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Notre constat : Le modèle agro-industriel malmène l’écosystème, la santé, les paysan·nes et les animaux 

L’agriculture fournit l’essentiel de notre alimentation. Or le modèle agro-industriel actuel malmène tout : l’écosystème, la santé des consommateur·ices, celle des paysan·nes et le bien-être des animaux. 

Les maux sont connus : soumission au libre marché et au libre-échange, ultra-spécialisation, gigantisme agricole, pesticides chimiques, élevage intensif ou pression sur la ressource en eau. 

L’ensemble du système agricole et alimentaire est responsable de plus d’un tiers du réchauffement climatique global, contribue à la déforestation, repose sur l’utilisation de ressources non renouvelables, contamine l’eau, l’environnement et les êtres humains et contribue à la destruction des sols et de la biodiversité. 

Près d’un milliard de personnes dans le monde souffrent de la faim, alors que la malbouffe et l’obésité progressent. À terme, ce système met à mal notre capacité à nourrir l’humanité.

En France, l’agriculture génère des centaines de milliers d’emplois directs et indirects, et participe à l’aménagement et à la dynamisation des territoires ruraux. Cependant, le modèle agricole productiviste actuel et le système alimentaire qui l’accompagne ne répondent plus à l’intérêt général, que ce soit sur les plans économique, social, écologique ou de santé publique.

En regardant simplement la qualité de la production alimentaire qui termine dans nos assiettes, il est évident que le modèle actuel ne remplit pas ses fonctions essentielles. L’alimentation d’une grande partie de la population est déséquilibrée du point de vue nutritionnel : excès de sucre, sels,  acides gras trans et protéines animales sont devenus la norme. Cette alimentation repose trop souvent sur la consommation de produits de faible qualité, contenant en outre des résidus de pesticides et additifs alimentaires dangereux pour la santé. Surpoids, obésité, cancers et allergies deviennent de véritables questions de santé publique, notamment chez les jeunes et les catégories sociales les plus défavorisées. Le système alimentaire est aujourd’hui dominé par une logique d’accumulation des profits, soutenue par une publicité massive et trompeuse. Elle pousse à la surconsommation de certains produits ultra-transformés nocifs et génère une quantité considérable de gaspillages, que ce soit en produits alimentaires ou en emballages. Ce système n’est pas capable non plus de résorber la précarité des Français·es qui ont recours à l’aide alimentaire. Ces 8 millions de personnes, quand elles ne sont pas simplement contraintes à se passer de repas, ne sont pas en capacité de choisir leur alimentation. Elles sont finalement considérées comme une filière pour écouler la production de l’agro-industrie. 

La production agricole se concentre dans un nombre de plus en plus réduit d’exploitations. Plus de la moitié des exploitations et des emplois agricoles ont disparu en 25 ans – dont 100 000 exploitations au cours des 10 dernières années – et 200 000 exploitant·es supplémentaires partiront en retraite d’ici à 2030 !

La libéralisation des marchés, la baisse des prix payés aux producteur·ices et la captation d’une grande partie de la valeur ajoutée par les firmes de l’amont et de l’aval engagent les agriculteurs et agricultrices dans une folle « course à la compétitivité ». Les plus grandes exploitations s’agrandissent encore davantage en acquérant les terres de celles et ceux qui ont été exclu·es. Un processus de financiarisation de l’agriculture s’est engagé depuis une dizaine d’années avec la multiplication du nombre d’exploitations sous forme sociétaires et des investissements de holdings financières. La spécialisation régionale dans la production de matières premières agricoles à bas prix, l’utilisation intensive de moyens de production et l’abandon progressif de secteurs exigeants en travail comme celui des fruits et légumes ont conduit à une diminution de la valeur ajoutée agricole de la France depuis vingt ans et de son autonomie alimentaire. L’utilisation d’une partie des surfaces productives pour de « l’agrivoltaïsme », de la méthanisation industrielle ou la production d’« agrocarburants » aggrave encore cette situation, prospérant sur la misère des prix payés aux paysan·nes.

La majorité des agriculteur·ices sont victimes de ce modèle. Bon nombre d’entre elles et eux s’endettent, connaissent la précarité et cessent leur métier. Certain·es sont si dévasté·es qu’il y a trois fois plus de suicides chez les agriculteur·ices que dans le reste de la population. De nombreux jeunes renoncent à s’installer du fait de la difficulté d’accéder au foncier, du montant des investissements nécessaires, des perspectives incertaines de revenu et de l’absence de soutien public. Nous assistons à une situation absurde de « paysan·nes sans terres » sur notre territoire, alors que le chômage atteint des records. 

Ce modèle hyper intensif constitue une impasse écologique  : il est responsable de la pollution de l’environnement et de la contamination des aliments par l’usage de pesticides, d’engrais azotés et par le recours aux antibiotiques. Il détruit la fertilité des sols, les habitats naturels et la biodiversité, il pose aussi de graves déséquilibres par l’accaparement de la ressource en eau et la perturbation du cycle de l’eau, provoquant de nombreux conflits d’usage d’une ressource précieuse. Il constitue également un danger pour la santé des travailleur·ses de l’agriculture et de la population. Basé sur un usage massif de ressources non-renouvelables, il contribue largement au dérèglement climatique par son utilisation d’énergie fossile pour la synthèse des engrais et par ses émissions de protoxyde d’azote et de méthane. 

Dans ce modèle productiviste, les animaux sont traités comme des marchandises, au mépris de leurs besoins et des exigences de leur bien-être. Mutilations, cages, absence d’accès au plein-air ou ultra-densité : 80 % des animaux d’élevage subissent la violence inacceptable de l’élevage intensif. Cette violence se répercute sur les éleveur·ses, les salarié·es agricoles, sur l’environnement et sur l’ensemble de la société. Ce système représente aussi un danger sanitaire majeur : l’élevage intensif et la déforestation qu’il entraîne sont deux des causes majeures de l’émergence et de la diffusion des zoonoses, ces maladies qui, comme le Covid-19, se transmettent des animaux sauvages aux humains.

La politique agricole commune (PAC) ne permet plus la régulation des marchés, comme le montre la fin des quotas laitiers et sucriers. Les subventions restent dépendantes de la taille des exploitations, ce qui favorise les plus grandes et accélère l’expansion d’une agriculture productiviste. Les traités européens poussent à l’internationalisation de l’agriculture et imposent le libre-échange. En France, le renoncement à la politique des structures et la faiblesse de la politique foncière favorisent aussi la concentration de la production. Dans le même temps, le foncier agricole est rongé par l’urbanisation, ce qui constitue une menace pour la sécurité alimentaire de long terme.

La libéralisation menée par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et les accords de libre-échange mettent en concurrence les agriculteurs et agricultrices des différentes régions du monde alors que les différences de productivité et de subventions agricoles sont gigantesques. Nombre de paysanneries sont condamnées à la crise et ne peuvent assurer leur sécurité alimentaire. Elles sont menacées par les stratégies de mainmise sur les semences et d’accaparement de terres pour la production d’agrocarburants et d’autres cultures destinées à l’exportation menées par les entreprises multinationales. Les aides à l’agriculture des pays riches contribuent à des exportations à bas prix et à la crise de l’agriculture des pays du Sud. Les conséquences sont connues : pauvreté, exode rural et migrations. 

Face à ce modèle, de multiples initiatives d’agriculture paysanne de qualité, d’agriculture biologique et de circuits courts de proximité se développent. Elles montrent que d’autres formes d’agriculture tournées vers l’intérêt général sont possibles. Mais une agriculture duale avec, d’un côté, une grande agriculture productiviste censée être « compétitive » sur le marché mondial, et, de l’autre, une agriculture de niche, écologique et de qualité pour une minorité de consommateurs et de consommatrices plus favorisé·es ne peut exister durablement. En réalité, ces deux agricultures sont bien en compétition pour l’accès au foncier, aux marchés et aux subventions publiques. La première se développe en marginalisant la seconde.

Notre projet : Une production alimentaire locale, respectueuse du bien-être des animaux, rémunératrice et accessible

Nous portons un projet de rupture avec le modèle agro-industriel dominant actuel. L’action politique ne peut plus être guidée par l’objectif de produire toujours plus, sans se soucier des conséquences écologiques ni de la faim qui continue de sévir en France et dans le monde.

Nous portons un projet alimentaire et agricole d’intérêt général. Notre objectif est d’éradiquer la faim, la précarité alimentaire, les maladies dues à la malbouffe et d’assurer notre souveraineté alimentaire, durement fragilisée par Emmanuel Macron et par des décennies de néolibéralisme et d’inaction climatique et environnementale. Nous voulons construire un système alimentaire démocratique et soutenable qui offre à tou·tes une garantie universelle d’accès à une alimentation saine et choisie. Il est fondé sur une agriculture écologique et paysanne, respectueuse du bien-être des animaux, avec des paysan·nes nombreux·ses, justement rémunéré·es, et des fermes à taille humaine.

Le droit à l’alimentation doit être enfin effectif en France et chacun doit avoir accès à une alimentation saine et choisie. C’est pourquoi nous augmenterons massivement le pouvoir d’achat populaire, nous encadrerons les prix, nous faciliterons l’accès à la restauration collective, nous développerons les projets alimentaires territoriaux et nous expérimenterons une garantie universelle d’accès à des aliments choisis, premier jalon vers une sécurité sociale de l’alimentation.

L’industrie agroalimentaire ne peut plus faire la loi dans nos assiettes et dans nos champs. Nous l’encadrerons pour sortir de la malbouffe, en interdisant les additifs et les pesticides les plus dangereux, en renforçant l’information des consommateurs et consommatrices ou encore en encadrant ses marges. 

Notre projet implique de créer les conditions d’une activité agricole rémunératrice, digne et attractive, de faciliter l’accès à la terre pour les paysan·nes, et de créer rapidement au moins 300 000 nouveaux emplois agricoles. C’est pourquoi nous garantirons des prix rémunérateurs par des prix planchers, nous conduirons une réforme agraire pour faciliter l’accès au foncier, nous sécuriserons le parcours de désendettement des agriculteurs et agricultrices et nous appliquerons nos normes de production à l’importation ainsi que des prix minimums d’entrée. 

L’urgence climatique, environnementale et sanitaire (zoonoses) nous presse de ramener notre système agricole et alimentaire dans les limites planétaires. La souffrance animale massive et banalisée qui est la règle dans les élevages intensifs où les animaux sont traités comme des marchandises est inacceptable. C’est pourquoi nous planifierons une révolution agroécologique de nos méthodes de production, nous relocaliserons les productions sur les territoires, nous stopperons l’artificialisation des terres et nous sortirons de l’élevage intensif, en accompagnant les agriculteur·ices dans la transition.

Notre projet nécessite donc de rénover l’organisation de l’État et ses soutiens financiers à l’agriculture. C’est pourquoi nous transformerons radicalement la politique agricole commune et nous ferons la révolution citoyenne dans les structures agricoles aussi. 

Au niveau international, nous voulons contribuer à la sécurité alimentaire mondiale, à la protection et au développement des paysanneries et à la bifurcation écologique de l’agriculture et des systèmes alimentaires. Notre projet implique de ne plus déstabiliser les marchés des pays étrangers par des exportations massives subventionnées et d’affirmer le principe de souveraineté alimentaire des paysan·nes, des États et des régions, en s’appuyant notamment sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysan·nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.

Nos propositions : Révolutionner le système agricole et alimentaire

Une alimentation saine et durable accessible pour tou·tes 

Une bonne alimentation est le corollaire d’une vie en bonne santé. Elle doit être garantie et accessible pour tou·tes. Pour atteindre cette accessibilité garantie à une alimentation saine et durable, nous proposons les mesures suivantes : 

  • Augmenter massivement le pouvoir d’achat populaire, notamment en portant le SMIC à 1400 euros net par mois et en créant pour tou·tes une garantie d’autonomie de 1063 euros net par mois
  • Bloquer les prix d’une liste de produits alimentaires de première nécessité, garantir en permanence l’accès à 5 fruits et légumes de saison à prix bloqués, notamment en s’inspirant du bouclier qualité-prix aujourd’hui en vigueur dans les Outre-mer. Les prix fixés tiennent systématiquement compte de la nécessité d’assurer des prix rémunérateurs aux agriculteur·ices par l’application de prix planchers
  • Engager la gratuité des cantines scolaires
  • Planifier la transition vers une restauration collective 100 % biologique et locale, avec une option végétarienne quotidienne et un menu hebdomadaire végétarien pour tous les usager·es
  • Revoir la gouvernance du Conseil national de la restauration collective (CNRC) de façon à ce que la majorité des sièges soient attribués à des expert·es en santé publique et non à des lobbies agroalimentaires comme aujourd’hui ; revoir les menus en restauration collective en conséquence
  • Soutenir la création ou le maintien de postes d’aides-cuisinier·es dans la restauration collective pour permettre la consommation de produits agricoles non préparés, plus végétaux et augmenter la part des produits frais dans la confection des repas
  • Lancer une expérimentation visant à une garantie universelle d’accès à des aliments choisis, premier jalon vers une sécurité sociale de l’alimentation
  • Sanctuariser et tripler le budget consacré aux projets alimentaires territoriaux (PAT) pour développer partout les outils nécessaires à l’adaptation de la production alimentaire aux besoins locaux et aux exigences écologiques (magasins de producteur·ices, marchés d’intérêt national, ateliers de transformation, abattoirs…) ; consacrer un tiers de ce budget aux PAT d’initiative citoyenne ; inclure au moins 25 % de citoyen·nes dans la gouvernance des PAT

Une industrie agroalimentaire encadrée pour sortir de la malbouffe

Notre système alimentaire doit s’affranchir des lobbys de l’agroalimentaire, et la législation doit encadrer la qualité des aliments produits, notamment les produits transformés, et promouvoir un système d’information clair des consommateur·ices sur le contenu et la qualité des aliments sur l’ensemble des emballages. Dans la chaîne de la production agroalimentaire, les réseaux de distribution on pris une importance considérable, notamment la grande distribution qui représente 70 % de nos achats alimentaires. Elle a également capté 15,3 % de la valeur ajoutée alors qu’il en reste à peine 6 % pour les agriculteurs et agricultrices. Il est impératif de rééquilibrer cette répartition des marges et des revenus, en libérant producteur·ices et consommateur·ices du poids des cartels, grâce au contrôle des services de l’État. Nous proposons donc les mesures suivantes pour encadrer l’industrie agroalimentaire et sortir de la malbouffe : 

  • Interdire d’urgence les additifs les plus controversés, notamment le nitrite de sodium et le nitrate de potassium, limiter la liste des additifs autorisés à ceux admis dans l’agriculture biologique
  • Fixer des taux maximaux de sel, de sucre et d’acide gras saturés dans les aliments transformés sur la base des normes de l’Organisation mondiale de la santé
  • Fixer un objectif de réduction de 50 % de la consommation moyenne de protéines animales
  • Rendre le Nutri-Score (étiquetage qui indique la valeur nutritionnelle) obligatoire pour en finir avec la désinformation de la grande distribution
  • Compléter le Nutri-Score avec l’indicateur NOVA, qui classe les aliments de « peu ou pas transformés » à « ultra-transformés »
  • Proposer un étiquetage des produits en fonction de leur effet sur la biodiversité, sur le climat, l’utilisation de pesticides, et la prise en compte du bien-être animal
  • Remplacer la charte alimentaire du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) à destination des acteurs de l’audiovisuel et de la publicité, non contraignante, par un dispositif législatif clair
  • Interdire la publicité alimentaire sur tous les supports (radiophonique, audiovisuel et numérique) à destination des enfants et adolescent·es
  • Pour contrôler l’application des mesures précédentes, rétablir les postes supprimés ces dernières années à la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF)
  • Faire du Programme national nutrition santé le cadre du développement de la politique alimentaire pour une alimentation saine et durable accessible à tou·tes
  • Augmenter le budget de communication du Programme national nutrition santé, notamment pour sensibiliser à une alimentation plus saine, intégrant davantage de céréales, de protéines végétales, de fruits et de légumes, moins de protéines animales et respectant le cycle des saisons. Ce budget n’est actuellement que de 4 millions d’euros par an, contre 2,4 milliards d’euros investis par le secteur de l’alimentation dans les médias
  • Créer une heure hebdomadaire d’éducation à l’alimentation de la maternelle au collège
  • Mettre en œuvre un plan de réduction de 50 % du gaspillage alimentaire sur trois ans et de recyclage de 100 % des produits d’emballage
  • Interdire les perturbateurs endocriniens dans les emballages et contenants alimentaires et en finir avec la pratique du suremballage dans la grande distribution
  • Interdire le plastique en restauration collective pour la cuisson, réchauffe et liaison chaude
  • Refonder les critères permettant le développement de nouvelles grandes et moyennes surfaces (GMS) pour les soumettre aux objectifs de zéro artificialisation nette des sols et de préservation des petits commerces, tout en prenant en compte les GMS déjà existantes
  • Développer les circuits courts pour réduire la circulation des marchandises et l’utilisation d’emballages
  • Créer un réseau de coopératives de consommateur·ices en circuits courts (Amap, supermarchés coopératifs, etc) et soutenir un plan de développement des coopératives de producteur·ices. Dans le cadre de l’expérimentation d’une garantie universelle d’accès à des aliments choisis, premier jalon vers une sécurité sociale de l’alimentation, aller vers le conventionnement de ces structures.
  • Plafonner les marges de la grande distribution par un coefficient multiplicateur limité pour garantir des prix rémunérateurs aux paysan·nes et des prix accessibles aux consommateur·ices
  • Interdire entièrement les ventes à perte
  • Reconnaître le droit des organisations de producteur·ices de négocier collectivement les contrats avec l’aval (volumes et prix de vente)
  • Réserver le statut coopératif – dont découle un régime fiscal très favorable – aux seules coopératives de taille humaine et réellement gouvernées par leurs adhérent·es

Une activité agricole écologique et rémunératrice pour une vraie souveraineté alimentaire 

Près de 50 % des agriculteur·ices seront à la retraite dans 10 ans, soit environ 200 000 actifs et actives agricoles et seul un départ sur trois est remplacé. En parallèle, un nombre croissant de personnes non issues du milieu agricole souhaitent s’installer en agriculture mais se heurtent à un déficit d’accompagnement et de soutien dans la mise en place de leur projet. Notre objectif est de créer au moins 300 000 nouveaux emplois agricoles sur des projets agro-écologiques et vivriers, dans des conditions de rémunération dignes, en limitant la concentration des terres et la course à l’agrandissement. Ces installations ne pourront être pérennisées que si des prix rémunérateurs sont enfin garantis aux agriculteurs et agricultrices, les libérant ainsi de l’angoisse des fluctuations de prix ou des échéances de remboursement. Pour cela nous proposons les mesures suivantes :

Protéger les revenus des paysan·nes

  • Garantir des prix rémunérateurs aux agriculteur·ices par des prix planchers. Les prix planchers seront fixés chaque année par le Ministère de la Production alimentaire, à l’issue d’une conférence sur les prix rassemblant producteur·ices, fournisseurs et distributeurs. Les prix planchers seront fixés pour des volumes plafonnés par actif·ve agricole
  • Appliquer nos normes de production aux produits importés et mettre en place des prix minimums d’entrée à l’importation
  • Relever les retraites agricoles au niveau du SMIC revalorisé (1 400 euros net par mois) pour une carrière complète, y compris pour les retraité·es actuel·les
  • Créer une caisse de défaisance pour reprendre la dette agricole de celles et ceux qui s’engagent au travers d’un contrat de transition à passer au 100 % bio
  • Fixer par décret le taux d’intérêt maximal des prêts consentis par les coopératives aux paysan·nes
  • Réduire les droits fixes à payer dans le cadre des redressements judiciaires
  • Donner accès à tous les actif·ves agricoles non-salarié·es au statut d’agriculteur·ice et à une véritable protection sociale
  • Mettre en place un soutien aux mécanismes d’entraide et de remplacement afin de reconnaître le droit à des congés
  • Améliorer le statut des salarié·es de l’agriculture et de l’agroalimentaire à travers la revalorisation des salaires et l’amélioration des conditions de travail
  • Appliquer l’intégralité des règles nationales de rémunération du travail (y compris des cotisations sociales) à l’ensemble des salarié·es de l’agriculture et de l’agroalimentaire travaillant en France pour éradiquer le dumping causé par le travail détaché

Faciliter l’accès au foncier et l’installation de projets écologiques et paysans

  • Créer des établissements publics fonciers ruraux (EPFR) pour refonder et élargir les missions des actuelles Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER), au service d’une plus grande cohérence entre les divers instruments, d’une politique favorable au développement de l’agriculture écologique et paysanne et de la baisse du prix du foncier. La politique de préemption s’étend aux parts de société en cas de vente ou de cession, ou encore lors du démantèlement d’une société
  • Réformer la gouvernance de ces nouvelles structures pour y intégrer pleinement les représentant·es de la société civile, dont les associations de consommateur·ices, de préservation de l’environnement ou de protection des animaux
  • Renforcer les moyens financiers des nouveaux EPFR pour accroître leur capacité de stockage du foncier et leur permettre de conserver les terres aussi longtemps que nécessaire, afin d’assurer qu’elles sont utilisées pour des projets agricoles vertueux pour l’environnement et le territoire. Pour cela, affecter une part des taxes locales aux EPFR afin de les doter de ressources propres. 
  • Conditionner les nouvelles autorisations d’exploiter lors d’un projet d’installation, d’agrandissement par location, d’achat de terres ou de transferts de parts d’une société à une surface maximale d’exploitation par actif·ve et par type de production
  • Renforcer les moyens des structures de développement agricole et d’accompagnement à l’installation comme les Organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR)
  • Revaloriser à hauteur de 100 % du SMIC les indemnités de formation professionnelle agricole pour stagiaires adultes engagés dans un projet d’installation agro-écologique
  • Soutenir massivement les installations paysannes en révisant les critères d’accès aux aides à l’installation de la PAC et en augmentant significativement tout au long du mandat le budget consacré à l’accompagnement de l’installation (voir partie 5)

Des méthodes de production adaptées : une production écologique et respectueuse du bien-être des animaux

Nous mettrons en œuvre un plan national visant à accompagner l’ensemble des agriculteur·ices dans la bifurcation écologique de l’agriculture, l’adaptation au changement climatique et la sortie de l’élevage industriel. Cette transition devra ramener notre système alimentaire dans les limites planétaires, rendre les exploitations agricoles plus économes et autonomes et tenir pleinement compte du bien-être des animaux d’élevage. Elle se traduira notamment notamment par les mesures suivantes : 

Protéger l’écosystème et la biodiversité

  • Interdire immédiatement les pesticides les plus dangereux pour la santé humaine et pour l’environnement, notamment les néonicotinoïdes, le glyphosate et les fongicides SDHI (qui empêchent le développement des champignons, dont plusieurs études tendent à démontrer la toxicité)
  • Planifier la réduction progressive des doses d’engrais et de pesticides chimiques de synthèse et leur taxation croissante au cours du temps via la redevance sur les pollutions diffuses et sur l’utilisation des intrants ; atteindre une réduction de l’utilisation des engrais et des pesticides chimiques de synthèse de 50% d’ici 2030
  • Établir des zones-tampons excluant l’usage de pesticides à moins de 200 mètres des habitations et des lieux recevant du public, tels les écoles et les hôpitaux ; renforcer la protection des points de captage d’eau potable et de leurs aires d’alimentation
  • Planifier l’augmentation des surfaces en agriculture biologique et en infrastructures agro-écologiques
  • Atteindre un système agricole 100 % biologique au plus tard en 2050
  • Réviser le processus d’autorisation des pesticides pour que la toxicité à long termes des formulations complètes de pesticides soit évaluée
  • Interdire tous les OGMs, y compris les « OGMs cachés » (variétés rendues tolérantes aux herbicides issues de mutagenèse in vitro…) et les nouvelles techniques génomiques (NBT)
  • Consacrer les moyens nécessaires au développement des légumineuses pour l’alimentation humaine et animale, notamment au travers des aides couplées de la PAC
  • Réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture, renforcer les puits de carbone naturels et atteindre au moins la neutralité carbone des secteurs de l’agriculture et de l’utilisation des terres agricoles
  • Mettre en place d’un plan de protection généralisée du foncier agricole, forestier et naturel, s’inspirant de la Loi Littoral, en vue de mettre en oeuvre le « zéro artificialisation nette » des sols dès 2025
  • Dans ce cadre, fixer pour règle générale l’interdiction de l’artificialisation et de l’urbanisation des espaces agricoles et naturels ; des exceptions à cette règle générale pourront être décidées, sur proposition des collectivités locales ou de l’État, par les Commissions départementales de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) selon des critères cumulatifs précis et strictement limités justifiant une déclaration d’utilité publique ; ces critères seront : la nécessité d’infrastructures publiques ou de logement, l’impossibilité de réaliser les travaux sur les espaces urbains et l’impossibilité ou la non-pertinence de réaliser les travaux sur des terres peu fertiles
  • Appliquer nos normes de production aux produits importés
  • Mettre en oeuvre un moratoire sur la méthanisation industrielle et les méga-bassines destinées à l’irrigation

En finir avec la maltraitance animale 

  • Interdire les fermes-usines, planifier la sortie de l’élevage intensif au plus tard en 2027 et réduire la production de protéines animales, en accompagnant les agriculteur·ices dans la transition
  • Déterminer de nouvelles normes pour améliorer les conditions d’élevage (accès à l’air libre obligatoire, pâturage, densité, surface minimale, réduction des cheptels, fin des souches à croissance rapide, objectif d’autonomie alimentaire…)
  • Interdire les mutilations et pratiques cruelles (élevage en cages à horizon 2025, broyage ou gazage des poussins et canetons, ablation de la queue, épointage des becs, meulage des dents…)
  • Budgéter une aide à la transition pour les éleveur·ses industriel·les se convertissant à l’élevage paysan ou aux cultures végétales
  • Assurer l’application effective de la réglementation sur le transport des animaux et la renforcer ; limiter le temps de transport des animaux à 8 heures et 4 heures pour les animaux plus fragiles (volaille, lapins, animaux en « fin de carrière »…), interdire les exportations d’animaux vivants hors de l’UE
  • Assurer l’application effective de la réglementation sur les conditions d’abattage et la renforcer, afin de limiter au maximum la souffrance animale et de créer les conditions pour rendre possible l’abattage à la ferme
  • Abroger les 2 arrêtés influenza aviaire du 30 septembre 2021 qui menacent sérieusement l’existence de l’élevage plein air

Une organisation et un soutien financier de l’État rénovés

 L’organisation de l’État et le soutien financier à la production alimentaire nationale doivent être entièrement libérés de la pression des lobbys agro-industriels et consacrés à la transition vers des systèmes agricoles écologiques. Nous proposons donc les mesures suivantes :

Refondre radicalement le budget de la politique agricole commune

  • Réviser le Plan stratégique national (le document de programmation budgétaire de la PAC) qui régit la distribution de plus de 10 milliards d’euros, soit en moyenne 30 000 euros par an et par agriculteur·ice bénéficiaire ; une révision d’urgence s’appliquera dès 2023 et précédera une révision en profondeur pour la PAC post-2023
  • Dans un contexte de prix agricoles rémunérateurs, engager la sortie du système actuel d’aides à l’hectare pour aller vers un système de contrats de transition agro-écologique et de paiements pour services environnementaux et spécifiques (installation, projets territoriaux…) à l’actif·ve
  • Plafonner les aides aux plus grandes exploitations
  • Renforcer les aides aux petites et moyennes exploitations en doublant le paiement redistributif et en le distribuant de façon progressive; permettre aux petites exploitations d’accéder à l’aide forfaitaire aux petites fermes 
  • Renforcer la protection des travailleur et travailleuses agricoles en confirmant la mise en oeuvre de la « conditionnalité sociale » des aides de la PAC dès 2023
  • Tripler le budget consacré à l’installation des jeunes et des nouvelles et nouveaux agriculteur·ices (y compris au-delà de 40 ans), réviser les critères d’attribution pour favoriser les projets agroécologiques, la diversification des activités du territoire et la souveraineté alimentaire, les démarches collectives ; supprimer la bonification dotation jeunes agriculteurs (DJA) pour investissement
  • Doubler le budget consacré à la conversion et au maintien en agriculture biologique
  • Tripler le financement des mesures agro-environnementales et climatiques et renforcer le financement des infrastructures agro-écologiques (haies, mares, bois, bandes fleuries…) favorables à la biodiversité, de l’agroforesterie ou des systèmes d’élevage herbagers tenant compte des limites de densité soutenables
  • Supprimer le financement consacré aux labels s’apparentant à du greenwashing comme le label Haute valeur environnementale et supprimer le financement public de la PAC aux assurances privées
  • Renforcer l’égalité entre les territoires par la poursuite de la convergence interne et du soutien aux zones soumises à des contraintes naturelles (montagne, zones sèches…)
  • Renforcer, notamment par les aides couplées, le soutien aux « oublié·es de la PAC », en particulier l’arboriculture, le maraîchage diversifié sur de petites surfaces ou la production de légumineuses à destination de l’alimentation humaine et animale
  • Créer un budget réservé à la transition vers des systèmes d’élevage respectueux du bien-être animal

Mettre les institutions au service de la bifurcation écologique de l’agriculture – dans l’agriculture aussi, faire la révolution citoyenne 

  • Créer un Ministère de la Production alimentaire pour remplacer le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation et mettre résolument le système agricole au service d’une politique de production alimentaire durable
  • Transformer les Chambres d’agriculture en Chambres de la production alimentaire, réformer leur gouvernance pour garantir la représentation d’une diversité d’acteur·ices (agriculteur·ices, salarié·es, collectivités, associations de défense de l’environnement, du bien-être animal et des consommateur·ices…) afin de les mettre entièrement au service de la transformation écologique du système alimentaire
  • Créer des Établissements publics fonciers ruraux (EPFR) pour refonder le fonctionnement des SAFER (voir partie 3)
  • Libérer la recherche agronomique du poids des lobbys privés au moyen d’un financement public à 100 % des activités de l’Institut national de la recherche agronomique et environnementale (INRAe), des universités et autres institutions publiques de recherche travaillant dans le domaine agricole (IRD, etc.) ; augmenter leurs dotations et résorber la précarité en leur sein ; modifier la composition de leurs conseils d’administration et revoir leur lettre de mission
  • Créer un service public vétérinaire et phytosanitaire sur le modèle des centres de santé municipaux, indépendant des lobbys pharmaceutiques, renforçant les approches préventives et permettant aux agriculteurs et agricultrices d’accéder à des soins vétérinaires et à des conseils phytosanitaires de qualité à des tarifs abordables
  • Adapter les formations dispensées dans l’enseignement agricole aux nécessités de la bifurcation écologique de l’agriculture et du système alimentaire
  • Augmenter le nombre de lycées agricoles publics, y rétablir les postes supprimés et rétablir le bac professionnel en 4 ans

Une coopération internationale qui protège les agricultures locales et assure la souveraineté alimentaire partout dans le monde

Le modèle agricole français et européen actuel a un impact écologique et social sur les paysanneries mondiales qui n‘est plus supportable. Pour mettre fin à cette situation, il est nécessaire de poser les bases d’une véritable coopération internationale synonyme de solidarité et de souveraineté alimentaire pour tous partout dans le monde. Nous proposons donc de :

  • Instaurer un protectionnisme écologique et solidaire en fonction des conditions de production et de rémunération du travail agricole, généraliser les importations de produits issus du commerce équitable, appliquer nos normes de production aux produits importés et mettre en place des prix minimum d’entrée à l’importation, y compris au sein de l’UE
  • Mettre en échec les accords de libre-échange et de partenariat économique en cours de négociation (Mercosur…) et sortir de ceux déjà négociés par l’UE
  • Favoriser les accords de coopération avec les États mettant en œuvre des politiques de souveraineté alimentaire, de défense et de soutien à l’agriculture paysanne (réformes agraires et mise en œuvre des directives sur le foncier, notamment), de bifurcation écologique de l’agriculture
  • Défendre de façon intransigeante les appellations d’origine dans le cadre du protectionnisme écologique et solidaire
  • Renégocier la politique agricole commune, y compris l’Organisation commune des marchés, pour en finir avec le libre-échange généralisé, désobéir lorsque c’est nécessaire
  • S’engager à ne plus déstabiliser les marchés des pays étrangers par des exportations subventionnées massives
  • Mettre fin aux pressions exercées sur les pays du Sud pour libéraliser leurs marchés alimentaires (FMI, Banque mondiale, conditionnalités de l’aide au développement)
  • Renforcer le devoir de vigilance pour interdire aux entreprises opérant en territoire français d’être liées à des processus d’accaparement de terres, de déforestation ou d’autres destructions d’habitats naturels à travers le monde
  • Soutenir financièrement le Programme alimentaire mondial des Nations unies et augmenter l’aide publique française au développement à hauteur de 0,7 % du PIB
  • Réformer l’Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) pour favoriser la souveraineté alimentaire, la régulation des marchés et la conversion écologique de l’agriculture
  • Renégocier le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et réinvestir la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED)
  • Intégrer le respect des règles fondamentales de l’Organisation internationale du travail dans les accords commerciaux
  • Défendre le principe de la non-brevetabilité du vivant, y compris pour les OGM et toutes les plantes et animaux issus de techniques de manipulation du génome
  • Contribuer à une convention internationale sur les droits des paysan·nes et autres travailleur·es ruraux dans le cadre des Nations unies, sur la base de la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysan·nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP)

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