à l’acte, pour revenir à une dotation globale de fonctionnement. 

Pour aller plus loin, le livret Santé, “Soigner notre système de santé pour notre bien commun” : https://melenchon2022.fr/livrets-thematiques/sante/

  1. La pandémie de SARS-CoV-2, virus qui se transmet par voie d’aérosols, a rappelé que la qualité de l’air est un enjeu sanitaire majeur des décennies à venir. Quelles mesures comptez-vous prendre et quels investissements consentir pour en faire un bien commun ?

La qualité de l’air est un indicateur central pour toute politique écologique qui est en outre dépendant de notre capacité à réussir la transition énergétique, notamment dans les zones les plus urbanisées. 

Nous voulons investir massivement, de façon planifiée et coordonnée, dans le développement des transports du quotidien pour offrir au maximum de citoyens une opportunité réelle de se passer de la voiture individuelle. Les mobilités actives (marche, vélo, etc.) seront développées et intégrées dans cette politique. Par exemple, nous rendrons obligatoire l’aménagement et la gestion publique de stationnements vélos à proximité des gares et stations de métro ou des lieux recevant du public (services publics, établissements scolaires, bureaux, commerces, marchés), ainsi que dans toutes les constructions et rénovations d’immeubles en ville et sur les lieux de travail. 

Nous aiderons les collectivités à aménager des parking-relais aux entrées de ville et à aménager les routes départementales, afin de les rendre plus sûres pour les cyclistes. Nous accompagnerons l’apprentissage du vélo dès l’école primaire en lien avec les associations et nous mettrons en place une politique nationale en faveur du vélo et du vélo à assistance électrique en reconstruisant une filière de fabrication de vélos en France. 

En dehors des villes, nous organiserons avec les collectivités locales la densification du réseau public d’autocars, afin de permettre à chaque habitant·e de pouvoir rejoindre facilement et rapidement une gare ferroviaire proche de chez lui ou elle. Nous reviendrons également sur les affaiblissements des normes environnementales et sur les récents décrets permettant aux préfets d’autoriser des projets polluants dérogeant aux normes environnementales.

Nous prévoyons également de rendre gratuits les transports en commun urbains dans les villes et les TER et cars régionaux pour les moins de 25 ans, les privé·es d’emploi et les usager·es disposant de faibles revenus. Cette gratuité pour les jeunes sera complétée par un système de billet unique permettant aux usagers d’emprunter les transports en commun de la ville d’arrivée avec un billet SNCF grandes lignes. Nous rendrons également obligatoire le forfait mobilité durable versé aux salarié·es – notamment pour le vélo avec la possibilité de le coupler avec les abonnements de trains, simplifier et adapter au télétravail ses modalités de versement. 

Au-delà de cette politique visant à encourager et rendre possible un usage plus large du vélo et/ou du train, nous prendrons un moratoire immédiat sur toute nouvelle infrastructure routière ou aéroportuaire pour permettre un état des lieux des alternatives et de l’intérêt écologique ou non des projets considérés. Pour le transport de marchandises, la priorité sera donnée au fret ferroviaire et fluvial.

L’agriculture est une source majeure de pollution atmosphérique, en raison des émissions de méthane et de protoxyde d’azote (qui engendrent de l’ozone et des particules fines). L’élevage intensif, la spécialisation des territoires (avec des concentrations excessives d’élevage dans certain territoires), et l’usage excessif d’engrais chimiques ou organiques et de pesticides en sont les principales causes. Nous lutterons contre la pollution atmosphérique due à l’agriculture en fermant les fermes-usines et en sortant de l’élevage intensif d’ici à 2027 au plus tard, en finançant la transition de l’ensemble de l’agriculture vers l’agroécologie (avec notamment une réduction d’au moins 50 % de l’utilisation des engrais et des pesticides chimiques d’ici à 2030, et une conversion de l’ensemble de l’agriculture à l’agriculture biologique d’ici à 2050 au plus tard), en réduisant le cheptel et les densités et en réduisant la consommation moyenne de protéines animales de 50 %.

Pour réduire la pollution de l’air, il faut également sortir des énergies fossiles, ce que la France insoumise défend. Nous proposons la sortie du nucléaire et nous souhaitons atteindre le 100%, dont les scenarii Négawatt et M0 de RTE montrent la faisabilité. Cela passe par le développement massif d’abord de l’éolien marin et du photovoltaïque, mais aussi de l’hydroélectricité, de la géothermie, ou encore de carburants alternatifs comme l’hydrogène vert. Se tourner vers 100% d’énergies renouvelables est un levier crucial pour lutter contre la pollution de l’air, en limitant les émissions de gaz à effet de serre. Ce mix énergétique aura un impact positif sur toute la société, et contribuera à la réduction d’émissions de gaz à effet de serre dans d’autres secteurs, par exemple dans le secteur de l’industrie. 

Par ailleurs, nous lutterons contre la surproduction de déchets, dont l’incinération génère de nombreuses pollutions de l’air. Nous défendrons l’idée que le meilleur déchet est bien-sûr celui que nous ne produisons pas. Nous interdirons immédiatement les plastiques à usage unique (hormis pour usage médical) et nous généraliserons la consigne qui sera standardisée. De plus, nous rendrons obligatoire le recyclage, le compostage ou l’incinération, dans cet ordre de priorité. Afin de rallonger la durée de vie des objets et de lutter contre la surproduction (qui génère des émissions de gaz à effet de serre), nous allongerons les durées de garantie légale des produits, abolirons l’obsolescence programmée et créerons un service de la réparation et du réemploi. 

Par ailleurs, nous lancerons un vaste plan de rénovation thermique globale des bâtiments. afin de lutter contre la précarité énergétique et de réduire nos émissions de gaz à effet de serre. L’isolation d’au moins 700 000 logements par an sera réalisée, et les Nous commencerons en priorité avec les 4,8 millions de passoires énergétiques et par les logements équipés de chauffage au fioul ou gaz. Pour atteindre cet objectif, un ensemble de mesures réglementaires et de dépenses importantes sont prévues. Sur le plan réglementaire, nous instaurerons une obligation de rénovation complète en bâtiments basse consommation (BBC) pour tous les logements antérieurs à 2000 d’ici 2050 et une sortie du fioul/gaz, ainsi que le conditionnement de labels écologiques à des résultats énergétiques concrets et vérifiés. Cela permettra de réduire la pollution de l’air. 

De plus, il est urgent de faire bifurquer le secteur du bâtiment, notamment en réduisant l’impact écologique des constructions et des travaux. Nous proposons pour cela de développer l’éco-construction avec des matériaux bioclimatiques (bois/terre/paille). Les matériaux biosourcés et géosourcés constituent des alternatives crédibles aux matériaux actuellement utilisés qui ont recours aux énergies fossiles et aux matériaux polluants. A lui seul, le ciment représente plus de 6% de toutes les émissions de gaz à effet de serre causées par les activités humaines à l’échelle internationale. 

  1. Certaines activités humaines, l’élevage intensif en particulier, favorisent l’émergence d’épidémies à une fréquence croissante. Quelles mesures comptez-vous prendre pour les réguler ? Comment suivre les zoonoses et leurs implications sur la santé humaine ?

Notre objectif est de remplacer le modèle de l’agriculture intensive basé sur des fermes usines par un modèle d’agriculture paysanne écologique plus respectueuse du bien-être animal. Pour atteindre cet objectif, il sera nécessaire de créer 300 000 emplois agricoles, ce qui implique une politique de formation sur le long-terme, ainsi qu’une revalorisation du travail des agriculteurs pour endiguer la crise des vocations dans ce secteur vital pour la société française.

La concentration des animaux dans les élevages intensifs, et la destruction des habitats naturels (déforestation…) pour produire l’alimentation nécessaire à ces élevages intensifs sont deux facteurs majeurs d’émergence des zoonoses ou d’autres d’autres épidémies qui nous frappent actuellement comme la grippe aviaire. Prévenir une ère de pandémies permanentes impose de transformer nos systèmes alimentaires. D’après l’IPBES, la prévention coûterait 100 fois moins cher que d’affronter ces pandémies.

C’est ce que nous ferons en sortant de l’élevage intensif d’ici à 2027 au plus tard. Nous interdirons les fermes-usines, en commençant par interdire immédiatement l’installation, l’agrandissement ou la réunion d’exploitations agricoles d’élevage dont les productions sont supérieures aux seuils correspondant aux catégorie A et E de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Nous redéfinirons des normes d’élevage compatibles avec la protection des animaux et le respect des limites planétaires : accès à l’air libre obligatoire, pâturage, densité, surface minimale, réduction des cheptels, fin des souches à croissance rapide, objectif d’autonomie alimentaire des élevages, interdiction de l’élevage en cages à horizon 2025… Nous  romprons les accords commerciaux participant à l’augmentation de la déforestation importée », imposerons un devoir de vigilance pour interdire aux entreprises opérant en territoire français d’être liées à des processus de déforestation ou d’autres destructions d’habitats naturels à travers le monde et nous appliquerons nos normes de production (interdiction du glyphosate, des OGMs…) aux produits importés, ce qui aura également pour effet réduire la pression sur les écosystèmes mondiaux.

Ces objectifs ne vont pas sans réduction de la consommation de protéines animales : nous fixons un objectif de réduction de la consommation moyenne de protéines animales de 50 %. Une option végétarienne quotidienne sera proposée dans la restauration collective ainsi qu’un menu végétarien hebdomadaire pour tous les usagers.

Nous accompagnerons financièrement les éleveurs dans cette transition (réforme de la PAC, budget réservé en loi de finance, création d’une caisse de défaisance pour reprendre la dette agricole de celles et ceux qui s’engagent, au travers d’un contrat de transition, à passer au 100 % bio, fixation de prix plancher payés aux agriculteurs – nécessairement supérieurs aux coûts de production -…). 

  1. Une analyse systématique de la toxicité des produits chimiques a été lancée en 2007 au niveau européen (le programme REACH). Comment comptez-vous la relancer au niveau national ?

Face aux produits chimiques dangereux, il nous faudra agir vite et de manière conséquente. Au moins 2,7 millions de salariés sont exposés à au moins un produit chimique cancérogène. Nous intégrerons tous les cancérogènes reconnus par le Centre international de recherche sur le cancer dans les facteurs de maladie professionnelle et nous assurerons du suivi individuel et territorial des cancers professionnels et environnementaux. Nous prendrons en compte la multi-exposition et les risques émergents : nanomatériaux, perturbateurs endocriniens, amiante, etc.

Dans l’agriculture, nous interdirons immédiatement les pesticides les plus dangereux pour la santé humaine et pour l’environnement, notamment les néonicotinoïdes, le glyphosate et les fongicides SDHI (qui empêchent le développement des champignons, dont plusieurs études tendent à démontrer la toxicité). Nous planifierons la réduction progressive des doses d’engrais et de pesticides chimiques de synthèse et leur taxation croissante au cours du temps via la redevance sur les pollutions diffuses et sur l’utilisation des intrants, avec l’objectif d’atteindre une réduction de l’utilisation des engrais et des pesticides chimiques de synthèse de 50% d’ici 2030.

Climat et environnement

  1. L’insuffisance des mesures décidées lors de la COP26 à Glasgow (novembre 2021) tend à montrer que le format COP ne permet pas l’adoption de mesures à la hauteur des enjeux climatiques. Quelles initiatives nationales et internationales entendez-vous prendre précisément pour limiter les causes et conséquences du changement climatique ?

Nous envisageons un arsenal très large de mesures nationales et locales, ainsi qu’une offensive internationale pour porter ces actions à tous les niveaux.

Vous trouverez l’ensemble de ces mesures dans  le livret thématique “La planification écologique – la Règle verte pour rompre avec le productivisme”, et le Plan “Mettre en oeuvre la Règle verte par la planification écologique” aux liens suivants :

Certaines causes de l’érosion de la biodiversité terrestre et aquatique, l’effet des néonicotinoïdes par exemple, font l’objet de consensus scientifiques. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour protéger cette biodiversité ?

Nous proposons d’interdire immédiatement les pesticides les plus dangereux pour la santé humaine et pour l’environnement, notamment les néonicotinoïdes, le glyphosate et les fongicides SDHI (qui empêchent le développement des champignons, dont plusieurs études tendent à démontrer la toxicité). 

Nous planifierons aussi la réduction progressive des doses d’engrais et de pesticides chimiques de synthèse et leur taxation croissante au cours du temps via la redevance sur les pollutions diffuses et sur l’utilisation des intrants. Ces deux mesures visent à atteindre une réduction de l’utilisation des engrais et des pesticides chimiques de synthèse de 50% d’ici 2030, ce qui limitera la perte de la biodiversité en insectes notamment. Enfin, nous triplerons le financement des mesures agro-environnementales et climatiques et renforcerons le financement des infrastructures agro-écologiques (haies, mares, bois, bandes fleuries…) favorables à la biodiversité

  1. Des bouleversements considérables du climat et de la biodiversité sont maintenant inéluctables. Quelles politiques d’adaptation comptez-vous mettre en place sur le territoire national ? Quelles sont, selon vous, les responsabilités de la France envers les pays et les territoires qui en feront les frais les premiers ? Comment anticipez-vous ces évolutions pour empêcher qu’elles ne mettent en péril la paix, la liberté politique et la cohésion des sociétés en France et dans le monde ?

Il s’agit de questions aussi larges qu’importantes, difficiles à résumer en quelques lignes.

Des éléments de réponse figurent dans les livrets sur la planification écologique plus haut, et également dans le livret “Paix, pour une France indépendante, souveraine et non-alignée” qui se concentre sur une diplomatie indépendante et altermondialiste ; mais aussi le livret “Migrations: pour une politique migratoire humaniste et réaliste” ; ainsi que dans une certaine mesure le livret “Les Outre-mer à l’avant-garde de la bifurcation écologique et du progrès social” :

Climat et énergie

  1. Que proposez-vous face aux défis majeurs de la filière nucléaire : engorgement des déchets, fragilité financière et commerciale, problèmes répétés sur la conception et la réalisation des futurs réacteurs, perte de savoir-faire technique lié à la désindustrialisation et à la sous-traitance, transparence de l’information, inquiétude du public sur les risques d’accident et insuffisance des assurances ?

Le nucléaire est une impasse : minerai importé, fragilité technologique, risques d’accident, problème des déchets… Cette source d’énergie doit donc être abandonnée. Il sera mis un terme aux projets d’EPR et au projet CIGEO d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure. Pour autant, le parc nucléaire ne pourra fermer du jour au lendemain. Celui-ci doit être exploité dans des conditions optimales de sécurité jusqu’à la fermeture des centrales après 40 ans, ce qui implique notamment la limitation stricte du recours à la sous-traitance pour les activités ne pouvant être ré-internalisées. L’ensemble des travailleur·ses de la filière – y compris les sous-traitant·es – seront assuré·es de conserver leur emploi, avec un statut équivalent à celui des employé·es d’EDF, dans l’objectif d’assurer un haut niveau de compétence dans le démantèlement des centrales. Les ressources des communes qui en dépendent seront également maintenues. La recherche fondamentale au CEA notamment devra pouvoir se poursuivre en toute indépendance des lobbys pro-nucléaires. A cette fin nous mettrons en débat le changement de statut du CEA d’EPIC en EPST. Enfin, pour permettre un débat public éclairé, les données sur l’enfouissement des déchets nucléaires depuis soixante ans seront rendues publiques afin d’informer sur les dangers sanitaires avérés ou éventuels.

  1. Quel objectif de consommation énergétique (en GW, en moyenne sur un an) fixez-vous pour la France à l’horizon 2040 ? Quel mix énergétique proposez-vous pour aboutir à la production rendue nécessaire par ce niveau de consommation ? Quelles dispositions précises entendez-vous prendre pour passer du mix actuel à cet objectif ?

Dans le secteur de l’énergie, la sortie des énergies fossiles et du nucléaire sera rendue possible à horizon 2050 par les 3 leviers, détaillés par les scénarios négaWatt et M0 de RTE : sobriété, efficacité et développement des énergies renouvelables. Nous fixons comme objectif de diviser par trois la consommation d’énergie primaire (ressources brutes) d’ici 2050, et ceci sans altérer la qualité de vie. Cela revient à une consommation de 857 TWh en 2040.

  1. Le transport routier représente une part importante de l’empreinte carbone française. Quel projet urbanistique entendez-vous mettre en œuvre pour décarboner les transports individuels et de marchandises ?

L’augmentation des distances entre le travail et le lieu de vie est un problème majeur lié notamment à un coût du logement trop élevé. Ces dix dernières années, les loyers ont augmenté de 29 % dans le parc HLM et de 44 % dans le secteur locatif privé. Les prix doivent donc être directement et partout encadrés. Par ailleurs, nous proposons de produire un million de logements réellement sociaux au rythme de 200 000 logements publics par an répondant aux critères écologiques, en augmentant notamment le mécanisme d’« aide à la pierre ». Ces deux mesures devraient limiter la spéculation immobilière actuelle et rendre possible le rapprochement des lieux de vie et des lieux de travail. 

Dans les transports, plutôt que le remplacement du parc de voitures individuelles par l’équivalent électrique qui va augmenter considérablement la demande en énergie, le développement des transports collectifs électriques et des modes de déplacement actifs (vélo et marche) sera privilégié. Nous proposons donc un report important des transports individuels vers des transports collectifs (avec des investissements massifs), la diminution des distances parcourues, le développement du covoiturage/autopartage, la baisse de la vitesse et le basculement vers les véhicules électriques (67 %), les hybrides gaz naturel (30 %) et à hydrogène (3 %) en 2050. 

  1. Quelle politique de rénovation du bâtiment pour promouvoir isolation, qualité de l’air, qualité de l’eau et qualité de vie entendez-vous mettre en œuvre ?

La mauvaise qualité des logements plonge des millions de personnes en situation de précarité énergétique. Un véritable plan doit être mis en place pour obtenir des résultats d’ampleur. Pour cela, nous proposons de :

  1. Mettre en œuvre un plan de financement massif des projets de rénovation écologique de l’habitat et des bâtiments publics dans l’ensemble du parc neuf et ancien en privilégiant la qualité et les économies d’énergie. 
  2. Rendre obligatoire la rénovation globale de l’ensemble du parc de logements avant 2050, comme le demandait la Convention citoyenne pour le climat, et pour le parc social avant 2035
  3. Conditionner l’obtention de labels écologiques et thermiques à des résultats énergétiques concrets et vérifiés pour les habitant·es, que ce soit dans le neuf ou la réhabilitation des logements
  4. Redynamiser les secteurs de la construction et de l’architecture, former l’ensemble des professionnel·les à l’éco-construction et protéger les travailleur·ses du bâtiment
  5. Réformer l’ANRU pour qu’elle soit financée par l’État et que les projets de renouvellement urbain promeuvent les réhabilitations écologiques en y associant les habitant·es plutôt que les démolitions. 
  6. Réformer le financement de la rénovation pour permettre aux propriétaires les plus modestes d’en bénéficier et favoriser des programmes de travaux complets. 
  7. Promouvoir une action spécifique envers les copropriétés dégradées, coordonnée par l’ANAH et avec l’intervention des bailleurs sociaux, en prévoyant notamment des rachats publics pour les propriétaires en difficulté
  8. Mettre en place un « guichet unique » public pour organiser la rénovation par les propriétaires individuel·les. Il regroupera les demandes de financement, permettra l’évaluation des besoins et la coordination des professionnel·les
  9. Interdire réellement la location des passoires thermiques et renforcer les programmes de détection des passoires énergétiques
  1. Pour 2 euros investis dans les énergies fossiles, 1 euro est investi aujourd’hui dans le renouvelable. Comptez-vous modifier ce rapport et, si oui, comment ? Quelle politique fiscale entendez-vous mettre en place sur les produits financiers qui persistent à financer les énergies fossiles ?

Des scénarios montrent qu’une production de 100 % d’énergies renouvelables à l’horizon 2050 est possible. C’est le cas du scénario négaWatt 2022 pour l’ensemble du secteur énergétique, incluant le remplacement des énergies fossiles actuellement utilisées dans différents secteurs par des énergies renouvelables. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) propose également un mix 100 % renouvelable pour le secteur électrique à horizon 2050. C’est également le cas de l’un des scénarios évalués par RTE.

Ces stratégies menant à une véritable bifurcation énergétique peuvent être déployées rapidement, dès lors qu’elles sont portées par une détermination politique. 

L’Avenir en commun affirme sa volonté de réaliser la nécessaire et urgente bifurcation énergétique et de s’en donner pleinement les moyens :

  • En faisant de l’énergie un bien commun et en remettant ce secteur essentiel au service de l’intérêt général
  • En garantissant le débat démocratique sur les choix énergétiques, en particulier par la création d’un pôle public de l’énergie basé sur la renationalisation des compagnies énergétiques (EDF, Engie) en lien avec des coopératives locales de production et de consommation d’énergies renouvelables
  • En planifiant la bifurcation énergétique donnant la priorité aux mesures de réduction de la consommation d’énergie et de sobriété énergétique – remettant en cause notre modèle productiviste – et à l’efficacité énergétique dans la production, les transports, le résidentiel-tertiaire
  • En s’orientant vers un mix énergétique 100 % renouvelable à l’horizon 2050, en particulier pour le secteur électrique, par l’investissement dans les énergies renouvelables, y compris marines
  • En rendant effectif le droit à l’énergie par le blocage des prix et l’accès gratuit aux usages de première nécessité

Parmi nos propositions : 

  • Arrêter les subventions aux énergies fossiles, y compris à l’étranger
  • Supprimer les niches fiscales polluantes incitant à la consommation d’énergie fossiles
  • Dépolluer les flux financiers, aujourd’hui largement tournés vers les investissements en direction des fossiles
  • Abandonner progressivement les énergies fossiles (charbon, gaz et surtout pétrole) avec la diminution de la consommation d’énergie et la montée en puissance des énergies renouvelables. Ceci concerne en priorité le chauffage, le transport routier et l’industrie
  • Ne prolonger aucun réacteur nucléaire au-delà de 50 ans, ceci tenant compte du non-recours à des centrales fossiles, de la sécurité, mais aussi des enjeux industriels et sociaux, comme les reconversions
  • Plus que doubler l’éolien, qui pourra compter en 2050 sur environ 18 500 éoliennes et 3000 en mer
  • Accroître le photovoltaïque (144 gigawatt installés, contre une dizaine aujourd’hui) en toitures, ombrières, sans aucune installation sur terres agricoles ou espaces sauvegardés
  • Encourager les bioénergies (biomasse et biogaz) : faire augmenter la production de bois énergie de 50%, sans sylvicultures dédiées, et avoir recours au biogaz (méthanisation), sans consacrer de terres à la seule production d’énergies, conformément au scénario Afterres

École

  1. Depuis deux décennies, l’Éducation Nationale endure réforme sur réforme. Allez-vous procéder à un bilan des réformes successives (formation des enseignants, concours, programmes des lycées, autorité fonctionnelle des directeurs d’école, etc.) ?

Sur les réformes mentionnées certaines n’ont pas encore eu le temps d’être appliquées (autorité fonctionnelle des directeurs d’écoles ou celles des exécutifs des collectivités sur les adjoints-gestionnaires) par conséquent une évaluation paraît impossible. Mais nous les abrogerons, car elles sont contraires à nos principes politiques.

D’autres ont déjà été évaluées du moins partiellement (par exemple réformes des lycées ou celle des concours). Même si d’autres évaluations peuvent être nécessaires, les éléments dont nous disposons indiquent des problèmes consubstantiels à ces réformes. C’est pour cela que nous reviendrons dessus.

  1. Les concours de recrutement des enseignants font aujourd’hui face à une crise des vocations considérable. Quelles sont vos propositions pour la formation initiale et le recrutement ? Pourriez-vous mettre en œuvre un pré-recrutement des enseignants dès le premier cycle universitaire pour résorber la crise des vocations et garantir une meilleure formation initiale ? 

Nous mettrons en œuvre un plan de pré-recrutement ouvert dès l’année de terminale et en licence, afin de favoriser l’accès des jeunes de tous les milieux sociaux aux métiers de l’Education nationale. La garantie d’autonomie de 1063 euros par mois pour tous les jeunes détachés du foyer fiscal de leur parent, dont les étudiants, sera de nature à faciliter l’accès au métier d’enseignant aux classes populaires.  

Le CAPES, CRPE et l’ensemble des concours enseignant·es seront ouverts au titulaire d’une licence à la date des épreuves d’admission (régime commun des concours catégorie A). Les lauréats du concours suivront, sous un statut d’élève-fonctionnaire 2 ans de formations sanctionnées par un diplôme de Master (ce qui se pratique pour les corps d’ingénieur de l’État, à l’issue de leur formation ils obtiennent un diplôme d’ingénieur). 

Nous adopterons un plan pluriannuel ambitieux de recrutement sur concours de 160 000 enseignant·es, avec 60 000 immédiatement, pour atteindre une moyenne de 19 élèves par classe. Nous ouvrirons des formations rémunérées de préparation aux concours afin de faciliter les reconversions professionnelles dans les métiers de l’Éducation nationale et reconnaître l’expérience professionnelle des salarié·es en reconversion en améliorant le système de reconstitution de carrière.

  1. Avec les modalités de la formation initiale, l’écrasement des carrières est l’autre grand facteur explicatif de la crise des vocations enseignantes. Quelles sont vos propositions pour l’affectation, la rémunération et la formation continue dans les métiers de l’enseignement ?

Le point d’indice sera revalorisé de 10 %, afin de compenser la perte de pouvoir d’achat de ces 20 dernières années. Par ailleurs des négociations seront ouvertes avec les syndicats pour une renégociation des grilles salariales. Cela conduira une augmentation en moyenne de 30 % de la rémunération des enseignants.

Concernant les affectations, des discussions pourront être menées avec les syndicats. Cependant un compromis entre le droit des agents et le principe d’égalité des usagers devant le service public devra être trouvé. Par conséquent nous maintiendrons le caractère national des concours et refusons tout recrutement des personnels par les directions d’établissements sur la base de “projet d’établissement”.

  1. Les politiques gouvernementales de ces dernières décennies ont fait le choix de favoriser et de développer l’enseignement privé, par toutes sortes de moyens (financement public des établissements privés, réforme à petit bruit des concours du privé, déstabilisation permanente du secteur public, etc.). Entendez-vous abroger ces dispositions et refaire de l’enseignement public le cadre de référence des politiques éducatives ?

Oui, l’enseignement public doit être le cadre de référence des politiques publiques. La loi Falloux de 1850 établissant “une liberté d’enseignement” et ouvrant la voie au maintien du privé, cette disposition a cependant valeur constitutionnelle et ne peut pas être remise en cause dans le cadre de la Vème République. 

Nous reviendrons sur un certain nombre de privilèges accordés, notamment en abrogeant la loi Carle obligeant les communes aux financements d’écoles privées se situant hors de celles-ci si des enfants résidant dans la commune y sont inscrit·es. Par ailleurs, les subventions extra-légales des collectivités territoriales à l’enseignement privé seront interdites. 

Les établissements publics relevant de ce cadre national seront laïques et seuls autorisés à remettre des diplômes reconnus pour les concours de la fonction publique et les conventions collectives. Nous interdirons le caractère lucratif des écoles privées de l’enseignement supérieur (actionnariat, cotation en bourse).

Nous modulerons le financement des établissements privés en fonction de leur respect de la carte scolaire.

  1. Quelle politique envisagez-vous de mener pour l’enseignement de la logique, des modalités de raisonnement, de l’expérimentation et de la confrontation des sources spécialisées sur une question donnée ?

Cela relève de la liberté pédagogique des enseignant·es et de l’instance qui dans notre programme sera chargée de l’élaboration des programmes.

Aménagement du territoire

  1. Les mutations écologiques en cours imposent de relocaliser la production de biens de consommation et de favoriser leur distribution en circuits courts. Quelle politique industrielle entendez-vous mettre en place à cette fin ?

Nous créerons une Agence pour la relocalisation, rattachée au Conseil à la planification écologique. Elle sera chargée de recenser les secteurs industriels indispensables à la souveraineté nationale et à la bifurcation écologique et d’établir un plan de relocalisation et de reconquête industrielle pour chaque filière ou production stratégique identifiée. 

Pour pouvoir relocaliser la production, nous proposons de mettre en œuvre un protectionnisme solidaire. Le protectionnisme social et écologique que nous mettrons en œuvre permettra de passer d’une logique de libre-échange à un protectionnisme solidaire respectueux de l’Accord de Paris, des conventions de l’Organisation internationale du travail et du droit international. Nous refuserons tout nouvel accord qui ne respecterait pas ces principes. Nous mettrons en place des droits de douane sociaux et écologiques pour protéger notre industrie, les travailleurs et l’environnement du dumping international.

  1. Les politiques récentes d’aménagement du territoire ont paru inspirées par une opposition entre des métropoles « créatives / innovantes » et un arrière-pays aux fonctions floues, et où la place de la production industrielle n’est que rarement définie. Quelle politique d’aménagement du territoire comptez-vous mettre en place pour résoudre les problèmes engendrés par cette division territoriale du travail ?

Nous reviendrons sur ces politiques en remettant partout où c’est possible des services publics. Pour la santé par exemple, nous proposons de mailler le territoire de centres de santé pluri-professionnels et de rouvrir graduellement des services d’urgences et maternités de proximité afin d’assurer un service de santé public à moins de 30 minutes de chaque Français·e. 

Une priorité sera donnée à la construction d’équipements (infrastructures de transports, bâtiments)  et à l’installation de services publics dans les zones qui les ont vu disparaître. Par ailleurs nous reviendrons sur les différentes réformes territoriales. L’organisation territoriale s’appuiera sur le tryptique commune-département-région, avec un renforcement des pouvoirs des communes, la suppression du statut des métropoles et la fin des coopérations forcées. De plus, le rôle et le pouvoir des départements seront renforcés.

  1. L’Université joue un rôle fondamental dans le dynamisme des territoires et dans la garantie de la cohésion sociale et géographique du pays. De nombreuses régions profiteraient de nouveaux établissements d’enseignement supérieur, à taille humaine, proposant des formations exigeantes, et dotés d’importantes cités universitaires ouvertes sur la ville. Vous engagez-vous à ouvrir de telles universités expérimentales à travers le pays et combien ?

La notion de “taille humaine” est difficile à appréhender. De même, le modèle proposant de créer ex nihilo des villes universitaires qui seraient l’équivalent d’Heidelberg par exemple laisse dubitative. Par ailleurs, s’il peut exister du bâti de l’Etat, il n’est pas évident qu’ils correspondent à des besoins d’enseignement ou de recherches.

Nous pensons qu’il est préférable d’investir massivement dans des établissements existants par l’installation de certaines filières notamment d’études médicales dans les villes qui n’en sont pas pourvues. Nous lancerons un grand plan pour l’immobilier universitaire, de construction et de rénovation de laboratoires, de lieux d’enseignement et de vie sociale, citoyenne et étudiante. Nous développerons ainsi le caractère pluridisciplinaire des universités et leur maillage territorial, via les réseaux de transports en commun et le renforcement des antennes universitaires, qui existent dans de très nombreuses villes moyennes. Des petites structures universitaires de proximité offrent un bon encadrement au premier cycle, mais aussi la continuité d’un cadre de vie offre de bon résultats,  d’autant plus lorsque la poursuite d’études en master dans l’université-mère est assurée.

Néanmoins, la création de nouvelles universités est une des pistes possibles dans certains cas et il faudra donc l’examiner. Nous étudierons pour chaque territoire les besoins exprimés par les acteurs locaux ainsi que les opportunités que nos différents territoires peuvent offrir en matière de recherche (géographie, pôles de recherche existants, etc.). 

Suivant une logique similaire, nous voulons faire des Outre-mer de véritables pôles régionaux de développement, par le transfert de technologies auprès des pays voisins et l’aide logistique et scientifique, et grâce à des établissements de formations de haut niveau bénéficiant à la fois aux étudiant·es des Outre-mer et à celles et ceux des pays voisins. 

Enfin, si l’université et la recherche ont un rôle central à jouer dans le dynamisme des territoires nationaux, elles sont également un vecteur majeur d’ouverture sur d’autres territoires, au-delà de nos frontières. Ainsi, nous proposerons une alliance universitaire de la Méditerranée, qui permettra des échanges d’étudiant·es, d’enseignant·es et de chercheurs et chercheuses des deux rives. La création d’universités internationales thématiques, comme la mer et l’espace, sera proposée à nos partenaires. Nous engagerons plus largement des formes de coopération internationale tournées vers un partage des savoirs solidaires avec les États et universités qui le souhaitent. L’université et la recherche francophones seront encouragées, par la création d’un Erasmus francophone, l’élaboration de contenus éducatifs et de diplômes communs entre pays francophones.

  1. À l’Université, la garantie de la continuité territoriale et l’assurance d’une forme de diversité intellectuelle dans les disciplines émergentes ou à petits effectifs nécessitent de retirer la politique de recrutement des enseignants-chercheurs aux établissements, pour la confier à des instances nationales pluralistes et transparentes. Quel dispositif de recrutement national entendez-vous défendre ? Comment garantir ensuite une affectation des recrutés en phase avec leurs projets scientifiques et avec les besoins locaux ?

Nous ouvrirons un débat avec toute la communauté concernée sur les modalités de recrutement et la possibilité d’un recrutement national par le CNU, qui passerait par un concours avec une phase d’admissibilité sur dossier et des auditions nationales pour l’admission, prenant en compte les besoins des universités en termes de profil.

  1. Dans quelle mesure pensez-vous que les inégalités territoriales devant l’enseignement, la culture et la langue soient liées à un manque de bibliothèques et médiathèques ouvertes sur la ville et qui proposeraient des programmes de médiation culturelle ? Quelle articulation proposez-vous entre les bibliothèques scolaires, universitaires et municipales ?

Les bibliothèques scolaires, municipales et universitaires ont un rôle important à jouer dans la lutte contre les inégalités territoriales mais également sociales puisque la bibliothèque représente un espace de travail essentiel pour les élèves issus de foyers modestes ou pauvres. Nous sanctuariserons les bibliothèques publiques et soutiendrons (via les DRAC et DAC) les créations de nouvelles bibliothèques par les collectivités. Nous nous opposerons à toute fermeture d’établissement, totale ou partielle, dictée par des considérations budgétaires de collectivités, ainsi qu’à toute restriction de fonctionnement, comme la réduction des effectifs, leur redéploiement ou leur mutualisation entre bibliothèques d’une même collectivité. 

Nous augmenterons également les effectifs là où c’est nécessaire, et plus spécifiquement de personnel formé au métier de bibliothécaire. Pour cela, nous sommes favorables à l’obligation de la compétence culturelle pour l’ensemble des collectivités et l’État accompagnera financièrement celles qui en auront besoin pour accomplir cette ambition. Enfin, nous prendrons également en compte les revendications des récentes mobilisations dans les bibliothèques, qui militaient autant pour l’abrogation du passe sanitaire/vaccinal pour accéder à leurs structures (ce que nous partageons) que pour de meilleures conditions de travail et mettre fin à la précarité structurelle et les conditions de travail dégradées dans de nombreuses bibliothèques (notamment d’envergure nationale comme la BPI ou la BNF). 

Le service de la culture et de la lecture requiert de la présence humaine et de la transmission : c’est ce principe qui guidera notre action. Les bibliothèques sont de précieux lieux de commun qui doivent pouvoir se développer dans les meilleures conditions possibles pour accueillir l’ensemble des citoyen•nes.

L’Avenir en commun s’oppose par ailleurs à la logique d’autonomisation des universités et du monde scolaire qui représente un vecteur majeur et assumé comme tel d’inégalités face au savoir. Nous veillerons notamment à ce que la bibliothèque de chaque université soit suffisamment pourvue pour répondre aux besoins bibliographiques de tous les élèves de licence, quelles que soient leurs ressources. 

Rôle démocratique de l’Université et de la recherche scientifique

  1. Selon vous, le développement de la recherche doit-il se faire en prenant « l’économie de la connaissance » comme boussole ? Le cas échéant, comment la définissez-vous, et quelle place envisagez-vous pour les Sciences Humaines et Sociales (SHS) dans cette politique ?

Nous considérons la transmission et la production de connaissances par l’enseignement supérieur et la recherche comme un élément essentiel de la réussite économique du pays, de sa capacité à innover et à répondre aux grands enjeux de notre temps. Cependant, la recherche ne doit en aucun cas prendre les contraintes et perspectives économiques comme unique boussole. Les retombées économiques de la recherche sont difficilement quantifiables, car fréquemment indirectes et étalées sur une échelle de temps très longue. La recherche en sciences sociales est un outil indispensable au progrès social, à l’émancipation de toutes et tous et au dynamisme démocratique. Les sciences humaines et sociales ont donc toute leur place dans le programme de l’Avenir en commun.

  1. Quel est le rôle social et politique de l’Université ? La considérez-vous comme une institution unifiée ou bien souscrivez-vous à une politique de différenciation des missions entre les établissements ? Si oui, que signifie cette notion à vos yeux ? Y a-t-il des universités qui ne seraient pas « de recherche » ? 

Créer, critiquer et transmettre les savoirs sont des tâches nécessaires au développement humain. Elles sont encore plus fondamentales aujourd’hui face à la crise sociale et environnementale, car elles permettent de comprendre les grandes questions du siècle, d’y réfléchir par soi-même et de contribuer activement à la délibération collective. La production et la diffusion des connaissances scientifiques sont ainsi essentielles pour l’émancipation, ce qui impose de les confier au secteur public, au service de l’intérêt général.

Nous ne pensons pas souhaitable le processus de différenciation des universités. Nous abrogerons la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) et la loi Fioraso. Toutes les universités doivent être des universités de recherche, car il n’existe pas d’enseignement supérieur de qualité si le lien avec la recherche scientifique est cassé. Les différences entre universités existeront toujours : elles sont liées d’une part à la liberté académique et donc aux avancées de la science dans les différentes unités de recherche liées à ces universités et d’autre part à la liberté pédagogique des enseignants. Mais ces différences ne doivent pas se transformer en concurrence, ni pour l’accès aux enseignements, ni pour l’accès aux moyens. 

  1. Croyez- vous important de garantir la liberté académique  ? Quel doit être son périmètre, et pourquoi ? Y a-t-il selon vous des menaces immédiates contre cette liberté en France, et lesquelles ? Quelle serait votre politique pour garantir cette liberté ?

La liberté académique est cruciale à la fois pour l’avancée de la science elle-même et pour le processus démocratique, car la connaissance scientifique permet d’éclairer les décisions des citoyens. La liberté académique est garantie par le statut des personnels de la recherche et les moyens récurrents dont ils disposent pour effectuer leurs recherches. Le statut de fonctionnaire est un des plus protecteurs, car le chercheur peut mener les recherches qu’il souhaite, sans prendre le risque d’être licencié si ces recherches déplaisent aux pouvoirs politique ou économique. La liberté académique est donc aujourd’hui menacée par la précarité, les nouveaux statuts (CDD tenure Track ou CDI de mission) et surtout par le mode de financement sur appel à projets, qui contraint fortement la liberté académique. Plus récemment, le pouvoir politique a commencé une chasse aux sorcières “islamogauchistes”  encore plus grave pour la liberté académique. 

Notre politique renforcera très fortement la liberté académique par l’augmentation des emplois de fonctionnaires pérennes et des crédits récurrents. En effet, nous proposons de recruter massivement des fonctionnaires avec un plan pluriannuel de 30 000 emplois et la titularisation de tous les précaires exerçant des fonctions pérennes. Nous proposons aussi de supprimer l’ANR et les initiatives d’excellence et de redistribuer les fonds aux unités sous la formation de dotations récurrentes. 

La liberté académique doit être encadrée ou limitée de deux manières: d’une part pour des raisons éthiques (respect des droits fondamentaux, transhumanisme ou souffrance animale par exemple), d’autre part dans le cadre de la recherche finalisée où les objets d’études peuvent être contraints (obligation de travailler sur la tomate à l’INRAE ou le nucléaire au CEA). 

  1. Comment entendez-vous protéger l’indépendance des formations universitaires et de la recherche vis-à-vis des pouvoirs économiques, et en particulier de ceux dont les intérêts vont contre les impératifs climatiques et environnementaux ?

Nous cesserons la surenchère de la présence des pouvoirs économiques et politiques dans les conseils d’administration des universités et des EPST. Une vraie démocratie universitaire doit réaffirmer au contraire les principes de coopération et de collégialité. Dans les universités, un mandat unique sera instauré pour les président·es, désigné·es par les seul·es membres élu·es du Conseil d’administration et du Conseil académique en leur sein, et révocables par elles et eux. L’élection sera privilégiée pour les postes à responsabilité. Un rééquilibrage, voire une refonte, des collèges pour une meilleure représentation de tou·tes les étudiant·es et personnels sera engagé, en concertation avec les syndicats, et la prime majoritaire sera supprimée.

  1. Comment envisagez-vous la diffusion des connaissances vers la société ? Entendez-vous instituer un organisme sur le modèle du Science Media Center britannique pour gérer l’interface avec les médias ?

L’ouverture des universités et de la recherche sur la société sera développée, avec des services dédiés au sein des universités et des EPST chargés d’organiser le lien entre les chercheurs et la population. Chaque université aura une mission de partage des savoirs au-delà des effectifs de formation initiale, auprès de tous les publics (reprise d’études, formation continue, temps libre…), avec notamment des cours libres assurés volontairement par des enseignant·es-chercheur·ses dans le cadre de leur service. Les projets associant les citoyen·nes seront encouragés dans un esprit de diffusion des savoirs et de réflexion citoyenne sur leur usage. Nous encouragerons aussi le développement des Centres de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI), afin d’accroître le partage des connaissances avec les citoyens et citoyennes. Enfin, l’enseignement secondaire pourra participer aux programmes de recherche, qui seront présentés dans les lycées généraux, technologiques et professionnels, y compris hors des villes universitaires. Les projets communs seront encouragés.

Le modèle du Science Media Center britannique pour gérer l’interface avec les médias pourra être analysé. Mais selon nous le plus important est que la communication scientifique soit le plus possible issue d’expertises collectives, comme le GIEC ou l’IPBES. 

  1. Comment envisagez-vous l’interaction entre les scientifiques et la décision politique ? 

Les connaissances accumulées dans l’ESR pourraient être très utiles aux services de l’État et à ceux des collectivités locales pour remplir plus efficacement leurs missions. Mais ces services publics sont aussi des sources d’informations pouvant être très utiles à la construction des connaissances. 

La communauté scientifique a aussi la responsabilité d’apporter son éclairage scientifique sur les questions traitées lors de délibérations politiques, cela est, par exemple, communément admis sur les questions environnementales ou climatiques. Sur bien d’autres domaines, le désintérêt ou la négation des connaissances scientifiques pourtant susceptibles de nourrir les échanges est courant, en particulier concernant les sciences sociales. Une partie du problème réside dans les structures d’enseignement supérieur par lesquelles une grande partie des décideurs politiques sont passés. En effet une grande partie de l’élite politique et économique en France ne passe pas par l’université mais par des « grandes écoles » où l’enseignement est bien plus éloigné de la recherche. Mieux intégrer les écoles d’ingénieurs à l’ensemble de l’enseignement supérieur et valoriser la formation doctorale contribueront à combler le fossé entre une élite politique et économique et les scientifiques.

Université

  1. Quelle doit être la place de l’Université dans l’écosystème de l’enseignement supérieur ? Quelle place voyez-vous pour les grandes écoles et les classes préparatoires, ainsi que pour l’enseignement supérieur privé relevant de fonds privés ou géré par des associations cultuelles ?

Les universités ont une place centrale dans l’enseignement supérieur. Une des priorités en mai 2022 sera une refonte de la réforme des IUT avec la création d’une véritable licence universitaire technologique, ce qui imposera notamment la possibilité de la poursuite d’études pour deux années en école d’ingénieur en vue de l’obtention d’un diplôme d’ingénieur. De même une des priorités sera l’abrogation de l’ordonnance “établissements expérimentaux” avec le problème de l’intégration des écoles ayant le statut d’établissement-composante. Une des solutions est que ces écoles intègrent pleinement l’université avec un statut d’école interne.

Pour les classes préparatoires, nous prévoyons une convergence des formations du premier cycle. Cela passe d’abord par des moyens supplémentaires alloués à l’université. Ensuite cela signifie un retour à un cadrage national des diplômes afin de promouvoir des contenus et niveaux convergents entre classe préparatoire et licence notamment scientifiques. La mise en place d’un tel programme prendra plusieurs années. A son terme il sera jugé de l’opportunité de changements institutionnels plus profonds, mais en tout état de cause nous considérons que l’ensemble des formations de l’enseignement supérieur a vocation à intégrer l’Université à terme, en alignant par le haut les moyens octroyés (classes préparatoires, écoles post-bac liées aux formations sanitaires et sociales, grandes écoles publiques…).

Les universités doivent permettre d’assurer le lien entre recherche et enseignement. Les organismes de recherche, par leur nature, permettent de garantir une cohésion dans les recherches menées mais aussi d’éviter des “effets de modes” correspondant à des cycles où les laboratoires mènent tous les mêmes recherches. Il n’y a pas d’antagonismes pour nous entre universités et organismes, mais de la complémentarité. C’est pourquoi nous nous opposons à leur transformation en agences de moyens comme le proposait une note de la Cour des comptes ou comme le suggérait le récent discours du Président au congrès de la CPU.

Comme dit plus haut, nous interdirons le caractère lucratif des écoles privées de l’enseignement supérieur (actionnariat, cotation en bourse).

  1. De combien d’enseignants-chercheurs titulaires la France a-t-elle besoin selon vous pour garantir la continuité territoriale de formations disciplinaires et interdisciplinaires exigeantes ? Combien d’agents administratifs titulaires faudrait-il recruter en outre pour permettre un bon fonctionnement de l’Université ? Vous engagez-vous à porter le budget de l’Université (Programmes 150 et 231 de la MIRES) à 24 Md€ en 2027 ? Si la réponse est non, quel serait pour vous un budget raisonnable pour faire vivre l’Université ?

Notre estimation globale est qu’en plus de la titularisation de l’ensemble des précaires se trouvant sur des postes permanents, il faudrait recruter a minima 30 000 personnels statutaires tous corps confondus dans les universités et dans les EPST. 

Par ailleurs, les budgets des universités seront aussi abondés par des dotations fléchées vers les laboratoires liées à la suppression de l’ANR.

Pour le programme “Vie étudiante”, les investissements prévus seront très conséquents, à commencer par la mise en place de la garantie d’autonomie, mais aussi un plan de construction de logements universitaires, le développement de services de santé universitaires pluridisciplinaires etc.

  1. Depuis 2020, les files d’étudiants devant les distributions alimentaires des associations sont devenues une réalité durable en France. Le coût du logement dans les villes universitaires contribue tout particulièrement à cette situation qui obère l’avenir de la jeunesse et pèse sur la qualité des formations reçues. Vous engagez-vous à verser une allocation d’autonomie étudiante ? Si oui, comment la financerez-vous ? Quelles sont vos propositions pour le logement et l’urbanisme universitaires ?

Si la crise sanitaire de 2020 a accentué la réalité de la misère étudiante, elle existait avant. Malheureusement il existait déjà des files d’étudiant·es pour des distributions alimentaires auparavant même si c’était dans des ampleurs moindres. Nous nous engageons à créer une garantie d’autonomie de 1063 euros par mois pour tout jeune détaché du foyer fiscal de ses parents. La mesure sera financée sur le budget de l’Etat. Elle sera financée par une réforme de la fiscalité sur les successions, notamment avec un taux marginal de 100% pour la tranche supérieure à 12 millions d’euros.

Un plan d’investissement devra permettre la construction de 15 000 logements universitaires supplémentaires par an, avec la rénovation et la remise aux normes de sécurité, environnementales et d’accessibilité des logements existants. Nous construirons de nouveaux foyers de jeunes travailleur·ses et des internats de lycée comprenant des studios et appartements pour les étudiant·es post-bac.

Nous mettrons en place un service de santé universitaire doté d’effectifs suffisants permettant l’accès gratuit à la santé, à la prévention et à un accompagnement psychologique et augmenterons les moyens des cellules de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans tous les établissements.

  1. La démographie conduit à une augmentation considérable du nombre de jeunes aux portes des formations supérieures, et notamment des Licences et des Masters. Le nombre de Licenciés refusés à l’entrée des Masters est en très grande croissance. Quelles perspectives envisagez-vous pour ces jeunes ?

Nous sommes pour que tout jeune titulaire d’une licence ait accès à un cursus de master, et tout jeune titulaire d’un bac aux formations de l’enseignement supérieur. Nous garantirons donc à tou·tes les bachelier·es l’accès sans sélection à la formation de leur choix (démantèlement de Parcoursup) et le droit à la poursuite d’études (fin de la sélection en Master). Nous récusons l’analyse qu’il y aurait trop de diplômés de bac +5 en France. Par ailleurs, ayant conscience du manque de moyens nous créerons les postes d’enseignant·es-chercheur·s nécessaires pour pourvoir à ce besoin. Il faut adapter l’offre de  formation aux besoins et non l’inverse. 

  1. D’après la Cour des comptes, l’alternance s’est développée essentiellement dans les secteurs où l’insertion professionnelle est déjà bonne, et devrait donc avoir un « effet net sur l’emploi […] vraisemblablement faible ». L’aide « exceptionnelle » à ce dispositif devrait coûter 5 Md€. Comptez-vous reconduire cette aide, la développer ou la transformer ? Envisagez-vous de généraliser l’alternance à l’Université ? 

L’alternance n’est pas généralisable. Dans certains domaines, l’alternant·e a besoin d’acquérir un nombre de connaissances académiques avant de pouvoir être opérationnel en entreprise. Par ailleurs, pour certaines disciplines l’alternance représente difficilement une solution. 

La bifurcation écologique nécessite un haut niveau de qualifications qui ne peut être atteint que par notre système public d’enseignement professionnel. Notre stratégie diffère donc du “tout apprentissage”. Des centres polytechniques professionnels seront créés et généralisés sur l’ensemble du territoire. Ils regrouperont les formations publiques du CAP au BTS, des licences professionnelles et permettront la validation des acquis de l’expérience. La durée des CAP comme des baccalauréats professionnels sera allongée et passera à 3 ans pour les premiers et 4 ans pour les seconds, conformément à l’extension de l’instruction obligatoire à 18 ans. Nous nous appuierons sur les acteurs publics actuels et sur les structures existantes qui bénéficient d’un grand plan d’investissement pour rénover les locaux publics et les équiper du matériel le plus performant. Les CFA d’entreprise seront supprimés et la création de nouveaux CFA sera encadrée par les régions.

L’apprentissage sera réservé aux formations où cela est pertinent d’un point de vue pédagogique, les aides à l’embauche versées aux entreprises seront supprimées et le financement de l’apprentissage sera destiné aux établissements publics et rééquilibré en faveur des lycées professionnels.

  1. Le service public de l’enseignement supérieur a actuellement 11 missions. Comptez-vous modifier cette liste ? Etes-vous en mesure de donner un ordre de priorité à ces missions ?

Pour nous, les services publics de l’enseignement supérieur et de la recherche sont liés. Leurs premières missions correspondent à la production, conservation, critique, transmission et diffusion des connaissances. Pour l’enseignement supérieur on peut ajouter l’élévation du niveau de qualification des travailleurs. L’ensemble de ces missions s’exercent dans le cadre des principes du service public notamment l’égalité de traitement entre les usagers.

  1. Comptez-vous abroger la suppression du DUT, qui s’est faite dans une logique de gestion des flux d’étudiants au détriment des familles, entreprises et équipes pédagogiques ?

Nous ne comptons pas revenir à un diplôme en deux ans, cependant la réforme sera abrogée pour créer une véritable Licence universitaire technologique avec des programmes nationaux et garantissant la poursuite d’études jusqu’à bac+5 si nécessaire.

Recherche fondamentale et appliquée

  1. Quelle politique comptez-vous mettre en œuvre pour faire vivre la recherche fondamentale et la valorisation de la recherche ? Entendez-vous augmenter ou réduire les financements sur appels à projet (PIA, ANR, etc.) ?

Nous limiterons la proportion de financements alloués “sur projet” de manière à favoriser une recherche ambitieuse sur le long terme et libérer les chercheurs de contraintes bureaucratiques à la fois chronophages et coûteuses. Par conséquent, nous prévoyons de supprimer l’ANR et les financements liés aux initiatives d’excellence (IDEX, EQUIPEX…), et de rediriger les budgets alloués vers des dotations récurrentes aux unités. Des appels d’offres pour les nouveaux fronts de recherche ou les équipements pourront toujours être décidés par les organismes ou les universités. En revanche, la France continuera de contribuer au budget du conseil de recherche européen qui permet le financement de projets de plus grande envergure. En outre, de grandes causes nationales (changement climatique, alimentation, défis sociétaux) pourront faire l’objet de financements fléchés et pérennes. 

  1. Les controverses scientifiques récentes, notamment depuis le début de la pandémie, ont montré à quel point le poids de la parole scientifique auprès du grand public doit être garanti par l’indépendance statutaire des chercheurs. À combien de chercheurs titulaires et combien de personnels d’appui et de soutien titulaires estimez-vous les besoins pour redonner à la recherche française l’envergure quantitative de ses voisins tout en garantissant l’indépendance de la recherche ? À quel montant porteriez-vous le budget salarial des organismes de recherche à l’issue du prochain quinquennat ?

Nous proposons d’ouvrir 30 000 postes supplémentaires dans les universités et la recherche. Nous prévoyons également d’augmenter significativement le budget de la recherche en redirigeant la majeure partie de l’actuel crédit impôt recherche (plus de 7 milliards d’euros par an) vers la recherche publique. Nous revaloriserons les salaires avec une augmentation de 10 % du point d’indice et nous souhaitons porter l’effort de la R&D des administrations publiques à 1,5% du PIB en lieu et place du 0,7% actuel.

  1. Au sein de quel périmètre ministériel entendez-vous placer l’Université d’une part, et la recherche d’autre part ? Un ministère de plein exercice unissant enseignement supérieur et recherche ? Un rattachement de l’enseignement supérieur à l’Éducation nationale ? Un rattachement de la recherche à Bercy ?

L’intitulé du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche nous semblent bien affirmer la solidarité entre enseignement et recherche. Au-delà des débats sur le périmètre ministériel, nous maintiendrons les deux directions générales existantes à savoir celle de l’enseignement supérieur et celle de la recherche.

  1. Quelle politique envisagez-vous pour favoriser l’intégrité scientifique ? Cela implique-t-il une révision des modes d’évaluation de la recherche ?

L’intégrité scientifique est mise à mal par le modèle de management néolibéral exacerbant la compétition entre les scientifiques et entre les institutions au sein desquelles ils travaillent. Il a également été montré que la précarité et la compétition accroissent les mauvaises conduites scientifiques, et sont sources de souffrance au travail des personnels travaillant dans le secteur académique. Cette lutte pour la survie à laquelle se livrent actuellement des chercheurs précarisés dans leurs statuts ou pour l’accès à des financements est hautement contre-productive. 

Nous reverrons aussi les modalités de l’évaluation des formations et des unités de recherche, qui seront discutées par concertation entre les différents acteurs de la recherche (ex. les comités du CNRS) et dans le cadre des organes délibératifs du Conseil national de l’ESR (CNESER) et du Conseil national des universités (CNU), qui seront rénovés, renforcés et démocratisés. Le HCERES sera lui supprimé.

  1. Le crédit d’impôt recherche doit-il permettre la défiscalisation des entreprises ou contribuer à accroître l’investissement en recherche et développement des entreprises ? Comptez-vous le sanctuariser dans son fonctionnement actuel ou le faire évoluer en fonction de nouveaux objectifs ?

Nous proposons de supprimer ce dispositif extrêmement coûteux et largement dévoyé de son objectif initial afin de redynamiser la recherche publique. La crise sanitaire illustre l’échec des politiques publiques obnubilées par un retour sur investissement rapide des deniers publics alloués à la recherche. Le CIR n’a pas empêché certaines entreprises telles que Sanofi (150 millions d’euros par an) de licencier massivement tout en distribuant d’importants dividendes aux actionnaires. Pour autant, nous reconnaissons la nécessité des partenariats et des interactions entre recherche publique et privée. Nous substituerons donc au CIR un mécanisme mieux ciblé dont l’utilisation sera mieux contrôlée. La stimulation de la R&D privée passera en partie par l’investissement de l’État, notamment au travers du plan massif de 200 milliards d’euros d’investissements écologiquement et socialement utiles. Ces investissements et les nouvelles normes écologiques nécessiteront en cascade des innovations dans les entreprises privées qui devront investir dans la R&D. Nous favoriserons donc les projets visant à répondre aux grands défis écologiques de notre temps et nous veillerons à ce que les aides au secteur privé permettent notamment l’embauche de jeunes chercheurs, grands oubliés du CIR. 

Enfin, le transfert de savoirs et le lien organique entre R&D public et R&D privé passe notamment par les docteurs. C’est pourquoi, dans notre programme, nous proposons d’augmenter de 8000 le nombre d’allocations doctorales annuelles, de faciliter le financement en quatrième année et de reconnaître le doctorat dans les conventions collectives. Par contre, nous sommes opposés à ce que les entreprises puissent directement participer en tant que telles aux écoles doctorales (ce qui est en discussion dans le nouvel arrêté sur le contrat doctoral) et qu’elles puissent encadrer des doctorants sans aucun contrôle sur la qualité académique de leur recherche. Nous pensons que ces doctorats doivent toujours se faire en partenariat avec le monde académique et de manière cadrée par des conventions spécifiques, comme c’est le cas actuellement.

  1. Le modèle actuel de recherche dans les pays de l’OCDE (compétition, quantification, édition privatisée…) touche à ses limites. Êtes-vous favorable au maintien d’une politique d’alignement du système français sur ces « meilleurs standards internationaux » ou prendriez-vous au contraire le risque de l’expérimentation d’un nouveau modèle national ? Si oui, sur quelles bases ? Le cas échéant, vous prévalez-vous d’autres « standards internationaux » que ceux communément évoqués ?

Nous récusons le modèle promu ces dernières années, basé sur la compétition mondiale et la marchandisation du savoir scientifique (éditeurs privés) comme celui des acteurs qui le produisent. À rebours, nous proposons de refonder un service public de l’enseignement supérieur et de la recherche basé sur des valeurs de rigueur, de temps long, de collégialité du travail et de partage du savoir comme bien commun 

L’accès ouvert et gratuit aux revues universitaires sera généralisé par la création d’un service public de la publication scientifique. Les connaissances acquises par les organismes publics et les universités seront par défaut rendues accessibles à tou·tes, y compris donc aux acteurs privés.

Nous réaffirmons donc un certain nombre de principes:  financement pérenne, statut de fonctionnaire, égalité de traitement, libre accès au savoir Cette révolution permettra de rendre le pouvoir aux travailleurs des services publics de l’enseignement supérieur et de la recherche de décider collectivement d’une partie de leurs organisations et de leurs orientations.

Démocratie, expertise et haute-fonction publique

  1. Quelle politique comptez-vous mettre en œuvre concernant le recrutement et la formation des hauts fonctionnaires ?

Ce qui fait l’attractivité de la fonction publique, c’est d’abord le sens. Avec la planification écologique, nous donnerons un cap clair : le service public organise la mobilisation générale pour la bifurcation écologique. Pour permettre cette mobilisation, il faut respecter les fonctionnaires, et leur donner les moyens de travailler. Pour cela, nous revaloriserons le point d’indice, titulariserons les travailleurs précaires des 3 fonctions publiques et augmenterons les budgets publics. Fini les objectifs incantatoires. Nous affirmons également que l’expertise doit se trouver au sein des services de l’Etat et pas externalisée auprès de cabinets de conseils qui coûtent des milliards d’euros à l’État et aux collectivités territoriales chaque année. La reconnaissance de la compétence des fonctionnaires pour exercer ces missions à haut niveau d’expertise doit également permettre d’attirer les jeunes vers la fonction publique.

Nous nous opposons à l’ouverture des postes d’encadrement aux contractuels sur les postes de hauts fonctionnaires et aux nominations discrétionnaires qui favorisent l’entre-soi. Nous garantirons des recrutements qui reflètent la diversité sociologique de la société dans les concours de la fonction publique.

  1. Le titre de docteur ou d’ingénieur-docteur doit-il être exigé pour certains postes au sein de la haute fonction publique, de sorte à lui redonner les capacités d’analyse scientifique, de gestion et de logistique qui lui font défaut ?

Nous ne sommes pas favorables à imposer de nouvelles conditions d’accès aux postes de la haute fonction publique. Le concours doit permettre de garantir un niveau de compétences attendu. L’enjeu repose selon nous davantage sur la capacité de l’administration à établir un dialogue permanent avec les milieux universitaires et à s’appuyer sur les travaux des chercheurs – plutôt que ceux de cabinets de conseil privés – pour étayer les prises de décision et la construction des politiques publiques. Nous sommes toutefois favorables à renforcer les passerelles entre milieu universitaire et milieu administratif pour permettre à des docteurs de rejoindre la haute fonction publique. 

  1. La formation des hauts fonctionnaires doit-elle inclure une étape de formation initiale indifférenciée dans un établissement ad hoc, ou être uniquement fondée sur l’expertise sectorielle ? Une formation disciplinaire à l’Université doit-elle être un préalable à l’accès aux concours de la haute fonction publique ?

La préparation des concours de la haute fonction publique permet d’acquérir une bonne partie du socle théorique attendu. L’intérêt d’un socle de formation commun serait de former l’ensemble des hauts fonctionnaires aux enjeux cruciaux de la bifurcation écologique, de la prise en compte des besoins des citoyens, etc. Une formation initiale indifférenciée serait toutefois contraire à la richesse de notre fonction publique qui tire sa force de sa grande diversité d’expertises sectorielles extrêmement pointues. 

Le livret thématique consacré à la recherche et à l’enseignement supérieur prévoit de rétablir le cadre national des diplômes de l’enseignement supérieur. Les établissements publics relevant de ce cadre national seront laïques et seuls autorisés à remettre des diplômes reconnus pour les concours de la fonction publique. 

Les concours internes doivent évidemment rester accessibles sur la base de l’ancienneté dans la fonction publique et sans condition de diplôme.

  1. Comment entendez-vous combattre l’indifférenciation graduelle des sphères publique et privée au sein de la haute fonction publique (conflits d’intérêt, pantouflage, rétro-pantouflage, etc.) ?

Nous durcirons les règles contre les conflits d’intérêts et interdirons le pantouflage : tout haut fonctionnaire souhaitant travailler dans le privé devra démissionner de la fonction publique et rembourser le prix de sa formation s’il n’a pas servi au moins dix ans. Nous allongerons à dix ans les périodes d’interdiction d’exercice d’une fonction privée après avoir exercé une activité dans la fonction publique relative au même secteur. Nous abolirons la réforme Macron du corps préfectoral et diplomatique. Enfin, nous garantirons des recrutements qui reflètent la diversité sociologique de la société dans les concours de la fonction publique.

  1. Comment entendez-vous réformer les agences d’expertise de l’État (agences sanitaires, Cour des comptes, France Stratégie, etc.) pour leur permettre de développer des approches plus scientifiques, et moins soumises au politique ?

Ces “agences” recoupent en fait différentes institutions ayant des statuts fort divers : juridictionnelles (Conseil d’Etat, Cour des Comptes), des services d’inspection (IGF, IGA, IGAS, IGESR, etc.), des service à compétence nationale (ANSSI), service de l’administration centrale (France stratégie) ou d’établissement public (Santé Publique France).

Par conséquent, au-delà des garanties statutaires à apporter aux fonctionnaires de ces institutions, il n’y a pas une réponse unique à cette question.

  1. Comment entendez-vous réformer le secteur audiovisuel pour redonner un peu de place à l’intelligence et aux savoirs ?

La mainmise des groupes industriels sur les médias français est désormais criante. Les conséquences s’observent chaque jour, dans chaque journal d’information, dans chaque émission de divertissement. L’assèchement mortifère du pluralisme et le recul sans précédent de l’indépendance des journalistes appellent une réforme en profondeur de l’environnement médiatique. Il faut sortir le secteur audiovisuel et la presse en général des mains des pouvoirs économiques prédateurs, pour que les journalistes, y compris scientifiques, puissent exercer correctement leurs métiers. 

Nous proposons donc d’adopter une loi anti-concentration dans les médias et d’engager leur démocratisation. Nous transformerons le « Conseil de déontologie des médias » créé en 2019 en véritable contre-pouvoir citoyen. Pour protéger le secteur des intérêts financiers et politiques, nous renforcerons le statut juridique des rédactions, avec l’introduction d’une charte déontologique dans la convention collective et un droit d’agrément aux rédactions face à l’entrée d’un nouvel actionnaire. 

Nous réserverons les aides publiques à la presse aux seuls médias d’information, et mutualiserons les outils de distribution (imprimeries, serveurs, distribution).

Les présidents de France Télévisions et de Radio France seront élus par le parlement et les coopératives de journalistes, travailleurs des médias et de lecteurs/spectateurs/auditeurs seront favorisés.

Il est par ailleurs nécessaire de développer l’attribution de fréquences aux médias locaux et associatifs.

  1. Comment entendez-vous contribuer à un renouveau démocratique de notre pays ? Par quels moyens garantir un débat public éclairé et pluriel ?

La revitalisation démocratique est au centre de notre programme. Nous proposons de réunir une Assemblée constituante pour passer à la 6e République Les institutions de la 5e République sont dépassées. Nous avons le pouvoir de refonder nos institutions communes. Nous proposons que les Français·es se dotent d’une nouvelle Constitution rédigée par une Assemblée constituante. Le processus constituant que nous entendons mener est décrit dans notre plan “ Comment nous allons passer à la 6ième République” et dans notre livret “Constituante : pour une 6ième République de l’intervention populaire”.  Ces documents complètent notre programme l’Avenir en commun. La Constituante ne sera pas un Parlement bis, qui déciderait en chambre de l’avenir du pays. Elle sera le point d’orgue d’un processus global qui mettra en mouvement le peuple tout entier, d’une véritable ébullition démocratique qui s’emparera ainsi du pays. Très loin du « grand débat » de Macron, elle évitera les exercices de communication, la mainmise des gouvernants actuels, et les « comités théodule » dont on sait par avance que rien n’en sortira. Tout le processus est pensé pour maintenir un lien permanent entre les Constituant·es et le peuple : ce n’est qu’ainsi qu’il pourra susciter une large adhésion et permettra au peuple de se refonder. Car la démocratie n’est pas qu’une question d’institutions et d’élections : c’est un projet commun qui lie chacune et chacun avec la République. L’Assemblée constituante permettra de le régénérer, pour que le peuple français puisse s’affirmer à nouveau en tant que sujet politique.

Les Constituant·es, élu.e.s ou tiré.e.s  au sort d’après les modalités énoncées au sein du plan cité plus haut, s’appuiront pour leur travail sur le peuple tout entier. Pour cela, les communes joueront un rôle central : elles sont la cellule de base de la démocratie, comme dans chaque moment de l’histoire révolutionnaire de la France, qui a établi ce lien indissociable entre commune et souveraineté populaire. 

Les municipalités seront ainsi chargées d’animer le débat constituant partout dans le pays : elles ont la responsabilité de tenir les cahiers de doléances de nos concitoyen·nes et de les faire remonter aux Constituant·es. L’intervention populaire prendra dans ce moment des formes complémentaires, garantissant la possibilité d’implication pour toutes et tous, quel que soit l’âge, la situation sociale, professionnelle ou géographique. Des forums citoyens sont organisés dans les communes, avec l’appui des outils fournis par la Commission nationale du débat public (CNDP), autorité indépendante chargée de l’impartialité des débats publics. Chaque personne vivant en France pourra y participer et être tenue informée. Ces débats publics sont diffusés publiquement grâce à des outils numériques. Leur compte-rendu, réalisé par des garant·es indépendant·es, est public : chacune et chacun pourra les consulter et les contester le cas échéant. La Constituante s’appuiera sur les centres communaux d’action sociale (CCAS), les associations de lutte contre l’exclusion, mais aussi sur les maisons de la jeunesse et de la culture (MJC), les centres sociaux, les acteurs et actrices de l’éducation populaire pour permettre la participation de toutes et tous à ces débats, et notamment de celles et ceux qui en sont habituellement exclu·es : les plus pauvres, les habitant·es des quartiers populaires, les jeunes, les personnes habitant dans des zones rurales.

Des caravanes de la Constituante sillonneront le pays. Elles ont pour charge de récolter les doléances, s’installant au milieu de la cité comme de la place du village, organisant des assemblées à ciel ouvert, des porte-à-porte, variant et expérimentant les méthodes les plus diverses.

Des outils de participation en ligne viendront compléter le dispositif, avec notamment la possibilité de contributions individuelles et collectives, l’information systématique sur l’ensemble des travaux réalisés dans le cadre de la Constituante, dont l’ensemble des travaux seront publics.

Les médias prendront toute leur part dans ce processus de refondation. Une vaste campagne d’information et de sensibilisation à la fois sur l’organisation du référendum puis sur le déroulement des travaux de l’Assemblée constituante sera organisée. En outre, la Constituante concernera tous les territoires de la République. Un congrès général des territoires éloignés et insulaires sera organisé pour définir ensemble les formules communes les plus adaptées à leurs situations particulières, avec comme boussoles le plein respect de la souveraineté populaire et l’objectif d’une égalité réelle. Les Constituant·es communiqueront régulièrement avec les peuples qui ont eux aussi décidé de se refonder. Nous pensons ici particulièrement au Chili. 

Grâce à cette mise en mouvement démocratique générale, les Constituant·es pourront traduire dans une loi fondamentale, soumise à référendum, le projet commun du peuple français : la Constitution de la 6e République. 

Cette 6ième République que nous défendons est celle qui permettra l’intervention populaire. Nous proposons d’instaurer le Référendum d’initiative citoyenne (RIC), par lequel les citoyens qui réunissent suffisamment de signatures peuvent révoquer des élus, proposer ou abroger une loi et modifier la Constitution. 

Le référendum révocatoire que nous proposons, via la procédure du RIC, s’appliquerait à tout·es les élu·es, de maire jusqu’au président de la République. Nous entendons rendre obligatoire le recours au référendum en cas de modification de la Constitution ou d’adoption d’un nouveau traité européen. Les députés insoumis ont soutenu ces propositions par amendements lors de la révision constitutionnelle de 2018, stoppée avec l’affaire Benalla, ou à l’occasion de leurs niches parlementaires au cours de la dernière législature. 

Nous voulons également reconnaître le vote blanc, mettre en place le vote obligatoire et instaurer un seuil de votes exprimés pour valider une élection. Enfin, nous souhaitons instaurer une procédure de parrainages citoyens pour l’élection présidentielle en alternative aux 500 parrainages d’élus. Ces propositions ont également été défendues à l’Assemblée nationale. 

S’agissant de la production et le partage des savoirs sont au cœur de tout projet émancipateur et sont au fondement même de la démocratie. L’accroissement de nos connaissances individuelles et collectives est d’abord une fin en soi, car pour l’humanité la compréhension des phénomènes est source de progrès collectif. L’Université et la Recherche contribuent aussi à l’intérêt général, en développant l’esprit critique des citoyens et en accroissant le partage des connaissances scientifiques pour le plus grand nombre. Le service public d’enseignement supérieur et de recherche est pour nous l’un des piliers de la VIème République à bâtir conformément au processus décrit plus haut, qui garantira la nature démocratique de l’Université et contribuera par ses actions au projet d’émancipation collective et individuelle et de réponse aux besoins sociaux et environnementaux, revenant ainsi aux sources du socialisme républicain authentique et à sa finalité telle que Jean Jaurès la définissait : la République, jusqu’au bout.