Plateforme Logement pour tou.te.s

Tout au long de la campagne, de nombreuses organisations (associations, syndicats, collectifs, etc) sollicitent Jean-Luc Mélenchon pour qu’il détaille ses propositions sur des enjeux qui les concernent. L’équipe du programme et les groupes thématiques répondent, pour chacune de ces demandes, en développant des points précis de notre programme l’Avenir en commun.

Une trentaine d’associations, collectifs et syndicats (AFVS, AITEC, APPUI, ATMF, ATTAC FRANCE, BAGAGÉRUE, CGT, CNAFAL, CONSTRUIRE !, CONV. NAT. SERVICES PUBLICS, CNL, COPAF, CSP75, DAL, DIEL, FASTI, FLC ADEIC, FSU, FUIQP, SYND. UNIFIÉ BÂTIMENT RP CNT-F, UNION SYNDICALE SOLIDAIRES, MRAP, PAS SANS NOUS, SAF, UTOPIA56, SNPES PJJ, STOP PRÉCARITÉ…) se sont regroupés pour former la plateforme Logement pour tou.te.s afin de formuler leurs questions et revendications sur la thématique du logement, adressées aux candidats à l’élection présidentielle.

1. Souhaitez vous conduire  dans les 5 prochaines années une politique du logement pour permettre à toutes et tous d’accéder à  un logement décent, abordable, stable et durable, et par quels moyens  ?  

Le logement est la condition d’une vie digne. Il permet de pouvoir exercer quotidiennement son emploi, de jouir de la santé et du bien-être, de fournir à ses enfants un espace protégé où ils peuvent grandir et s’épanouir. Il constitue la base à partir de laquelle se projeter dans l’ensemble des dimensions de la vie.

Afin de rendre le droit au logement effectif, nous l’inscrirons dans la Constitution. Nous sortirons le logement et l’habitat des mécanismes du marché par un plan d’action volontariste qui démarrera dès le début du mandat. 

Notre feuille de route se décline en cinq priorités :

  • Contre les expulsions, « zéro sans-domicile  »
  • Mobiliser le parc privé pour les besoins prioritaires
  • Développer massivement un logement public et social de qualité
  • Rompre avec la spéculation foncière
  • Rénover le parc existant pour le mettre aux normes écologiques

2. Êtes vous d’accord pour relever les APL, soutenir le logement social et financer la construction massive de vrais logements sociaux et par quels moyens :

La construction massive de logements publics est essentielle pour répondre aux besoins et sortir de la crise que connaît le secteur du logement. Cet effort nécessite un engagement financier important de l’État. Il est inacceptable que certaines collectivités refusent de construire des logements sociaux et bloquent ainsi le renouvellement du bâti aux dernières normes écologiques, empêchant la bifurcation énergétique. Nous souhaitons promouvoir un modèle de logement social où les enjeux de qualité de la vie, de démocratie et de mixité sociale seront pris en compte. Nous proposons donc les mesures suivantes :

  • Produire un million de logements réellement sociaux (PLAI et PLUS) au rythme de 200 000 logements publics par an répondant aux critères écologiques, en augmentant notamment le mécanisme d’« aide à la pierre »
  • Produire 15 000 logements sociaux étudiants par an
  • Privilégier l’éco-construction pour la construction des logements sociaux en utilisant des matériaux non énergivores et de qualité (paille, terre crue, bois)
  • Instaurer un prêt à taux zéro pour les bailleurs sociaux par l’intermédiaire du pôle public bancaire. Allonger la durée des prêts fonciers et favoriser les baux emphytéotiques (de très longue durée) afin de favoriser la construction de logements très sociaux
  • Exonérer ou réduire certaines taxes et impôts, telle la taxe foncière, pour le logement social pour cause d’utilité publique
  • Augmenter la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC, 1 % logement) à 1 % de la masse salariale, contre 0,46 % aujourd’hui, et l’orienter vers l’investissement locatif social
  • Mettre à disposition les emprises publiques à un prix très inférieur au prix du marché pour le logement social
  • Augmenter à 30 % le quota minimum de logements sociaux dans la totalité du parc pour les communes soumises à une forte tension locative
  • Inclure dans les quotas de logements sociaux des minimums obligatoires de logements très sociaux et de logements accompagnés (résidences sociales, pensions de famille)
  • Punir plus sévèrement les maires qui ne respectent pas leurs obligations : augmentation des amendes et reprise systématique de la délivrance des permis de construire par le préfet de département
  • Dans les opérations neuves, introduire une obligation de 30 % de logements sociaux adaptés à la demande et aux besoins et de 40 % en zones tendues
  • Rendre plus justes et transparentes les attributions de logements, veiller au respect des obligations sociales dans ces procédures et permettre aux associations de mal logé·es de siéger dans les commissions d’attribution
  • Augmenter le nombre de représentant·es des locataires dans les conseils d’administration des organismes HLM. Pour pallier l’éloignement de la représentation, créer des organismes locaux d’expression et de participation des locataires HLM
  • Promouvoir le retour des gardien·nes d’immeubles dans le parc social, valoriser leur rôle vis-à-vis de la qualité de vie et du lien social

Concernant les APL :

  • Revaloriser les aides personnelles au logement (APL), revenir sur leur baisse de 5 euros et supprimer leur “contemporanéisation” (ou calcul en “temps réel »). Arrêter la ponction compensatoire sur les bailleurs sociaux (appelée RLS pour Réduction loyer solidarité) qui en découlait

3. Souhaitez vous réguler les marchés locatifs, immobiliers et fonciers, ainsi que les profits qui en sont issus et par quels moyens ?

Il est nécessaire que la puissance publique régule fortement le parc privé. Ces dix dernières années, les loyers ont augmenté de 29 % dans le parc HLM et de 44 % dans le secteur locatif privé. Fin 2019, près de la moitié des annonces de location dans une ville comme Paris ne respectaient pas l’encadrement théorique des loyers ! En effet, les commissions départementales de conciliation (CDC) ne sont presque jamais saisies et les sanctions sont inexistantes. Les prix doivent donc être directement et partout encadrés. Il n’est pas tolérable que le nombre de logements vacants continue à s’accroître dans le même temps : il y en a 3,1 millions, soit un million en plus depuis 2006. Même si, à terme, nous pensons que le logement public est la solution pour garantir le droit effectif au logement, dans l’immédiat, il faut que le parc privé participe à loger les plus modestes. Nous proposons :

  • Encadrer véritablement les loyers à la baisse, comme le demande l’association Droit au logement (DAL). Nous proposons de le faire autour du loyer médian dans les zones normales et en imposant une décote de 20 % au loyer médian dans les zones très tendues. Cet encadrement devra être contrôlé par la puissance publique avant la mise en location 
  • Renforcer le contrôle des collectivités locales en donnant le pouvoir aux maires d’appliquer les sanctions prévues en cas de non-respect de l’encadrement des loyers ou de locations touristiques illégales
  • Favoriser la participation des habitant·es à la politique locale du logement par la tenue d’une conférence citoyenne sur le logement à l’échelle des collectivités locales a minima la première année de mandat
  • Généraliser les mesures du type clauses anti-spéculatives et les chartes promoteurs, expérimentées par certaines communes (Montreuil, Bagneux, Ivry, Fontenay-sous-Bois, Saint-Denis, etc.), qui permettent d’encadrer les prix à la vente
  • Interdire les ventes à la découpe, les congés pour vente et mieux encadrer les congés pour reprise
  • Arrêter immédiatement les aides fiscales à l’investissement locatif privé
  • Limiter, par un régime d’autorisation, la transformation de logements en locations touristiques professionnelles, soumettre à l’impôt les plateformes comme Airbnb. Les locations de courte durée des logements des propriétaires occupant·es seront limitées à une durée de 60 jours par an
  • Imposer les hautes transactions immobilières
  • Lutter contre les marchands de sommeil et les bailleurs indélicats, rendre le « permis de louer » obligatoire dans les zones qui connaissent des situations d’habitat indigne. Ce dispositif permet de vérifier la qualité des logements avant leur mise en location. Renforcer les moyens de contrôle et les sanctions pénales à l’encontre de ces derniers
  • Supprimer les freins législatifs et réglementaires et assurer un cadre légal permettant le développement de l’habitat coopératif. Ce type d’habitat permet notamment de sortir le parc privé des logiques spéculatives
  • Imposer dans les constructions neuves que 100 % des logements soient accessibles comme prévu initialement par la loi handicap de 2005 et participer aux financements des travaux d’adaptation des logements anciens

Concernant la spéculation foncière :

  • Mettre fin à la dégressivité dans le temps de la taxe sur les plus-values foncières, mécanisme qui incite à la rétention du foncier disponible
  • Maîtriser les prix immobiliers dans le cadre des aménagements gérés par des agences foncières régionales. Dans les zones tendues, ces agences devront étudier la possibilité d’acquérir chaque terrain qui est mis en vente 
  • Développer un patrimoine foncier public échappant à la spéculation au niveau des collectivités, des établissements fonciers et des offices fonciers solidaires. La propriété du sol sera publique et l’usage sera loué aux particuliers, aux bailleurs privés et publics à travers des baux emphytéotiques
  • Favoriser la rénovation du bâti ancien en déshérence et la reconstruction de la ville sur la ville, notamment par le recensement obligatoire et la mobilisation des friches urbaines par chaque commune pour répondre à leur besoin de foncier sans empiéter sur les espaces agricoles et naturels
  • Créer un commissariat de l’aménagement qui interviendra comme financeur, coordinateur et conseiller technique dans les projets des collectivités. Il participera à la création de quartiers nouveaux correspondant aux besoins en logements et en équipement, respectant l’accessibilité pour tou·tes et les grandes orientations de la planification écologique, notamment sur le foncier encore disponible. Il constituera également un patrimoine foncier permanent mis à disposition pour du logement, sous forme de baux de longue échéance

4. Êtes vous prêts à faire respecter le droit à l’hébergement inconditionnel jusqu’au relogement, le droit au logement opposable, le relogement en cas d’expulsion, ainsi que toutes les lois qui protègent les locataires ? 

Le logement est essentiel à la dignité des personnes et conditionne l’accès à de nombreux autres droits. Pourtant, aujourd’hui, le droit de propriété lui est juridiquement et concrètement supérieur. C’est pourquoi il est possible en France d’expulser des personnes, des familles entières, sans aucune proposition de relogement. Cette situation doit cesser ! Notre objectif est celui du « zéro sans domicile, zéro mal logé·e ». Pour que personne ne dorme plus dans la rue, nous proposons les mesures suivantes :

  • Interdire les expulsions sans relogement
  • Faire la « sécurité sociale du logement » : mettre en place une garantie universelle des loyers pour favoriser l’accès de tou·tes au logement, par l’intermédiaire d’une caisse de solidarité nationale, comme le défend la Confédération nationale du logement (CNL). Cette caisse aura pour mission de couvrir les impayés de loyers. Elle sera gérée conjointement par des représentant·es des locataires et des bailleurs, respectivement élu·es par leurs pairs 
  • Garantir un droit effectif à l’hébergement dans des conditions dignes et adaptées, quelles que soient les conditions de séjour
  • Augmenter les contingents d’attribution de logements sociaux pour les personnes dont le droit opposable au logement (DALO) a été reconnu et pour les autres personnes prioritaires
  • Créer 20 000 places d’hébergement d’urgence pour les femmes victimes de violence
  • Revaloriser les aides personnelles au logement (APL), revenir sur leur baisse de 5 euros et supprimer leur “contemporanéisation” (ou calcul en “temps réel »). Arrêter la ponction compensatoire sur les bailleurs sociaux (appelée RLS pour Réduction loyer solidarité) qui en découlait
  • Produire 20 000 logements par an en résidences sociales, comme les pensions de famille, pour renforcer le logement accompagné en substitution à l’hébergement d’urgence et développer l’accompagnement pluridisciplinaire (jeunes parents, personnes qui sortent de la rue, personnes ayant une addiction, etc.)
  • Sanctionner les syndics qui ne remplissent pas leurs obligations envers les locataires ou propriétaires habitant·es (chauffage, accès à l’eau, isolation, lutte contre les nuisibles, respect des normes, disponibilité…)

Concernant l’inconditionnalité de l’hébergement :

  • Nous réaffirmerons le principe d’inconditionnalité de l’hébergement par circulaire. Ce principe a en effet été mis à mal durant le mandat d’Emmanuel Macron. Par exemple, le 6 janvier 2022, à Strasbourg, la police aux frontières a effectué une descente dans un gymnase qui hébergeait pour l’hiver 80 personnes sans domicile fixe. Pour mettre fin à cette politique inhumaine et indigne, le gouvernement enjoindra les préfets à cesser les contrôles de situation administrative au sein et aux abords des structures d’hébergement et de celles visant à répondre aux besoins de première nécessité des ménages (aide alimentaire, accès à la domiciliation, etc.). Cette circulaire rappellera également que les associations qui hébergent les personnes sans domicile n’ont pas pour mission la mise en œuvre de la politique migratoire et que, de ce fait, aucun concours de leur part ne peut être sollicité pour des opérations ayant pour objet son application.

5. Êtes vous décidés à mener une politique de mobilisation des logements vacants, via des mesures d’encouragement à la location pour les petits propriétaires, une hausse de la taxe d’inhabitation et la réquisition des logements de riches propriétaires ?  

Face au scandale des logements vacants, nous proposons :

  • Mener une politique active de lutte contre les logements vacants pouvant aller jusqu’à la réquisition. Il s’agira d’utiliser (et de pouvoir faire en sorte que les collectivités puissent les utiliser) tous les outils à notre disposition pour investir les logements vacants (conseils juridiques, droit de préemption, expropriation, …)
  • Augmenter la taxe sur les logements vacants en zones tendues à 50 % la première année et à 100 % la seconde
  • Faire des biens en déshérence un patrimoine public après 10 ans, au lieu de 30 aujourd’hui
  • Utiliser l’ensemble des dispositifs possibles pour mobiliser le parc privé pour loger des ménages modestes : intermédiation locative, mesures incitatives pour les propriétaires comme le propose la Fondation Abbé Pierre, et réquisitions