Les plans de l'avenir en commun

Comment nous allons

mettre fin aux féminicides

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Les plans de l’Avenir en commun complètent le programme de Jean-Luc Mélenchon pour l’élection présidentielle, disponible en librairie.

Les plans précisent les premiers actes d’un gouvernement et d’une majorité de l’Union populaire, dès leur arrivée au pouvoir, pour faire face à de grandes urgences sociales, environnementales et démocratiques. Ils mettent ainsi en lumière la façon dont l’Avenir en commun apportera des réponses concrètes et immédiates pour, par exemple, éradiquer la pauvreté, mettre en œuvre la règle verte ou encore passer à la 6e République.

Ils ont été élaborés de manière collective, au sein de l’espace programme coordonné par Clémence Guetté et Hadrien Toucel, grâce au travail de parlementaires de la France insoumise, de membres du parlement de l’Union populaire et des groupes thématiques.
Ils ont été nourris par des auditions et contributions d’expert·es, d’associations, d’ONG, d’universitaires, de hauts fonctionnaires, de syndicalistes.

Ces documents s’ajoutent aux livrets, qui ont vocation à compléter l’Avenir en commun.

Ce plan a été coordonné par Clémentine Autain, députée de Seine-Saint-Denis, et Bénédicte Taurine, députée de l’Ariège.
Il a été rédigé par un groupe de travail de spécialistes de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Il complète l’Avenir en commun (édition Le Seuil, 2021, 3 €), le programme pour l’Union populaire et son candidat Jean-Luc Mélenchon.

Sommaire

Introduction de Jean-Luc Mélenchon

Le quinquennat qui s’achève aurait dû être celui de l’égalité femmes-hommes. Emmanuel Macron l’avait déclaré « grande cause nationale » en novembre 2017. Il n’en a rien été. L’inaction du gouvernement a été coupable. Au total, près de 500 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint entre 2017 et 2021. C’est-à-dire une tous les trois jours. Les femmes ont dû compter sur elles-mêmes. Une fois de plus, leur auto-organisation aura permis de franchir des étapes décisives. Ainsi, ce quinquennat aura été celui de la libération de la parole, autour du mouvement #MeToo et de ses répliques dans différents secteurs. L’humanité entière en bénéficie.

Ce combat s’inscrit dans le temps long de notre histoire politique. En effet, le féminisme est au cœur de notre humanisme radical. Il réfute absolument le déterminisme des inégalités de naissance entre les femmes et les hommes. Il considère les rôles dans lesquels les femmes sont cantonnées comme le résultat d’une construction de la société, de l’éducation qui leur est donnée et de celle qui est inculquée aux garçons. Oui, il ne peut y avoir d’humanisme sans féminisme. En remettant en cause la domination des hommes sur les femmes, il lui donne sa radicalité égalitaire. En agissant contre les chaînes du déterminisme, il pose le fondement d’un primat absolu de la liberté sur la condition humaine. 

L’insoumission est intimement liée au féminisme. Le combat pour la liberté et l’égalité ne se conçoit pas sans commencer par la cause des femmes. La lutte contre les féminicides, et plus généralement toutes les violences sexuelles et sexistes, s’inscrit dans une lutte plus ample pour sortir du patriarcat, de sa culture et de ses dominations. Car l’exposition au grand jour des féminicides, des viols et du harcèlement quotidien des femmes doit nous interroger et nous ouvrir les yeux sur le monde de violence qu’il charrie. Pourquoi tous ces hommes se sentent-ils un pouvoir absolu sur leur compagne et ex-compagne au point de leur ôter la vie ? Comment, après avoir fait ce terrible constat, pourrions-nous ne rien changer dans l’éducation de nos petits garçons ? 

Le décompte des féminicides, tenu à jour par les associations elles-mêmes, n’a produit aucun changement de cap du gouvernement. Les associations féministes avaient pourtant mis au point un plan pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Pour éradiquer les féminicides, il faut bien sûr se donner les moyens pour mettre à l’abri et réprimer. Mais il faut aussi s’attaquer aux stéréotypes de genre qui maintiennent les femmes victimes dans le silence et la peur. Il s’agit donc aussi de formation et même d’éducation dans la police et la justice pour éviter la double peine. C’est-à-dire celle d’être victime une première fois. Puis de l’être une seconde fois en étant ni crue, ni entendue. Un tiers des victimes seulement osent porter plainte. 80 % de ces plaintes sont classées sans suite. 

Il faut agir. Le temps presse. Les associations ont chiffré ce plan à un milliard d’euros. Mais il n’a pas été mis en œuvre. Nous le ferons.

Féminicide : de quoi parle-t-on précisément ?

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit les féminicides comme des meurtres « commis par des partenaires ou des ex-partenaires, et qui sous-entendent des violences continuelles à la maison, des menaces ou des actes d’intimidation, des violences sexuelles ou des situations où les femmes ont moins de pouvoir ou moins de ressources que leur partenaire ». Elle définit quatre types de féminicides : le féminicide intime, les crimes commis au nom de l’honneur, les féminicides liés à la dot et les féminicides non-intimes.

L’usage du terme, né dans les années 1970 pour souligner le caractère systémique des meurtres des femmes et son lien avec la domination masculine, s’est peu à peu généralisé à la suite de la tuerie des femmes de l’école polytechnique de Montréal en 1989, féminicide de masse commis par une tueur voulant « combattre le féminisme ».

Un quinquennat d’inaction et de communication indécente

  • 1 femme décède tous les 3 jours, tuée par son partenaire ou ex-partenaire.
  • 113 femmes ont été victimes de féminicides en 2021, 102 en 2020, 146 en 2019. Ce nombre n’a pas diminué depuis 2006, oscillant entre 100 et 150.
  • 213 000 femmes de 18 à 75 ans déclarent chaque année être victimes de violences conjugales physiques et/ou sexuelles.
  • 88 % des victimes de violences commises par le partenaire sont des femmes. 
  • 83 % des victimes de meurtre, ou de tentatives de meurtre, par un partenaire ou un ex-partenaire sont des femmes.

Le récit de chacune de ces vies brisées fait apparaître chaque fois les éléments d’un tableau global : celui d’une domination masculine qui irrigue toujours bien trop l’action de la police et de la justice. Celui du manque de moyens désespérant pour les associations qui tentent au quotidien de combattre le phénomène. Celui d’agent·es du service public désemparé·es, mal formé·es, mal accompagné·es, dont les moyens sont insuffisants pour faire face. 

Dans chacun de ces récits, le parcours des victimes retrace souvent, étape par étape, les mêmes dysfonctionnements et manquements. 

L’histoire de femmes victimes de violences psychologiques, physiques ou sexuelles qui n’ont pas su vers qui se tourner, faute d’information, de lieu d’écoute et d’information à proximité. De femmes qui n’ont pas pu être prises en charge, accompagnées et orientées à temps lorsqu’elles ont osé se présenter à la police, la gendarmerie, aux urgences ou à un·e professionnel·le de santé. De femmes qui n’ont pas pu trouver à temps une place d’hébergement dans des centres dédiés, ni n’ont pu être suffisamment accompagnées. De femmes qui n’ont pas pu bénéficier d’une protection efficace face à un partenaire ou ex-partenaire pourtant connu comme violent. De femmes qui n’ont pas pu saisir la justice, d’autres qui en ont eu le courage mais ont dû se confronter à des décisions parfois inadaptées et souvent trop tardives. De femmes traumatisées, enfin, qui n’ont pas trouvé l’aide pérenne indispensable pour sortir durablement de la spirale des violences.

Ces histoires sont celles de violences masculines massives, et pourtant évitables. L’inaction publique constitue ainsi chaque jour une non-assistance à des femmes en danger. 

Ainsi, avant le terrible record de 2019 – +21 % de féminicides par rapport à l’année précédente –, la hausse des plaintes de 30 % fin 2018 aurait dû constituer un signal d’alerte. Car la majorité des victimes avaient fait état de leur situation, souvent auprès de la police. Certaines avaient porté plainte. Beaucoup des meurtriers étaient connus.

Quand, lors du premier confinement, le signal d’alarme des associations a été pour une fois entendu, la mobilisation a porté ses fruits. Les mesures prises d’urgence pour organiser des dispositifs d’information, de signalement, de prise en charge des auteurs, les consignes claires données à la police et à la justice ont permis que la France soit un des rares pays à connaître une baisse des féminicides dans cette période. 

Comme le souligne la Délégation aux droits des femmes du Sénat, ces résultats illustrent « ce que peut apporter la volonté politique quand celle-ci se met au service d’une politique publique ». 

Il est possible d’en finir avec les féminicides. À condition d’écouter enfin sérieusement les solutions que les associations spécialisées proposent. Ces solutions ont une nouvelle fois prouvé, durant cette période, qu’elles étaient efficaces. À condition surtout d’une volonté politique.

Pourtant, le 25 novembre 2017, à l’occasion de la journée internationale de violences faites aux femmes, Emmanuel Macron et Marlène Schiappa présentaient avec emphase la « grande cause du quinquennat pour l’égalité femmes-hommes ». Macron soulignait : « le premier pilier de cette cause, c’est bien la lutte pour l’élimination complète des violences faites aux femmes ».

Une grande cause nationale bien théorique, puisqu’il aura fallu attendre la mobilisation déterminée des associations et des familles de victimes face à la terrible hausse des féminicides pour que le gouvernement accède à leur revendication d’un Grenelle des violences conjugales.

Du Grenelle, malheureusement, il ne reste pas grand-chose. Le discours d’ouverture du Premier ministre avait déjà largement douché les espoirs en indiquant que la lutte contre les féminicides n’était, pour le gouvernement, « pas une question budgétaire ». 

Sans guère de surprise donc, les résultats furent bien maigres. Les mesures législatives obtenues grâce à la mobilisation des associations, comme la possibilité de lever le secret médical en cas de danger ou la reconnaissance du suicide forcé, n’ont malheureusement pas compensé l’absence de moyens supplémentaires dédiés à cette question. 

Aucun crédit supplémentaire n’aura été consacré à la formation, pourtant décisive à toute politique sérieuse de long terme sur ce sujet. Sur les 2 000 places estimées nécessaires par les associations, 1 000 seulement ont été promises, et seulement 250 créées. Les 750 restantes n’auront en réalité consisté qu’en des « allocations logements temporaires » dont toutes les associations ont dit par avance qu’elles étaient inadaptées à la situation des femmes victimes de violence. Quant aux violences sexistes et sexuelles au travail, il n’en sera même pas question : les syndicats n’ont pas été invités au Grenelle.

Ainsi, comme de nombreuses entreprises menées par Emmanuel Macron et son gouvernement, ces coups de communication n’ont suscité en réalité que des déceptions. Un féminisme de façade, fait d’effets d’annonce, qui n’aura en rien diminué les violences, résolu le problème de la saturation des hébergements, ni amélioré la prise en charge par nos services publics.

En mars 2021, parmi les 3 496 témoignages récoltés par #NousToutes à l’occasion de son enquête #PrendsMaPlainte, 66 % des répondantes faisaient état d’une mauvaise prise en charge par les forces de l’ordre lorsqu’elles ont voulu porter plainte pour des faits de violences sexuelles. Un problème structurel, donc, qui trouve sa cause dans un défaut de formation – quelques heures à peine sont consacrées à ce sujet – combiné à un manque de moyens. 

Sur les 102 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2020, près d’une sur cinq avait déjà porté plainte contre lui pour des violences, et 35 % des féminicides sont survenus alors que les victimes avaient déjà subi des violences, qu’elles soient physiques, psychologiques et/ou sexuelles.

Cette défaillance du premier maillon de la chaîne pénale a des conséquences sur l’ensemble de la procédure judiciaire. La mission d’inspection conduite après le meurtre de Chahinez Boutaa, tuée le 4 mai 2021, a pointé une suite de défaillances, notamment le manque de coordination entre les services de police et les services judiciaires, avec, en toile de fond, l’absence de moyens humains.

La pénurie de magistrat·es, greffier·es, intervenant·es sociaux·les, référent·es formé·es dans les services de police et de gendarmerie, personnels des services pénitentiaires d’insertion et de probation et de travailleur·ses sociaux·les est ainsi dramatique. Elle rend difficile, voire impossible, d’assurer correctement la coordination, la fluidité de la transmission de l’information, le suivi des auteurs et la protection des femmes. 

La priorité est donc au renforcement des services publics, de leurs moyens, et à la formation. De ce constat maintes fois énoncé, Emmanuel Macron et son gouvernement n’ont pas tenu compte. Le budget consacré à la lutte contre les violences faites aux femmes est resté bien largement en-deçà du milliard réclamé par les associations. 

Comble du cynisme, le gouvernement a même tenté de faire croire le contraire en annonçant un budget de 1,116 milliard pour 2020 à l’issue du Grenelle. Un énorme mensonge, mis à jour par un rapport du Sénat : sur ces 1,116 milliards, 140 millions (12,5 % !) à peine étaient réellement consacrés à des mesures concrètes, le reste ne consistant qu’à des artifices comptables, comme la comptabilisation de la part des salaires des enseignant·es correspondant aux heures d’éducation à l’égalité. De même pour les 360 millions d’euros annoncés par le gouvernement pour financer le Grenelle en 2020 : la majeure partie de ce montant constituait des crédits déjà existants en 2019.

De la mobilisation massive du premier confinement, il n’est malheureusement rien resté ou presque, alors que les associations alertaient pourtant sur la nécessité de la continuité, à l’heure où tant de femmes cherchaient urgemment à sortir de situations de violence. L’égalité et la lutte contre les violences ont été totalement oubliées dans les politiques de relance. Les associations n’ont obtenu aucun moyen supplémentaire. Les aides aux entreprises n’ont été nullement conditionnées à la mise en place de dispositifs de lutte contre les violences et le harcèlement au travail..

Les associations ont été une nouvelle fois abandonnées, condamnées à gérer avec leurs maigres moyens les insuffisances de l’action publique et ses conséquences. 

Pire, elles ont été méprisées : ainsi, le gouvernement a essayé d’ouvrir à la concurrence le 3919, numéro d’écoute dédié aux appels des femmes victimes de violences conjugales, géré depuis 1992 par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF). Il aura fallu un nouveau tollé pour que la Ministre décide d’« interrompre » la procédure de marché public, début 2021.

À l’issue du quinquennat Macron, le budget consacré à l’hébergement des femmes victimes de violence est près de cinq fois inférieur aux besoins estimés par les associations. Celui dédié aux dispositifs d’accueil, d’orientation et d’accompagnement, comme les accueils de jour ou les lieux d’écoute, d’accueil et d’orientation est, lui, près de cent fois inférieur aux besoins. Quant à celui de la prise en charge de psycho-traumatologie, il est toujours quasi inexistant.

Macron a baissé les bras avant même d’avoir combattu. Par idéologie, il s’est rendu incapable de comprendre et donc d’agir contre la plus terrible des conséquences de la domination masculine que sont les féminicides.

Notre stratégie

Reconnaître les féminicides comme produits d’un système, c’est aussi – et avant tout – reconnaître qu’il peut y être mis fin. À condition de s’attaquer au système même, à ses racines profondes et à ses effets diffus dans tous les corps de notre société.

Puisque l’on peut y mettre fin, ne pas s’y atteler sans relâche est, pour l’action gouvernementale, une immense faute. Après la domination masculine, l’inaction publique est la principale responsable du fait que des femmes continuent aujourd’hui de mourir en raison de leur genre. 

Nous ne nous résignerons pas. Le combat est encore long mais notre détermination est totale. Avec un gouvernement volontariste accompagné d’une majorité d’Union populaire, nous engagerons de manière résolue les moyens nécessaires pour en finir avec les féminicides. 

Parmi l’arsenal de mesures, certaines sont immédiatement applicables : elles seront mises en œuvre dès notre arrivée au pouvoir. Nous enverrons un signal fort : en France, toutes les femmes sont enfin protégées.

Nous mettrons en place un plan d’action qui reposera sur trois axes prioritaires :

  • l’accompagnement de toutes les victimes pour leur permettre de révéler les faits et d’accéder à leurs droits, 
  • la mise en sécurité, d’urgence puis durable,
  • l’accompagnement dans la phase judiciaire et jusqu’à une sortie effective et durable des violences.

Orchestre de cette stratégie, un Haut-commissariat à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles sera chargé de coordonner, avec les associations et l’ensemble des acteurs publics, l’élaboration de ce plan d’action. Sa mission sera d’impulser un plan d’action et d’en suivre la mise en œuvre, ce dont il devra rendre compte auprès des associations et publiquement, en toute transparence. 

La lutte contre les féminicides sera portée par le gouvernement de l’Union populaire tout entier : engagement prioritaire, il cessera d’être la cause de quelques unes pour devenir une cause commune, de la police à la justice, du travail social au logement.

Un gouvernement qui en a la ferme volonté politique et est résolu à faire réellement primer la solidarité humaine sur les logiques comptables peut en finir avec les féminicides. Nous le ferons. Ce plan détaille notre méthode pour y parvenir. 

Comment nous allons en finir avec les féminicides

Protéger tout de suite 

Dès son entrée en fonction, le nouveau gouvernement prend des mesures d’urgence. La priorité absolue : améliorer immédiatement la protection des femmes. Les mesures d’urgence posent le fondement des réformes structurelles menées par la suite. 

Éloigner rapidement les conjoints violents

Ainsi, dès leur prise de fonction, les ministères de l’Intérieur, de la Justice, et le Haut-commissariat chargé de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles émettent les circulaires nécessaires pour renforcer les mesures de protection des femmes victimes de violences conjugales. Elles rendront plus efficaces, dans l’attente d’éventuelles mesures pénales, l’information et le recours à l’ordonnance de protection prononcée par le juge aux affaires familiales, encore trop méconnue. 

L’ordonnance de protection

L’ordonnance de protection permet au juge aux affaires familiales d’assurer dans l’urgence la protection de victimes de violences conjugales ou intrafamiliales.

Toute personne victime de violences exercées au sein d’un couple, actuel ou ancien, peut demander une telle ordonnance au juge aux affaires familiales, que les violences soient physiques, psychologiques, économiques, sexuelles et portent sur la femme et/ou les enfants.

L’ordonnance peut être délivrée, sans dépôt de plainte préalable, dans un délai maximal de 6 jours. Elle peut prévoir l’interdiction d’entrer en contact, de se rendre dans certains lieux, de détenir une arme ou de se rapprocher de la victime à une certaine distance, avec un bracelet anti-rapprochement, ainsi que, le cas échéant, les modalités d’exercice de l’autorité parentale.

Le logement commun est, par principe, attribué à la victime même si elle a bénéficié d’un hébergement d’urgence. L’ordonnance permet également l’attribution prioritaire d’un logement social.


Source : Ministère de la Justice

Il est ainsi donné pour instruction aux services de police et de gendarmerie ainsi qu’aux parquets d’assurer systématiquement la communication de ses droits à toute victime déclarant des violences conjugales. L’instruction est également donnée aux parquets de demander à la victime si elle souhaite que le parquet se charge de la sollicitation de délivrance de l’ordonnance de protection ainsi que de la notification du conjoint. Cela contribue en outre à un moindre cloisonnement entre le parquet et le juge civil. Il est également demandé aux juridictions de réduire autant que possible le délai maximum de six jours dans lequel se tient l’audience afin d’assurer la concrétisation la plus rapide de ces mesures d’urgence.

Juguler le fléau des armes à feu 

En 2021, un tiers des féminicides était commis par arme à feu. Un phénomène amplifié par la prolifération des armes en France : environ 20 millions d’armes seraient en circulation selon l’Institut de hautes études internationales et du développement de Genève, soit une arme pour trois personnes.

Consigne est donnée aux services de police et parquets, d’appliquer non seulement la saisie des armes détenues par les conjoints violents lorsqu’ils en constatent la possession, mais également de déterminer dès le premier signalement si l’auteur est en possession ou non d’armes. La suspension du permis de port d’armes et la confiscation des armes seront rendues systématiques en cas de dépôt de plainte pour violences sur conjoint ou ex-conjoint : elles seront rendues définitives après toute condamnation.

Sanctuariser et améliorer le 3919

Après avoir voulu privatiser le numéro d’écoute 3919, le gouvernement a fini par reculer devant la protestation générale et laissé à la Fédération nationale Solidarité femmes sa gestion. Plutôt que de précariser les gestionnaires du 3919, le gouvernement de l’Union populaire double les moyens dédiés pour que les répondantes et les répondants au téléphone soient plus nombreux, éviter tout créneau horaire sans réponse et améliorer ainsi la prise en charge des victimes. 

Garantir les moyens aux associations

Le gouvernement de l’Union populaire augmente, dès l’été 2022, les moyens dédiés aux associations de lutte contre les violences faites aux femmes. Il se fonde pour cela sur les besoins estimés par les associations : le critère comptable ne saurait s’imposer face à une telle cause. 

Immédiatement, par exemple, le financement des centres dédiés et spécialisés est ainsi augmenté pour permettre aux associations d’assurer un accompagnement suffisant des femmes hébergées. 

Les associations sont assurées de la pérennité de ces financements : c’est une condition essentielle de l’efficacité de leur action, qui s’inscrit dans le long terme. Elles cessent ainsi de devoir dépendre de collectes de dons privés pour leurs missions quotidiennes : par exemple, la Fondation des femmes a dû compter sur la générosité publique pour mettre en œuvre le dispositif #ToutesSolidaires, qui est parvenu à mettre à l’abri 750 femmes pendant le confinement. Cela doit relever de la solidarité nationale.

Mener une campagne nationale d’information

Si les dispositifs de soutien et d’accompagnement sont insuffisants, ils sont aussi trop souvent mal connus des victimes, des professionnel·les et de toutes celles et ceux qui pourraient, avec l’information nécessaire, agir comme un premier niveau d’accompagnement.

Notre gouvernement lance, dès l’année 2022, une grande campagne d’information et de communication, élaborée en partenariat avec les associations spécialisées.

Elle prend la forme notamment de spots publicitaires diffusés sur l’ensemble des chaînes télévisées et des radios, ainsi que d’un kit national de prévention contenant toutes les informations utiles, qui est mis à disposition de l’ensemble des services publics, collectivités locales et organismes accueillant du public.

La campagne se décline également notamment dans les transports en commun. En effet, le numéro d’urgence (3117) dans les transports est trop méconnu et trop insuffisamment mis en avant. En partenariat avec les autorités organisatrices de la mobilité, un plan de formation des agent·es est mis en place pour qu’ils et elles puissent réagir le mieux possible face aux situations d’urgence. 

Renforcer les dispositifs techniques de protection

Bien que l’effet protecteur des téléphones grave danger (TGD) ne doive pas être surestimé et que son usage ne soit pas adapté à toutes les situations, le dispositif a permis d’éviter de nombreux drames. Pour le moment, les objectifs de mise en circulation de TGD ne sont pas atteints et leur accès est très disparate selon les régions. Nous augmentons le budget du dispositif afin d’en mettre en service 1 500 supplémentaires et permettre à toutes les femmes qui en ont besoin d’y accéder. Les plateformes d’écoute sont actuellement gérées par Orange et Allianz : nous ferons revenir la gestion de ce dispositif dans le secteur public.

Les téléphones sont doublés de bracelets anti-rapprochement. Ce bracelet fonctionnera à terme en lien avec la police de proximité afin de pouvoir agir le plus rapidement possible. 

Dans le cas où le dispositif de protection est abandonné sur demande de la victime, instruction est donnée de vérifier systématiquement que cette demande ne découle d’aucune contrainte. Pour cela, une évaluation psycho-sociale est systématiquement mise en place. 

Protéger durablement

L’inaction des gouvernements successifs nous laisse dans une situation difficile. Les mesures d’urgence que nous avons détaillées ne suffisent pas : il faut du temps pour rattraper ce qui n’a pas été fait pendant vingt ans pour protéger durablement les femmes des violences sexistes et sexuelles.

Développer massivement l’hébergement d’urgence

La question de l’hébergement est centrale dans les cas de violences conjugales. Si la priorité doit être donnée au maintien dans le domicile conjugal des femmes victimes de violences ainsi que de leurs enfants, les associations estiment que 17 % des femmes victimes de violences conjugales ont besoin d’avoir accès à un centre d’hébergement pour une durée moyenne de séjour de 9 mois. 

Pour l’heure, les solutions d’hébergement sont trop peu nombreuses et souvent mal adaptées aux besoins des femmes, qui peuvent par exemple être accompagnées d’enfants. Une enquête de la Fondation des femmes de 2021 indique que seulement 12 % des femmes trouvent des places d’hébergement en adéquation avec leur parcours, 49 % des femmes sans enfants n’obtiennent pas d’hébergement et 31 % des femmes avec enfant ne trouvent pas de solution adéquate. 

La France est loin d’atteindre l’objectif fixé par la Convention d’Istanbul, pourtant ratifiée en 2014, qui impose aux pays signataires « un accueil sûr dans des refuges spécialisés pour femmes, répartis dans toutes les régions et capables de recevoir une famille pour 10 000 habitants ». Pour l’atteindre, il faudrait ouvrir près de 40 000 places.

Le Haut-commissariat à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles a pour tâche prioritaire de garantir l’ouverture rapide de places d’hébergement d’urgence partout sur le territoire. Il dispose pour cela d’un budget calculé pour répondre à cet objectif de 40 000 places, avec un financement par place suffisant pour garantir des conditions et un suivi adaptés, afin de prévenir le retour dans des situations de violence.

Le gouvernement de l’Union populaire donne mission aux représentant·es de l’État dans chaque département d’élaborer, conjointement avec les associations, les départements et les communes, un plan de développement spécifique d’hébergement d’urgence, dont les quantités et le type sont adaptées aux besoins spécifiques dans chaque territoire. 

Cette répartition fine et concertée est en effet indispensable pour que la rupture que constitue le relogement dans l’existence des femmes ne se double pas d’une rupture géographique. 

Permettre l’accès à un logement stable 

L’hébergement d’urgence ne peut remplir sa fonction de mise à l’abri qu’à condition que les femmes qui en bénéficient puissent accéder rapidement à un logement stable et sortir ainsi durablement des situations de violence.

Malgré les efforts des associations et de nombreuses lois sur le sujet – trois dans le seul quinquennat –, le nombre de logements sociaux attribués à des femmes victimes de violence reste extrêmement faible : en 2020, uniquement 7 800 femmes ont pu en bénéficier en six mois, selon le Haut Conseil à l’égalité. Alors que 40 % des femmes victimes de violence souhaitent décohabiter, la grande majorité doit y renoncer faute de place. 

Malgré la loi, les femmes victimes de violence ne sont pas toujours traitées comme un public prioritaire pour l’accès à un logement social partout en France et par tous les bailleurs. 

Une circulaire demandera donc aux préfectures d’appliquer strictement la loi, qui prévoit que les femmes disposant d’une ordonnance de protection sont un public prioritaire au titre du droit au logement opposable (DALO). Les préfectures leur attribueront donc des logements en priorité. Les directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) seront chargées de contrôler l’action des bailleurs en la matière pour assurer le respect de cette priorité. De plus, les procédures seront simplifiées pour que les femmes victimes soient reconnues prioritaires suite au dépôt de plainte, sans attendre l’ordonnance de protection. 

Pour que la priorité soit réellement effective, il faut en finir avec l’engorgement global du logement social : 450 000 attributions seulement en 2019 pour 3,5 millions de demandes. La situation n’a fait que s’empirer : le nombre d’attributions a baissé de façon continue, – 3 % en 2019, alors que le nombre de demandes n’a fait qu’augmenter, + 2 % en 2019.

Pour y remédier, le gouvernement et la majorité de l’Union populaire augmenteront largement les subventions pour la construction de logements sociaux (aides à la pierre) et reviendront sur les coupes dramatiques que le logement social a subi sous Macron – notamment la « réduction de loyer de solidarité », qui les a privés de 1,5 milliards d’euros par an.

Décompte des féminicides : l’exemple espagnol

Prendre en charge et accompagner les victimes nécessite, d’une part, de bien les identifier et, d’autre part, de rendre visibles l’ampleur et la diversité des formes de violences fondées sur le genre.

Depuis le 1er janvier 2022, l’Espagne a mis en œuvre un nouveau mécanisme de comptabilisation des féminicides. Un observatoire officiel et institutionnel est désormais chargé de comptabiliser les féminicides. 

En plus des féminicides par un partenaire ou ex-partenaire, l’Observatoire espagnol des féminicides décompte également :

  • les féminicides dits « familiaux », c’est-à-dire le meurtre d’une femme par un membre masculin de son environnement familial.
  • les féminicides dits « sexuels », c’est-à-dire le meurtre d’une femme par un homme qu’elle ne connaît pas à la suite d’une agression sexuelle, mais aussi les féminicides liés à l’exploitation sexuelle, à la traite ou à la prostitution ainsi que les mutilations génitales féminines ou le mariage forcé.
  • les féminicides dits « sociaux », c’est-à-dire le meurtre d’une femme par un homme non partenaire et non membre de la famille à la suite d’une agression non sexuelle,
  • les féminicides dits « par procuration », c’est-à-dire le meurtre d’une femme ou d’enfants mineurs par un homme comme moyen de causer préjudice à une autre femme.

Améliorer le dépôt de plainte

Après la mise en sécurité préalable, les victimes doivent toutes avoir la possibilité de porter plainte dans de bonnes conditions. De nombreux témoignages montrent une intolérable prévalence des tentatives de minimisation, de découragement des victimes, des dénigrements et des refus de d’enregistrer les plaintes. 

Garantir l’accompagnement des victimes

Contrairement à ce que prévoit le code de procédure pénale, un certain nombre de victimes d’infractions se voient refuser leur dépôt de plainte par des officiers de police judiciaire qui outrepassent leur fonction. Ces derniers qualifient la nature du préjudice avant que la plainte soit déposée, ce qui a un effet dissuasif sur la victime. De même, le code de procédure pénale doit prévoir explicitement la possibilité pour la victime de bénéficier des services d’un avocat ou d’une assistance psychologique pendant le dépôt de plainte. 

Dans chaque commissariat, une cellule d’urgence avec un personnel spécialisé est rendue disponible. Elle peut être activée par une victime de violence sexuelle, viol ou agression. Elle lui assure soutien psychologique, écoute, accompagnement pour le dépôt de plainte et les examens médicaux. Sans ce soutien, les victimes se retrouvent trop souvent seules face à l’immensité de ces tâches. 

Permettre aux victimes d’avoir confiance

Les victimes doivent avoir une totale confiance en leurs interlocuteur·rices lorsqu’elles souhaitent porter plainte. De ce fait, un agent de police mis en examen pour violences conjugales ne pourra pas être sollicité pour le dépôt de plainte ni pour le suivi des dossiers. Son affectation au pôle brigade des familles sera suspendue le temps de l’enquête. La prise en charge de la victime par une agente sera favorisée. 

Donner les outils nécessaires aux acteurs de la prise en charge

Nous donnerons à l’ensemble des acteurs (police, justice, associations, psychologues, etc.) les outils nécessaires à une prise en charge de qualité à toutes les étapes de l’accueil des femmes victimes de violences conjugales. 

Une fiche de procédure qui synthétise l’ensemble des interlocuteurs pertinents dédiés aux violences sexistes et sexuelles sera mise à disposition, accompagnée d’une grille d’évaluation du risque, une fiche-réflexe pour les interventions au domicile, un mémo complet pour les victimes et une boîte à outils dématérialisée pour la police.

Évaluer la prise en charge pour s’adapter aux besoins

Les effets de l’ensemble de ces dispositifs doivent être continuellement évalués pour que la prise en charge s’améliore progressivement. Nous créerons ainsi une cellule spéciale composée de juristes, d’avocat·es et de travailleur·ses sociaux spécialisé·es, placée sous l’autorité du Haut-commissariat à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles et travaillant en lien constant avec les associations, dont la mission est d’analyser le contenu des plaintes pour violences conjugales, suivant le modèle de la méthode de Philadelphie (voir encadré)

La méthode de Philadelphie

La méthode de Philadelphie permet de mieux traiter les plaintes d’agression sexuelle et aux autorités de regagner la confiance des plaignantes. À Philadelphie d’abord, puis dans d’autres villes des États-Unis, au Canada ou plus récemment à Londres, des groupes de défense des droits des femmes, travailleur·ses sociaux et avocat·es étudient chaque année des dossiers de plaintes d’agression sexuelle. 

Étude des interrogatoires, présence de présupposés sexistes dans les questions, recensement des « témoins » ou encore réalisation d’un examen médico-légal sont autant d’éléments qui sont passés en revue. 

Lorsqu’une faille est détectée, la police est informée avec pour objectif d’améliorer les procédures. À Philadelphie, les résultats sont probants puisque le taux de plaintes pour viol jugées non fondées par la police est passé de 18 % en 1998 à 6 % en 2016. 

Cette méthode est facile à mettre en place, donne rapidement des résultats et permet de changer le regard et le traitement envers une plaignante. 

Le Haut-commissariat à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles sera en charge de mettre en place et de suivre l’expérimentation de cette méthode en France, en partenariat avec des associations de défense des droits des femmes, en associant à la révision des dossiers des avocates afin que le pourcentage de plaintes qui donnent lieu à un procès augmente et que les agressions sexuelles ne soient plus dans la grande majorité des cas impunies.

Investir dans la formation pour améliorer durablement la prise en charge

Nous agirons à la fois sur la formation des agent·es de police d’aujourd’hui et de demain.

Pendant leur cursus, les agent·es de police bénéficient aujourd’hui de seulement neuf heures de formation sur la lutte contre les violences faites aux femmes. La durée de la formation des gardien·nes de la paix passera à deux ans, en révisant la formation dispensée dans des écoles nationales pour les activités de police. Le contenu sera enrichi en matière de sociologie, de psychologie, de formation à la lutte contre les discriminations, de techniques de désescalade, d’éthique ou encore de relation avec les citoyen·nes. 

Pour les agent·es en exercice dans la police et la gendarmerie, nous mettrons en place un grand plan de formation continue obligatoire spécifique aux violences sexistes, sexuelles et aux discriminations. À l’issue du quinquennat, tou·tes les agent·es auront participé à un stage de formation. 

Favoriser la non récidive des hommes violents

Pour que les femmes soient durablement protégées, empêcher la récidive de leurs agresseurs doit être une priorité. Pour cela, nous nous appuierons sur des dispositifs qui ont fait leurs preuves localement.

À Valence, dans la Drôme, les autorités ont ainsi créé un « parrainage de désistance », ou parrainage de non récidive. Des bénévoles suivent les personnes condamnées pour violences en les appelant au téléphone ou en les rencontrant dans des lieux publics pour discuter avec elles, les écouter et éviter qu’elles se trouvent isolées et désocialisées. Un rapport du Sénat montre l’efficacité du dispositif : à sa sortie, seuls ​20 à 32 % des participants présentent des comportements à risque infractionnel, contre 87 % au début. Ce programme de parrainage, qui s’inscrit dans la tradition de la justice restaurative, pourra être expérimenté à plus grande échelle sur l’ensemble du territoire.

Les stages de responsabilisation des auteurs de violences conjugales doivent être enfin systématisés, comme le prévoit la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. En prévenant la récidive de comportements violents, il permet également la prise de conscience concernant les actes commis. Les participants sont préalablement identifiés par le Service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP), puis sont mis en relation avec les associations agrémentées organisatrices de ces stages. 

Les effectifs des SPIP seront drastiquement augmentés pendant tout le mandat afin d’atteindre l’objectif d’un conseiller pour quarante personnes. Ce renforcement des moyens est indispensable pour mener un suivi précis et régulier et favoriser la non récidive.

Le statut de l’enfant, victime tiers des féminicides

Après un féminicide, les enfants sont généralement confiés à un membre de la famille, maternelle ou paternelle. Notre volonté de protéger les enfants dans ce cas précis s’articule autour de deux axes : un volet portant sur le suivi psychologique et matériel de l’enfant, et un volet portant sur les dispositions juridiques qui lient l’enfant au meurtrier de sa mère. 

D’une part, nous engageons partout un partenariat entre les parquets, les hôpitaux pédiatriques et les psychologues spécialisés afin de permettre un premier diagnostic rapide des besoins psychologiques, matériels et logistiques. Ce dispositif est actuellement expérimenté dans le département de la Seine-Saint-Denis. Il sera déclenché à chaque ouverture d’enquête dans les services de police. Les fratries seront prises en charge ensemble. Le syndrome de stress post-traumatique peut se développer bien après l’événement traumatisant : une prise en charge au long cours sera donc mise en œuvre. 

D’autre part, nous renforçons le droit de l’enfant victime en lui permettant d’être libéré de l’autorité parentale du parent meurtrier dès la mise en examen. L’enfant victime sera alors immédiatement libéré de l’obligation alimentaire prévue par la loi, qui oblige un enfant à aider un parent qui n’est pas en mesure d’assurer ses besoins.

Nous créerons un fonds dédié aux victimes des féminicides pour dédommager les enfants afin de leur permettre d’appréhender leur vie d’adulte avec une assise matérielle. Un suivi éducatif spécialisé renforcé, mobilisant des éducateur·rices spécialisé·es sera systématiquement proposé. Dès 16 ans, ces enfants pourront choisir de changer de nom de naissance : ils bénéficieront pour cela d’un accompagnement. Un statut similaire à celui de pupille de l’État sera créé afin que les enfants victimes soient pris en charge par la société et bénéficient d’une bourse pour poursuivre leurs études dans un établissement public.

Accompagner les victimes

Le soutien aux victimes doit s’envisager dans la durée. Il ne s’arrête pas à la mise hors de danger et au dépôt de plainte lorsque les victimes le souhaitent. Subir une violence sexuelle ou sexiste engage dans un long processus de reconstruction mais aussi administratif et parfois judicaire. 

Mettre en place un accompagnement global des victimes

À chaque étape s’entremêlent la souffrance de l’agression vécue et la complexité des procédures qui en découlent. Les victimes se retrouvent trop souvent livrées à elles-mêmes sans connaître leurs droits ni savoir vers qui se tourner en cas de besoin.

Les dispositifs d’accompagnement global gérés par les associations spécialisées ont fait leur preuve. La moitié des victimes de violences ont besoin d’un tel accompagnement, mais les moyens des associations sont insuffisants pour répondre à la demande, pour ne pas dire quasiment inexistants : 263 000 euros seulement en 2021 ! 

Les moyens consacrés à ces dispositifs seront donc massivement augmentés pour correspondre aux besoins réels constatés, c’est-à-dire pour que 50 % des femmes victimes – le taux de recours constaté par les associations – puissent en bénéficier.

Soutenir les femmes dans la phase judiciaire

Les procédures judiciaires sont longues, complexes et souvent très coûteuses. Si l’accompagnement global permet aux victimes de mieux s’orienter et d’être soutenues tout au long de la procédure, aucune femme ne doit être bloquée par une barrière financière. 

Selon les avocat·es spécialisé·es, 40 % des femmes victimes de violences sont éligibles totalement ou partiellement à l’aide juridictionnelle et 19 % des femmes victimes de violences portent plainte. Le montant de l’aide juridictionnelle étant trop faible de manière générale, le gouvernement doublera le budget alloué.

Autre levier d’action sur le coût des procédures, nous alignerons les montants de règlements des avocat·es qui interviennent au titre de l’aide juridictionnelle pour la partie civile sur les montants prévus pour le prévenu, qui sont aujourd’hui de moitié plus, afin d’assurer une égalité de traitement.

Il faut parallèlement améliorer la formation des magistrat·es afin qu’ils et elles puissent s’approprier pleinement l’ensemble du spectre des procédures tant pour la protection des victimes que pour la prise en charge des auteurs. Nous lancerons un vaste plan de formation continue qui assurera la formation de l’ensemble des professionnel·les de la justice pendant le quinquennat. 

La création d’un pôle judiciaire de lutte contre les violences intrafamiliales au sein des juridictions améliorera le traitement de ces affaires. Il comprendra des magistrat·es ainsi que des officier·es de police judiciaire spécialement formé·es. Des moyens spécifiques seront alloués pour réduire les délais dans les cas de violences sexuelles et sexistes.

Ces mesures ne pourront être véritablement effectives sans mettre durablement fin à l’engorgement des tribunaux et au manque dramatique de moyens et de personnels auquel la justice de notre pays doit faire face. 

Le recrutement de 65 000 personnels supplémentaires sur le mandat permettra d’amener la France au niveau des pays comparables de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont elle est aujourd’hui très loin. 

Cela permettra ainsi de diminuer les délais des procédures et d’améliorer la qualité de la justice : ce sont là deux éléments particuliers essentiels pour les femmes victimes de violence.

Garantir l’accès aux soins

Selon les associations spécialisées, la moitié des victimes ont besoin d’avoir accès à une prise en charge psycho-traumatologique. Les exemples tels que la Maison des femmes de Saint-Denis montrent la pertinence d’une approche transversale de la prise en charge des victimes de violences sexistes et sexuelles. Ces lieux sont quasiment inexistants aujourd’hui sur le territoire français, alors qu’ils ont démontré leur efficacité. 

Nous investirons massivement dans leur développement, en lien avec les communes et les départements, pour que chaque femme puisse avoir accès à un tel accompagnement à proximité de chez elle.

Transformer la société pour prévenir les féminicides

La lutte contre les féminicides passe par une remise en cause des stéréotypes et des modèles de pensée qui forment le terreau des violences faites aux femmes.

Transmettre l’apprentissage du consentement et de l’égalité dès l’école

Contre les violences faites aux femmes, il est primordial de prévenir et de sensibiliser, dès le plus jeune âge, au respect, à l’égalité et à la notion de consentement. La loi Aubry du 4 juillet 2001 prévoit qu’une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogène. Ces séances présentent une vision égalitaire des relations entre les femmes et les hommes et contribuent à l’apprentissage du respect dû au corps humain. 

Dans les faits, la plupart des établissements ne mettent pas en œuvre cette loi. D’après UNICEF France, 65 % des 15-19 ans déclarent n’avoir eu aucune séance durant l’année scolaire précédente. Selon une enquête réalisée par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) en 2016, 25  % des écoles élémentaires, 11 % des lycées et et 4 % des collèges déclarent n’avoir mis en place aucune action ou séance d’éducation sexuelle.

Le gouvernement de l’Union populaire fait appliquer la loi.

Pour cela, il garantit d’abord que les moyens soient disponibles pour le faire. Le manque d’enseignant·es, l’absence de remplacement sont bien souvent la cause de l’absence de tels enseignements. Nous engageons le recrutement de 160 000 enseignant·es et revalorisons leur rémunération pour redonner la dignité et l’attractivité au métier.

Nous systématisons la formation initiale à l’éducation à l’égalité pour les nouveaux et nouvelles enseignant·es, documentalistes et conseiller·es principaux·les d’éducation (CPE) et intégrons l’égalité filles-garçons aux concours de recrutement des métiers de l’éducation. 

Investir dans la recherche 

L’efficacité de la lutte contre les violences faites aux femmes dépend de la qualité des dispositifs de prévention, d’accompagnement et de réinsertion. Les associations foisonnent d’initiatives innovantes, mais le grand nombre de demandes qu’elles doivent gérer avec leurs petits moyens les empêchent bien souvent de dédier le temps et les personnels nécessaires à la recherche et l’expérimentation de nouveaux dispositifs.

En investissant des montants dédiés à la recherche de politiques innovantes en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, le gouvernement de l’Union populaire donnera les moyens aux spécialistes de faire émerger des solutions concrètes et généralisables à l’ensemble du pays. 

Ce que ça coûte

Les violences faites aux femmes coûtent aujourd’hui entre 3,4 et 3,6 milliards d’euros par an à la société. Cependant, le montant de ces dépenses est calculé uniquement sur la base du nombre de femmes déclarant avoir été victimes et laissent de côté le traumatisme de milliers d’enfants.

Nous gouvernerons selon les besoins. Les moyens consacrés à la lutte contre les féminicides et les violences faites aux femmes seront ceux estimés comme nécessaires par les spécialistes des associations et services publics dédiés.

Ainsi, le chiffrage présenté ici est issu du rapport « Où est l’argent contre les violences faites aux femmes ? » réalisé par le Conseil économique, social et environnemental (CESE), la Fondation des femmes, le Fonds pour les Femmes en Méditerranée (FFMed), le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) et Women’s Worldwide web (W4).

Accompagner la révélation des faits et l’accès aux droits

Ce premier axe concerne le premier niveau d’intervention : celui qui permet aux femmes d’être informées et de bénéficier effectivement de leurs droits fondamentaux, dont celui à vivre en sécurité.

Cela passe d’abord par la réalisation de campagnes d’information permanentes et massives, la multiplication des lieux d’écoute, d’accueil et d’orientation des femmes victimes de violence et des accueils de jour fournissant un accompagnement global aux victimes, ainsi que l’augmentation des moyens dédiés à la permanence téléphonique 3919 afin de pouvoir répondre à toutes les sollicitations.

L’ensemble des personnels en contact avec les victimes de violence doivent bénéficier d’une formation continue obligatoire. Il s’agit des professionnel·les de la sécurité (policier·es, gendarmes) et de la santé (médecins généralistes, urgentistes, gynécologues, sages-femmes, psychiatres). C’est essentiel pour les victimes comme pour les personnels. Cette formation doit être d’une durée de plusieurs jours pour permettre la compréhension des enjeux, des causes, de la diversité des situations et doit comporter une dimension pratique. Pour avoir un effet d’entraînement, l’ensemble des personnels doivent pouvoir être formés dans la durée du mandat.

Enfin, des permanences d’intervenant·es sociaux·les police/gendarmerie (ISCG) doivent être mises en place chaque semaine dans l’ensemble des commissariats de police et brigades de gendarmerie de France.

Le coût global de ces mesures est estimé à 500 millions d’euros par an.

Mettre en sécurité

La première étape de la mise en sécurité est celle de l’hébergement d’urgence. Selon l’expérience des associations spécialisées, 17 % des femmes victimes de violence en ont besoin, pour une durée moyenne de neuf mois. Ainsi, 20 000 places seront immédiatement créées et 40 000 places à terme, localisées et adaptées en fonction des besoins constatés.

Les associations estiment le besoin de téléphones grave danger à 1 500 : ils seront prévus et doublés de bracelets anti-rapprochement. 

Ces postes représentent un coût estimé de 450 millions d’euros par an.

Accompagner la phase judiciaire

En plus de l’accompagnement fourni par les associations tout au long du parcours judiciaire, dispensé dans les lieux d’écoute, d’accueil et d’orientation et les accueils de jour, l’accompagnement du parcours des victimes dans la phase judiciaire nécessite la formation continue obligatoire de l’ensemble des professionnel·les de la justice, magistrat·es et avocat·es en droit de la famille et des personnes. 

Pour assurer l’égalité de traitement, nous alignerons les montants des règlements des avocat·es qui interviennent au titre de l’aide juridictionnelle pour la partie civile aux montants prévus pour le prévenu. 

Ces dépenses représentent un montant annuel évalué à 2,3 millions d’euros.

Accompagner jusqu’à la sortie effective et durable des violences

La sortie effective et durable des violences nécessite la possibilité pour chaque femme qui en éprouve le besoin d’avoir accès à des soins en psycho-traumatologie, dans une approche globale et spécialisée.

Selon l’expérience des associations, cela représente la moitié des victimes de violences, correspondant donc à un coût annuel de 56 millions d’euros.

Développer la recherche

Pour améliorer la prise en charge de chaque femme, faciliter la sortie des violences et la réinsertion et réduire durablement les violences faites aux femmes, l’État doit également investir dans la recherche en matière de lutte contre les violences et d’accompagnement.

Pour ce faire, les associations proposent d’investir 10 % du budget du parcours, soit 100 millions d’euros. Nous faisons nôtre cette proposition.

L’ensemble de ces dépenses conduiront à la création d’au moins 10 000 nouveaux postes dans les associations et structures publiques ainsi mobilisées.

ActionBesoin annuel estimé
Accompagner la révélation des faits et l’accès aux droits
Campagne d’information10 millions
Dispositifs d’accueil, d’orientation et d’accompagnement450 millions
Permanence téléphonique (3919)3,5 millions
Formation continue obligatoire de l’ensemble des professionnel·les de la sécurité (police/gendarmerie)6,5 millions
Formation continue obligatoire de l’ensemble des professionnel·les de la santé6,6 millions
Permanences d’intervenant·es sociaux·les dans chaque commissariat/gendarmerie20 millions
Total accompagnement et accès aux droits496,6 millions
Mettre en sécurité
Création de 40 000 places d’hébergement en centres dédiés et spécialisés450 millions
1 500 téléphones grands dangers et bracelets anti-rapprochement1,35 million
Total mise en sécurité451,35 millions
Accompagner la phase judiciaire
Formation continue obligatoire de l’ensemble des professionnel·les de la justice0,1 million
Alignement du règlement de l’aide juridictionnelle accusé / partie civile2,2 millions
Total phase judiciaire2,3 millions
Accompagner jusqu’à la sortie effective et durable des violences
Dispositifs d’accès aux soins en psycho-traumatologie (type Maison des femmes de Saint-Denis)56,4 millions
Besoins en recherche et développement
Recherche et développement100,6 millions
TOTAL1,107 milliard