Info Birmanie

Tout au long de la campagne, de nombreuses organisations (associations, syndicats, collectifs, etc) sollicitent Jean-Luc Mélenchon pour qu’il détaille ses propositions sur des enjeux qui les concernent. L’équipe du programme et les groupes thématiques répondent, pour chacune de ces demandes, en développant des points précis de notre programme l’Avenir en commun.

Info Birmanie informe sur la situation des droits humains en Birmanie / Myanmar et mène des actions de plaidoyer.

Reconnaissance / Collaboration de la France avec le Gouvernement d’unité nationale

Rappelons d’abord que si les persécutions et la répression en Birmanie se sont aggravées et élargies à l’ensemble de la population avec le coup d’Etat et le retour au pouvoir de la junte militaire début 2021, elles lui ont préexisté. 

En 2017, des centaines de milliers de Rohingyas ont été victimes de ce que l’ONU a qualifié d’un nettoyage ethnique caractérisé par des massacres à grande échelle, des viols massifs en réunion, des incendies de villages. Le président de la mission onusienne a alors pointé une « chaîne de commandement très claire » agissant dans une « impunité totale ». Enfin, depuis 2019 l’ONU a conclu que les 600 000 Rohingyas vivant encore en Birmanie font toujours face à une persécution systématique et vivent « sous la menace d’un génocide ». 

Cette précision ne revient en aucun cas à relativiser le coup d’Etat de 2021, qui a élargi la répression et encore éloigné toute perspective de fin des persécutions envers les Rohingyas. Elle vise toutefois à rappeler – comme nous l’avons fait dans la proposition de résolution parlementaire visant à condamner les crimes contre l’humanité, au caractère potentiellement génocidaire, perpétrés depuis l’été 2017 contre les Rohingyas – que certains membres éminents du NUG ont, en 2017, cautionné voire légitimé les exactions contre les Rohingyas. C’est le cas de Aung San Suu Kyi qui, alors qu’elle était Cheffe du gouvernement de facto, s’est rendue à la Haye en décembre 2019 pour nier les atrocités commises contre les Rohingyas et appelé la CIJ à rejeter la demande de mesures conservatoires. Et la persécution de ces derniers n’est toujours pas clairement dénoncée. Selon Human Rights Watch notamment, les mesures visant à protéger les Rohingyas ont été affaiblies par une « foi persistante et erronée » dans la crédibilité démocratique supposée de l’ancienne dirigeante de facto.  

Ce constat se retrouve pour partie dans les positions du NUG. Il aura fallu attendre plusieurs semaines après sa création pour que, sous la pression, il appelle à reconnaître le droit à la citoyenneté birmane pour les Rohingyas. Un premier pas important mais insuffisant au regard de la situation concrète des Rohingyas. 

En conséquence, notre position sur le NUG sera fonction d’une part des avancées de ce dernier sur le sujet central de la répression de masse que les Rohingyas continuent à subir. Il doit la dénoncer plus fortement, et surtout annoncer des mesures concrètes permettant aux centaines de milliers de Rohingyas exilés de revenir chez eux en toute sécurité. D’autre part, elle sera fonction de l’impact que pourrait, au moment où elle serait opérée, avoir une telle reconnaissance sur l’avenir de l’opposition à la junte birmane. 

Justice Internationale / Lutte contre l’impunité

Si vous êtes élu(e), la France se joindra-t-elle à la requête déposée par la Gambie, comme l’ont fait, en septembre 2020, des pays tels que le Canada et les Pays-Bas ? Comment entendez-vous promouvoir la justice internationale et la lutte contre l’impunité face aux crimes les plus graves perpétrés par la junte actuelle en Birmanie ?  

Si Jean-Luc Mélenchon, le candidat de l’Union populaire, est élu, la France se joindra à cette requête, dans la continuité logique de la proposition de résolution déposée à l’Assemblée nationale par le groupe de la France Insoumise. 

Paralysie du Conseil de sécurité / Réforme de l’ONU

Quelle est votre position sur ce blocage persistant et par quelles initiatives appuierez-vous une réforme profonde des institutions de l’ONU pour remédier à cet échec, auquel nous assistons également dans le dossier Ukrainien ?

Quelles que soient ses imperfections, l’ONU est la seule organisation universelle reconnaissant l’égalité entre États et entre peuples, donc la seule instance légitime à œuvrer à la sécurité collective. Pourtant, elle est sapée par des manques financiers qui la rendent dépendante du bon vouloir de sociétés privées « partenaires », et par les puissances qui s’affranchissent du droit international. Précisons que les diverses agences de l’ONU fournissent au quotidien un travail essentiel et souvent de qualité. Et l’Assemblée générale de l’ONU porte des combats fondamentaux, au moins sur le plan symbolique (puisque les décisions de l’AG ne sont généralement pas contraignantes), comme la résolution condamnant l’agression russe de l’Ukraine l’a montré. Mais il n’en va en effet pas de même pour le Conseil de sécurité, organe où se cristallisent les rapports de forces géopolitiques bloquant souvent toute décision ambitieuse.

L’imposition par les États-Unis du droit de veto lors de la création de l’ONU s’est révélée néfaste. Les cas ukrainiens et birmans témoignent d’une instrumentalisation par la Russie et la Chine. D’autres situations, antérieures (comme la guerre en Libye où le mandat onusien portant sur la « responsabilité de protéger » et initialement accepté par la Chine et la Russie a été détourné en changement de régime par les puissances occidentales impliquées dont la France), ou actuelles (comme le conflit israélo-palestinien à propos duquel les États-Unis mettent leur veto à toute initiative contraignante obligeant Israël à respecter le droit international, ou la guerre au Yémen etc.), montrent que les régimes autoritaires comme la Chine et la Russie n’ont pas le monopole, au sein des membres permanents du Conseil, de l’instrumentalisation incapacitante de l’ONU. Menée sans l’aval de l’ONU, la guerre en Irak, pour n’en rester qu’à cet exemple dont les effets se font encore sentir puisque sans elles Daesh n’aurait pas existé, ou du moins pas en tant qu’organisation aussi déstabilisatrice, n’a pas été déclenchée par une dictature…

Ces instrumentalisations croisées ont fini par ruiner les espoirs de relance du Conseil de sécurité nés de la fin de la guerre froide. Mais les projets de réforme de l’ONU ont tous buté sur le réel, à commencer par la nécessité que les Etats, et notamment les membres permanents du Conseil de sécurité, les avalisent. Il n’y a donc pas de solution miraculeuse. Stopper le délitement du système de sécurité collective sera un combat long, opiniâtre, fait de milliers d’heures de négociations diplomatiques, de compromis, de réaffirmation des principes essentiels du droit international trop souvent bafoués etc. Raison pour laquelle nous reviendrons, au passage, sur l’érosion inacceptable des moyens de notre diplomatie (suppression de 53 % du personnel du ministère des Affaires étrangères en 30 ans), en commençant par abroger la suppression des corps diplomatiques voulue par Emmanuel Macron. En tout état de cause, sans renoncer au statut qui est le sien à l’ONU et qui constitue un point d’appui, la France doit porter des propositions pour renforcer cette organisation essentielle.

Si l’histoire montre que l’aboutissement de projets opérationnels de réforme de l’ONU sera en toute hypothèse long et incertain, la France peut en revanche dès à présent rejouer le rôle qui fut longtemps le sien de pays en quelque sorte non aligné. La diplomatie non alignée au cœur de notre programme n’est pas la neutralité. Elle implique notamment de dénoncer les puissances piétinant le droit international, quelles qu’elles soient. Les États-Unis quand c’est le cas, la Russie quand c’est le cas, etc. C’est un gage de crédibilité. Le multilatéralisme est universel ou n’est pas. Toute instrumentalisation l’affaiblit d’autant plus que le système de sécurité collective repose en grande partie sur la volonté des Etats de coopérer ou non.

Concernant l’ONU au sens strict, figurent parmi les mesures de notre programme : le refus par la France de toute intervention militaire sans mandat de l’ONU octroyé en toute indépendance vis-à-vis de l’OTAN (notamment) ; l’exigence de la transparence des délibérations du Conseil de sécurité de l’ONU ; la mise de moyens à la disposition de la formation d’une force militaire onusienne permanente, et de faire vivre le comité d’état-major de l’ONU, etc.

Mise en œuvre des sanctions contre la MOGE / Entreprises françaises   

Si vous êtes élu(e), quelle sera votre position au sujet des modalités de retrait de TotalEnergies et des entreprises françaises qui continuent d’être en lien avec des entreprises liées à la junte ? Plus largement, entendez-vous promouvoir l’application des lois existantes / et ou des réformes spécifiques visant à assurer qu’aucune entreprise française où qu’elle se trouve – ne puisse alimenter un régime criminel en toute impunité ? 

Notre proposition de résolution déposée à l’Assemblée nationale ne laisse aucune ambiguïté. Partant du constat que les efforts diplomatiques de la France n’ont pas abouti dans le dossier birman, elle « invite le gouvernement français : à pousser au renforcement des sanctions internationales contre la junte birmane en ciblant les revenus du gaz, première source de financement de la junte, (et) à rendre contraignant dans le droit français les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (UNGP), approuvés par consensus par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies en 2011, et à appuyer les négociations en cours à l’ONU pour un Traité contraignant les multinationales à respecter des normes sociales et environnementales exigeantes ». Cette proposition reprend celle de l’Equateur qui, en 2013, avait proposé avec le soutien de 84 gouvernements un instrument juridique contraignant pour les opérations des sociétés transnationales. Cette initiative n’a pas abouti à ce jour, faute notamment de soutien des grandes puissances (Chine,  membres de l’Union européenne, États-Unis, etc.).