Tout au long de la campagne, de nombreuses organisations (associations, syndicats, collectifs, etc) sollicitent Jean-Luc Mélenchon pour qu’il détaille ses propositions sur des enjeux qui les concernent. L’équipe du programme et les groupes thématiques répondent, pour chacune de ces demandes, en développant des points précis de notre programme l’Avenir en commun.
Le Collectif Handicaps rassemble 51 associations nationales représentatives des personnes en situation de handicap, de leurs familles et des proches aidants. Il défend les droits des personnes en situation de handicap auprès des pouvoirs publics.
Pensez-vous pouvoir reprendre dans votre programme ces 5 revendications prioritaires? Pouvez-vous détailler votre position sur chacun de ces points?
- Créer une prestation universelle d’autonomie, permettant de garantir une compensation intégrale, effective et personnalisée du handicap, sans exclusion d’aucune situation de handicap.
Oui, nous proposons d’élargir le champ de la prestation de compensation du handicap (PCH) pour qu’elle finance intégralement les besoins de compensation pour toutes les situations de handicap.
- Inscrire dans la Constitution le principe de l’accessibilité universelle.
Oui, dans le cadre des travaux de l’Assemblée constituante pour une 6e République, nous soutiendrons cette proposition.
- Garantir la qualité de l’accompagnement et des interventions grâce à de meilleures formations, à la valorisation des compétences actualisées, des métiers et des carrières ainsi qu’à l’amélioration des conditions de travail.
Entre autres mesures, nous proposons de :
Assurer le droit à l’éducation :
- Créer un véritable service public d’accompagnement des élèves en situation de handicap, avec un nouveau corps de fonctionnaires et un service de 24h pour un temps plein
- Former et titulariser les actuel·les AESH (accompagnant·es des élèves en situation de handicap) et en recruter 15 000 nouveaux et nouvelles
- Abaisser à dix le nombre maximum d’élèves par classe en unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) et garantir à chaque élève une place dans une structure ULIS, en ouvrant le nombre de structures nécessaires
- Augmenter le nombre des enseignant·es référent·es pour la scolarisation des élèves en situation de handicap afin de garantir un suivi individualisé de qualité
- Rouvrir les cursus de formation d’enseignant·es spécialisé·es pour pourvoir les postes nécessaires dans les classes ULIS, les établissements et services médico-éducatifs et reconstituer les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED)
- Mettre fin à la mutualisation des accompagnements en supprimant les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL)
- Décloisonner le secteur de l’Éducation nationale et le secteur médico-social, et développer la mise à disposition d’enseignant·es spécialisé·es au sein des établissements médico-éducatifs pour les enfants ne pouvant intégrer une classe « ordinaire »
- Répondre à l’accompagnement de ces élèves par la création du nombre ad hoc de postes de titulaires d’auxiliaires de vie scolaire formé·es et diplômé·es (création d’un diplôme d’AVS)
Répondre aux besoins quotidiens de l’accompagnement
- Mettre en œuvre la prise en charge par la Sécurité sociale des frais de psychomotricien·ne, d’ergothérapeute, et de psychologue, et de tous les équipements nécessaires à la vie quotidienne.
- Mettre en œuvre des plans cohérents et financés (Plan Polyhandicaps, Plan Autisme, Maladies rares…), de façon à adapter le mieux possible les prises en charge, les lieux d’accueil et les modalités de soins
Garantir le droit à l’emploi
- Mettre fin au désengagement financier de l’État via le retour à sa mission de traitement administratif des dossiers des travailleur·ses et pérenniser le financement de l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap
- Pourvoir chaque département d’un centre de préorientation, en relation avec la Maison départementale des personnes en situation de handicap, contribuant à l’orientation professionnelle des travailleur·ses confronté·es à des situations de handicap
- Favoriser l’emploi des travailleur·ses handicapé·es aux compétences reconnues, via l’embauche, si nécessaire, d’un·e salarié·e à temps équivalent en charge de leur accompagnement professionnel
- Assurer la cohérence des actions du service public de l’emploi et des organismes de placement spécialisé pour dynamiser l’emploi des travailleur·ses, via un dispositif de pilotage incluant l’État et les fonctions publiques, le service public de l’emploi et le secteur médico-social, l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) et les partenaires sociaux
- Renforcer la formation professionnelle en développant l’alternance entre travail « dans les murs » et travail « hors les murs »
- Réviser les procédés aboutissant à l’adaptation des postes de travail, avec une pleine et entière participation des institutions représentatives du personnel
- Surveiller les licenciements masquant une discrimination à l’égard des personnes en situation de handicap ou un souhait de ne pas adapter le poste de travail
- Améliorer les conditions de travail des personnes en établissements ou services d’aide par le travail (ESAT) en :
- Appliquant les textes les plus favorables entre le statut protecteur en ESAT, payé a minima au niveau du SMIC, et le statut de salarié·e issu du code du travail
- Mettant des institutions représentatives du personnel et reconnaître le droit de grève
- Mettant en place des réunions annuelles de proposition de formation et d’évolution professionnelle
- Organisant le contrôle par l’État des lieux de travail en milieu protégé et lui transférer sa gestion en cas de défaillance
- Permettre à toutes les personnes en situation de handicap se trouvant dans l’incapacité de travailler, de manière temporaire ou durable, de percevoir un revenu minimum d’existence au moins égal au seuil de pauvreté et dont le mode de calcul doit reposer sur l’individualisation.
Notre programme prévoit de revaloriser le montant de l’AAH au niveau du SMIC, désolidarisé des revenus du conjoint ou de la conjointe et de revoir ses conditions d’attribution pour prendre en compte la situation réelle de la personne (restriction durable d’accès à l’emploi).
- Renforcer la participation des personnes en situation de handicap, via le Collectif Handicaps et les associations représentatives, dans les processus de prise de décision publique à tous les niveaux (national, régional et municipal.
Nous proposons notamment de :
- Organiser l’élection de représentant·es des personnes en situation de handicap, avec des collèges par grande famille de handicap. Ceux-ci sont consultés par l’État et les collectivités publiques des associations représentatives avant l’élaboration et la mise en œuvre de la politique du handicap
- Imposer aux formations politiques l’accès universel aux discours, aux événements et manifestations
- Permettre l’accès égal aux mandats électoraux par les personnes en situation de handicap, en organisant aide humaine et matérielle au cours des campagnes électorales et lors du mandat
- Former les assesseur·ses aux différents handicaps et garantir l’accessibilité des bureaux de vote
- Imposer la réalisation de propagande électorale adaptée à tou·tes et notamment aux normes facile à lire et à comprendre (FALC)
- Favoriser l’implication des personnes en situation de handicap dans la vie politique et assurer leur droit de vote si elles sont en résidence
- Permettre l’accessibilité des sites internet et réseaux sociaux pour les personnes déficientes visuelles en mettant en œuvre des sanctions dissuasives pour les sites pris en défaut
Quelle est votre vision politique du handicap et quelle serait l’action prioritaire que vous mettriez en œuvre une fois élu ?
Après des années de retards, d’immobilisme, la situation doit changer pour les personnes en situation de handicap. Il est grand temps qu’elles disposent de leurs droits dans une société sans entraves. Il convient donc de se doter d’une politique ambitieuse respectueuse des droits humains.
La Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU réaffirme que toutes les personnes doivent bénéficier de tous les droits et libertés fondamentaux : respect de la dignité, de l’autonomie individuelle et de l’indépendance de la personne, non-discrimination, participation et intégration pleines et effectives à la société, respect de la différence et acceptation des personnes en situation de handicap comme faisant partie de la diversité humaine, égalité des chances, accessibilité, égalité entre les hommes et les femmes, respect du développement des capacités de l’enfant handicapé et respect du droit des enfants à préserver leur identité. Elle est donc notre boussole.
Le plan de lutte contre les obstacles au travail et dans les espaces publics a été trop de fois repoussé. La prise en compte du handicap est trop souvent reléguée au second plan ou noyée parmi d’autres thèmes comme la dépendance ou la maladie.
Une personne en situation de handicap n’est pas plus que quiconque réductible à son handicap.
Instaurer la citoyenneté pleine et entière, c’est donc insister sur le lien avec l’environnement. Pour garantir cette cohérence, il faut choisir ses mots. Nous préférons œuvrer « pour l’autonomie » qu’aider à résoudre la « dépendance », c’est-à-dire substituer à la notion de « prise en charge » celle de « prise en compte ».
Nos objectifs fondamentaux appellent ainsi la nécessité de lutter contre les obstacles environnementaux, c’est-à-dire culturels, sociaux, législatifs, réglementaires, et architecturaux afin de favoriser l’accès des personnes en situation de handicap aux droits généraux de tout·e citoyen·ne, et notamment le droit à la liberté effective de circuler avec une autonomie maximale, de s’instruire, de travailler, et le droit à pouvoir bénéficier d’un revenu décent.
En premier lieu, réduire les situations de handicap vécues au quotidien par plusieurs millions de nos concitoyen·nes impose une politique interministérielle parfaitement coordonnée, en lien permanent avec les associations et collectifs de personnes en situation de handicap et avec des relais à toutes les échelles territoriales, ce qui n’a jamais été le cas.
La deuxième mesure immédiate sera la réforme de la loi du 11 février 2005 pour redéfinir les mesures visant l’accès à une citoyenneté pleine et entière.
Enfin, il s’agit de prévenir les situations de handicap tout en garantissant les services publics au même niveau que pour le reste de la population. Éducation, emploi, déplacements, prestations sociales, vie politique : il s’agit d’égaliser toutes les dimensions de la citoyenneté.