ANACEJ

Tout au long de la campagne, de nombreuses organisations (associations, syndicats, collectifs, etc) sollicitent Jean-Luc Mélenchon pour qu’il détaille ses propositions sur des enjeux qui les concernent. L’équipe du programme et les groupes thématiques répondent, pour chacune de ces demandes, en développant des points précis de notre programme l’Avenir en commun.

L’Association nationale des conseils d’enfants et de jeunes est un réseau national d’acteurs et d’élus enfance jeunesse. Elle a été créée en 1991 pour promouvoir la participation des enfants et des jeunes à la décision publique et accompagner les collectivités territoriales dans la mise en place de ces démarches.

Quels sont selon vous les enjeux prioritaires pour les jeunes?

Le monde dans lequel les jeunes entrent et dont ils sont amenés à devenir les acteurs est abîmé, injuste et instable.

Le réchauffement climatique a commencé et, d’après le dernier rapport du GIEC, nous savons que nous n’avons que 3 ans pour inverser la tendance en termes d’émissions de gaz à effet de serre, si nous voulons conserver un monde vivable. Ce qui attend notre jeunesse sont des pics de chaleur extrême, un effondrement drastique de la biodiversité et une montée des eaux qui, dès 2050, devrait amener de grandes villes comme Bordeaux ou Le Havre à être sous l’eau si nous n’agissons pas immédiatement. Ces perturbations climatiques amènent à remettre davantage en question notre usage de l’énergie nucléaire, pour laquelle nous avons besoin d’une eau de plus en plus rare afin de faire fonctionner nos centrales et dont nous ne savons que faire des déchets radioactifs. Le modèle économique qui nous a amené à cette situation est le même que celui qui nous pousse à détruire des forêts pour produire toujours plus, et à asperger notre alimentation de pesticides qui détruisent drastiquement la biodiversité. La question de l’écologie est donc un enjeu majeur pour la jeunesse et, à moyen-terme, c’est même le plus important.

Si la fin du monde est particulièrement préoccupante, la fin du mois l’est tout autant. Les personnes les plus pauvres en France sont les jeunes, à tel point qu’un jeune sur deux saute des repas et qu’un jeune sur trois renonce à se soigner faute de moyens. La crise sanitaire a aggravé la situation en faisant perdre à beaucoup d’entre eux leur emploi, dont le marché offre majoritairement des contrats précaires. Les effets des mesures prises pendant la crise, en particulier le confinement, a en outre gravement impacté la santé mentale de notre jeunesse. D’après la Défenseure des droits, la part des jeunes présentant des syndromes dépressifs a doublé ; ainsi 20% des jeunes 15-24 ans présentaient de tels syndromes après le premier confinement (contre 10% en 2019). L’enjeu de la santé, physique comme mentale, est donc prioritaire et renvoie directement aux d’autres enjeux majeurs tels que le pouvoir d’achat, l’emploi et le logement par exemple.

Pour faire face à ces multiples enjeux, la jeunesse du pays doit atteindre les plus hauts niveaux de formation possibles. Pourtant, les politiques menées ces vingt dernières années sont allées à rebours total de cette considération. Depuis l’autonomisation des universités, celles-ci ont de plus en plus de mal à se financer et peinent à dispenser un enseignement public de qualité satisfaisante. En outre, la sélection est devenue la règle de principe depuis la réforme de ParcourSup ; dorénavant le baccalauréat n’est plus la clé d’entrée à l’université et les élèves les moins bien classés sont écartés de ces formations. C’est injuste et nous assistons ainsi à une véritable sélection sociale, puisque ce sont généralement les jeunes issus des classes sociales les plus pauvres qui ne peuvent pas continuer vers les études supérieures, faute de moyens et résultats suffisants.

Comment vous comptez y répondre?

Notre réponse à tous ces enjeux tient dans notre programme de 694 propositions : l’Avenir en commun, qui se donne pour objectif d’atteindre l’harmonie des êtres humains entre eux et avec la nature, et notre quarantaine de livrets programmatiques qui s’y ajoutent.

Pour la planète, nous proposons de mettre en oeuvre ce que nous appelons une “bifurcation écologique” par un plan de 200 milliards d’euros d’investissements, qui permettra en particulier d’agir dans les secteurs qui nous permettront de limiter nos émissions de gaz à effet de serre : rénovation des logements, développement des transports alternatifs à la voiture, augmentation de la part des énergies renouvelables dans notre mix énergétique, etc. Face au jour du dépassement, nous instaurons également dans la constitution la “règle verte”, qui consiste à ne pas prendre plus à la nature que ce qu’elle peut reconstituer en un an. Nous arrêterons progressivement l’usage de l’énergie nucléaire, trop dangereuse et de plus en plus intenable du fait du réchauffement climatique, et nous augmenterons dans le même temps notre part d’énergies renouvelables. Enfin nous interdirons l’usage des pesticides et nous renforcerons la législation en matière de protection du vivant.

Contre la misère, nous donnerons à chaque jeune en formation une allocation d’autonomie de 1063 € par mois. Nous renforcerons aussi considérablement les moyens de l’aide sociale à l’enfance. De plus, la garantie d’emploi que nous proposons sera une grande sécurité pour les jeunes, assurés de trouver un emploi dès la fin de leur formation, un emploi rémunéré au moins au SMIC revalorisé (1400 € net). Quant aux problèmes de santé mentale, nous y ferons face en embauchant massivement des psychologues supplémentaires dans les centres médico-psychologiques et à l’université. Nous lutterons également contre les violences intrafamiliales et l’inceste.

Pour achever d’émanciper la jeunesse et lui permettre d’envisager sereinement son avenir, nous rendrons l’université gratuite et ouverte à tou·tes en abrogeant la sélection en licence et en master. Nous augmenterons les dotations dans l’éducation et l’enseignement supérieur afin d’améliorer les conditions de travail des enseignants, permettre une augmentation des effectifs sereine et donc garantir un apprentissage plus épanouissant et performant. Nous élèverons les normes afin de garantir l’accès aux personnes handicapées dans toutes les structures d’enseignement public, et nous les ferons respecter. Pour finir, nous mettrons aussi en œuvre dans l’enseignement supérieur un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, contre les violences patriarcales en général y compris les LGBTIphobies, contre le racisme et contre le validisme.

Quel regard vous portez sur les propositions de l’Anacej pour développer la participation enfance jeunesse?

Il ne faut pas perdre de vue que la jeunesse est traversée des mêmes contradictions que l’ensemble de la population. Nos efforts doivent par conséquent se concentrer avant tout sur les jeunes issus des classes sociales les plus pauvres, qui sont les premières victimes de tous les travers de notre société.

Plus globalement, la jeunesse est trop souvent considérée comme immature et irresponsable. C’est une vision flétrie qui ne correspond pas à la réalité. Les décisions prises par les plus âgées, en particulier en matière écologique, n’auront pas d’impact sur eux mais en revanche concernent les jeunes, qui sont beaucoup plus politisés que certains le pensent parfois. Il faut lui donner davantage de pouvoir de décision et s’appuyer sur ses aspirations pour organiser le pays à faire face aux enjeux de demain. Pour ces raisons, nous sommes favorables à l’ensemble de ces propositions.