La lettre de Jean-Luc Mélenchon aux professeurs et aux personnels de l’éducation nationale
À quelques semaines de l’élection présidentielle, je m’adresse à vous, personnels de l’éducation nationale.
Notre constat : une école appauvrie, des inégalités qui s’aggravent
L’école publique, laïque et gratuite est ouverte à tou·tes les élèves et qualifie chaque année des millions d’entre elles et eux. Elle sort terriblement affaiblie de quinze années de politiques destructrices. Durant ce quinquennat en particulier, Jean-Michel Blanquer a attaqué les fondements du service public d’éducation pour le livrer au marché.
Les réformes néolibérales des trois derniers quinquennats ont creusé les inégalités. Les gouvernements successifs se sont accommodés de l’échec de milliers d’élèves. Ils ont fait de l’éducation un marché, de l’élève et des parents des client·es, des enseignant·es des exécutant·es, portant atteinte aux principes républicains d’égalité, de gratuité et de laïcité. Dans le même temps, les finalités de l’école ont été inversées au profit d’une vision minimaliste et utilitariste, subordonnée aux directives européennes qui promeuvent “l’économie de la connaissance”. Alors qu’elle doit éduquer les consciences libres et autonomes des citoyen·nes, l’école s’est vue assigner l’objectif de formater des individus employables, obéissants et adaptés au marché.
L’austérité a dégradé les conditions d’études. Le manque de professeur·es conduit à ne plus assurer les remplacements de milliers d’heures de cours, en particulier dans les établissements de l’éducation prioritaire.
Durant la crise sanitaire, le droit à l’éducation de millions d’élèves a été, sinon interrompu, très largement mis à mal faute de protocoles suffisamment protecteurs et de moyens financiers et humains.
L’égalité d’accès au service public de l’éducation n’est plus garantie. Les fermetures d’école se sont multipliées : depuis 2007, on a fermé une école par jour, principalement en zone rurale. Les réformes du collège et du lycée ont institué une école dans laquelle les contenus, les options et les spécialités proposées varient d’un établissement à l’autre. La politique de l’offre, appliquée à tous les niveaux du système éducatif, exacerbe la concurrence entre les établissements et renforce la ségrégation scolaire. L’enseignement privé et le soutien scolaire payant, quant à eux, prospèrent.
La précarité se généralise. Le gel du point d’indice et l’absence d’une revalorisation significative ont érodé le pouvoir d’achat d’enseignant·es déjà sous-payé·es par rapport aux pays voisins. La proportion de personnel contractuel, empêché de s’investir dans des projets éducatifs sur plusieurs années, ne cesse de croître. Le coût de l’école pour les familles, notamment pour les plus pauvres d’entre elles, constitue un obstacle à une scolarité sereine. Le désengagement des pouvoirs publics va jusqu’à abandonner des élèves dans des salles de classes surchargées et insalubres.
Le système éducatif est en danger. La crise de recrutement a été exacerbée au cours du quinquennat actuel. Les injonctions à l’autonomie des établissements, la généralisation du new public management (nouvelle gestion, qui impose au public les méthodes du privé), les atteintes à la liberté pédagogique, la multiplication des tâches bureaucratiques, des dispositifs d’évaluation et de contrôle, l’affaiblissement du lien au savoir, conduisent les enseignant·es à se sentir dépossédé·es de leur métier ; dépossession aggravée par l’absence de reconnaissance. Preuve inquiétante de la crise du métier : les démissions d’enseignant·es se multiplient.
Les réformes des trois voies du lycée et celle de l’accès à l’enseignement supérieur ont exacerbé les inégalités. La réforme du lycée général et technologique a conduit à sa désorganisation et à la disparition du caractère national du baccalauréat, qui constituait jusqu’alors la clef de voûte du lycée. Sa valeur dépend désormais de la réputation de l’établissement dans lequel il est préparé. Les réformes successives du lycée professionnel ont à la fois diminué les heures d’enseignement permettant aux élèves de disposer d’une culture commune et sabordé les fondements de la qualification : la voie professionnelle est abandonnée au profit du “tout apprentissage” réclamé par le MEDEF. Avec la mise en place de la plateforme Parcoursup, qui instaure la sélection, l’accès à l’enseignement supérieur n’est plus garanti à tout·es les bachelier·es.
Ces attaques contre l’Éducation nationale ont ouvert la porte à la marchandisation et à la privatisation. Le service public d’orientation est en partie démantelé et certaines de ses missions sont confiées à des organismes privés. Le recrutement et la formation de certain·es contractuel·les ainsi que la conception d’une méthode de lecture imposée par le ministère sont confiés à des officines privées, comme “le Choix de l’école” et “Agir pour l’école”, financées par les lobbys patronaux. Le Medef fait pression pour imposer ses contenus d’enseignement et le ministère multiplie les partenariats avec les entreprises du CAC 40.
Notre projet : instruire et qualifier tou·tes les élèves
L’école est le pilier de la République : elle forme des citoyen·nes libres. Elle prépare le futur de la nation. Face aux grands défis, notamment écologiques, elle doit amener chaque enfant au plus haut niveau de qualification.
Tou·tes les élèves sont capables de réussir. Elles et ils méritent des professeur·es qualifié·es, formé·es et en nombre suffisant, qui leur dispensent un enseignement de haut niveau.
Notre projet pour l’école est en effet inséparable de notre projet de société. À l’heure du défi climatique, l’école doit jouer un rôle décisif dans la préparation de la bifurcation écologique. Alors que les inégalités n’ont jamais été aussi fortes et que la société est traversée par de multiples tensions, elle doit s’affirmer comme un espace de coopération et d’échanges, plutôt que de concurrence et de compétition. Creuset du peuple en formation, elle doit devenir le lieu de l’éducation à l’intérêt général où l’individu se prépare à l’exercice d’une citoyenneté enrichie de nouveaux droits.
L’émancipation individuelle et collective est la boussole de notre projet éducatif.
Émanciper, c’est instruire. Seule richesse qui augmente pour chacun·e quand on la partage entre tou·tes, le savoir, en grandissant l’individu, grandit la société dans laquelle il vit.
Émanciper, c’est qualifier. La qualification est la garantie d’une maîtrise professionnelle durable parce que susceptible de s’enrichir et d’évoluer. Reconnue par les conventions collectives, elle est source de droits sociaux. Face aux défis qui découlent de la crise écologique, l’élévation générale du niveau de qualification au service de la bifurcation écologique est une priorité absolue pour le pays.
Émanciper, c’est affranchir l’individu de toute influence, développer l’esprit critique, parvenir à l’autonomie pour être libre. Condorcet assignait à l’école la mission de « former des citoyens qui ne s’en laissent pas conter mais qui entendent qu’on leur rende des comptes ». Nous faisons nôtre cette formule.
Nos propositions : une école commune de la 6è République
Une école où il fait bon apprendre
L’école est un cadre de travail mais aussi un lieu de vie pour les élèves comme pour les personnels. Elle doit offrir les meilleures conditions possibles. Pour cela, nous proposons les mesures suivantes :
Assurer des locaux agréables et accessibles :
- Mettre en œuvre un plan d’urgence de rénovation des établissements scolaires, prenant en compte les enjeux sanitaires et environnementaux, en assurant partout un accès à des toilettes et des points d’eau, notamment en Outre-mer ; désamianter et isoler les bâtiments
- Rendre l’ensemble des locaux accessibles aux élèves et aux personnels en situation de handicap
- Engager un plan d’équipement en capteurs de CO2 et en purificateurs d’air de l’ensemble des salles de classes le nécessitant, pour étudier sans peur de la pandémie
- Densifier le maillage des établissements en zone rurale afin de limiter à 15 minutes les temps de transport scolaire
- Aménager dans tous les établissements des espaces de détente, de rencontres et d’échanges entre élèves ; des salles de réunions et de repos pour les professeur·es
- Aménager des installations sportives de qualité, accessibles aux associations scolaires
- Réorganiser les cours de récréation pour permettre l’égalité entre filles et garçons et les végétaliser
Faire de la cantine un lieu clé d’éducation et de convivialité :
- Instaurer une pause méridienne d’1h30 minimum permettant une véritable coupure et un repas sans stress avec un encadrement qualifié
- Garantir la gratuité des cantines ; porter à 100% la part des produits issus de l’agriculture paysanne et biologique et privilégier systématiquement les produits locaux ; réduire la part des protéines carnées au profit des protéines végétales et imposer une option végétarienne quotidienne
- Faire des cantines le lieu d’une authentique éducation à l’alimentation en formant et associant les personnels des collectivités territoriales
Encourager la coopération :
- Maintenir les classes multi-âges, facteur de réussite pour tou·tes les élèves ; encourager les formes coopératives de travail et favoriser le tutorat entre élèves par des pédagogies adaptées et la valorisation des réalisations et des activités collectives
- Privilégier une évaluation qui valorise la progression des élèves
- Renforcer l’éducation à l’égalité, contre le sexisme et les discriminations racistes et LGBTIphobes, dans les programmes scolaires
Renforcer les services de vie scolaire :
- Recruter 8 000 conseiller·es principaux d’éducation (CPE) et garantir la présence d’au moins un·e CPE à plein temps dans chaque établissement (deux en éducation prioritaire), avec un plan de pré-recrutement ouvert aux assistant·es d’éducation (AED) ; recentrer le métier autour de ses missions éducatives
- Renforcer les équipes d’AED, en particulier dans les établissements d’éducation prioritaire (REP), et stabiliser la situation des AED en leur permettant la signature de contrats pluriannuels et en leur donnant un statut leur permettant de concilier activité et études
Renforcer la prévention et l’éducation à la santé :
- Recruter 6 000 médecins, infirmier·es, psychologues scolaires et assistant·es sociaux afin de permettre à tous les enfants de bénéficier d’une visite médicale annuelle et informer les familles de leurs droits en matière de sécurité sociale
- Créer une véritable médecine du travail pour les personnels de l’Éducation nationale
- Former l’ensemble des personnels au PSC1 (Prévention et secours civiques de niveau 1), assurer dans tout le secondaire l’accès à la contraception d’urgence et à la prévention des infections sexuellement transmissibles (IST), renforcer la prévention des drogues et des jeux dangereux
- Instaurer une seconde visite médicale obligatoire en grande section de maternelle, afin notamment de diagnostiquer les pathologies entraînant des troubles de l’apprentissage
- Mettre à disposition des distributeurs de protections périodiques gratuites de différents types dans tous les collèges et les lycées
- Introduire dans les programmes scolaires des contenus d’enseignement liés aux grands enjeux de santé
Lutter contre toute forme de violences à l’école :
- Mettre en place un plan de lutte contre le harcèlement scolaire et les violences verbales et physiques, avec, notamment, des formations pour l’ensemble des personnels, des temps de concertation et des actions de sensibilisation auprès des élèves
- Garantir le respect de la Convention internationale des droits de l’enfant et en particulier de l’article 3 concernant la protection de l’enfant scolarisé et de sa famille, y compris sans titre de séjour à jour
Une école creuset pour combattre les inégalités
Garantissant l’égalité des conditions d’accès et d’apprentissage de tou·tes les élèves, l’école participe du combat contre les inégalités. Pour y parvenir, nous proposons les mesures suivantes :
Généraliser la gratuité et garantir la mixité :
- Garantir la gratuité des cantines, du transport, des sorties scolaires, des activités périscolaires, fournir gratuitement les manuels ainsi que les fournitures scolaires sans marques et les équipements requis dans la voie professionnelle
- Instaurer une nouvelle carte scolaire mettant fin à la ségrégation scolaire
- Mettre en place un groupe de travail associant universitaires, élu·es locaux, parents d’élèves, syndicats, ministères de l’Éducation nationale, du logement, des transports, chargé d’établir une carte scolaire intégrant les établissements privés
- Moduler le financement des établissements privés en fonction de leur respect de la carte scolaire
- Ouvrir dans les lycées des périphéries urbaines, des territoires ruraux et des Outre-mer des options rares, réparties sur plusieurs classes pour éviter de créer une ségrégation interne aux établissements
Renforcer le cadre national du service public d’éducation :
- Restaurer le cadrage national des diplômes et des programmes
- En finir avec le contrôle continu au baccalauréat et au brevet pour garantir l’égalité et l’anonymat des candidat·es
- Restaurer le cadrage national des horaires, notamment en rétablissant le fléchage par discipline des dédoublements
- En finir avec les dispositifs qui conditionnent l’octroi de moyens à des objectifs locaux (contrats locaux d’accompagnement, cités éducatives, expérimentation à Marseille…)
- Abroger tous les dispositifs adoptés sous les quinquennats Sarkozy-Hollande-Macron qui portent atteinte au caractère national du service public d’éducation
- Mener une concertation afin de redéfinir les rythmes scolaires en revenant à un cadrage national et garantir l’égal accès de tou·tes les élèves du 1er degré à des enseignements artistiques et sportifs gratuits, dispensés par des personnels recrutés sur concours ; rendre cohérents scolaire et périscolaire ; former et recruter dans ce nouveau corps les actuel·les animatrices et animateurs du périscolaire
Mettre en œuvre une politique de l’éducation prioritaire répondant aux besoins éducatifs :
- Réduire massivement les effectifs par classe et renforcer les moyens destinés au travail en effectifs réduits dans les établissements relevant de l’éducation prioritaire
- Réunir un groupe de travail réunissant syndicats, associations de parents d’élèves, ministères de l’Éducation nationale et de l’aménagement du territoire chargé d’établir une carte de l’éducation prioritaire, intégrant les lycées, et répondant aux besoins éducatifs sur la base de critères objectifs et transparents
- Sortir de la logique actuelle qui conditionne l’octroi des moyens à des contrats d’objectifs
Construire une école inclusive :
- Abaisser à dix le nombre maximum d’élèves par classe en unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) et garantir à chaque élève une place dans une structure ULIS, en ouvrant le nombre de structures nécessaires
- Augmenter le nombre des enseignant·es référent·es pour la scolarisation des élèves en situation de handicap afin de garantir un suivi individualisé de qualité
- Créer un véritable service public d’accompagnement des élèves en situation de handicap, avec un nouveau corps de fonctionnaires et un service de 24h pour un temps plein
- Former et titulariser les actuel·les AESH (accompagnant·es des élèves en situation de handicap)
- Mettre fin à la mutualisation des accompagnements en supprimant les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL)
- Inclure une formation à l’accompagnement des élèves en situation de handicap dans les cursus de formation des enseignant·es
Une école qui apporte des savoirs à tous les élèves
Les besoins éducatifs sont croissants et la bifurcation écologique nécessite des qualifications élevées. Face à ces défis, nous proposons donc les mesures suivantes :
Garantir des moyens supplémentaires pour faire progresser tou·tes les élèves :
- Réduire partout les effectifs par classe pour faire mieux que la moyenne européenne, qui est actuellement à 19 élèves par classe, en priorisant les classes de pré-élementaire, les lycées professionnels et les établissements relevant de l’éducation prioritaire
- Atteindre 19 élèves par classe à la fin du mandat par le recrutement de 160 000 enseignant·es. Dès le début du mandat, notre priorité sera le passage à 19 élèves par classe en moyenne dans l’ensemble des établissements en éducation prioritaire et dans toutes les maternelles. Les effectifs en lycée professionnel, eux, seront portés à 15 élèves en moyenne par classe. Ce premier objectif minimal nécessitera le recrutement de 60 000 premier·es enseignant·es
- Rétablir un véritable corps d’enseignant·es remplaçant·es et engager un plan de titularisation des précaires de l’Éducation nationale
- Reconstituer les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) et le dispositif Plus de maîtres que de classes
- Garantir la formation de tou·tes les agent·es territoriaux spécialisé·es des écoles maternelles (ATSEM) et appliquer la règle d’un·e ATSEM par classe
- Augmenter les moyens dédiés aux élèves allophones nouvellement arrivés (EANA) et aux élèves issu·es de familles itinérantes et de voyageurs (EFIV), en créant des postes d’enseignant·es itinérant·es et des classes d’accueil supplémentaires
- Augmenter les moyens alloués aux structures spécialisées dans l’accueil des élèves à besoins particuliers de façon à offrir un nombre de places suffisant
Les enseignant·es, clef de la transmission du savoir
Sans les enseignant·es, rien de ce que nous voulons entreprendre n’est possible. Nous voulons reconnaître leur haute qualification, fondée sur une double maîtrise scientifique et pédagogique.
Revaloriser les traitements :
- Revaloriser le traitement des personnels de 15 % pour rattraper le gel du point d’indice
- Revaloriser les grilles indiciaires dans le cadre d’une négociation avec les organisations syndicales
Refonder la formation :
- Créer des écoles professionnelles de l’enseignement, en lien avec le monde universitaire
- Appliquer le droit à la formation continue sans autorisation préalable du ou de la chef·fe d’établissement
- Intégrer à la formation initiale des enseignant·es une solide formation à la sociologie de l’éducation, la pédagogie, la psychologie de l’enfant et de l’adolescent·e, et à la lutte contre les discriminations ; soutenir la recherche en éducation
- Développer des partenariats entre l’Éducation nationale et des mouvements pédagogiques agréés et augmenter le contingent d’heures de décharges attribuées à ces derniers
Reconnaître l’expertise enseignante :
- Alléger la charge de travail : suppression des activités pédagogiques complémentaire (APC) qui s’ajoutent au temps d’enseignement obligatoire en primaire ; libérer dans le 1er degré un temps hebdomadaire autogéré d’1h30, afin de permettre, pendant le service, la concertation et le travail coopératif de l’équipe enseignante
- Mettre en place une aide administrative et éducative aux directeurs et directrices d’école et améliorer le mode de décharge d’enseignement
- Abroger la loi Rilhac pour restaurer le fonctionnement collégial dans le premier degré
- Renforcer les garanties statutaires, reconnaître le travail et l’engagement des personnels en réaffirmant la liberté pédagogique et en mettant fin aux dispositifs d’évaluation et de contrôle permanent
- Redonner aux enseignant·es la pleine maîtrise de l’évaluation, en interdisant toute immixtion hiérarchique ; supprimer les évaluations nationales qui ont été imposées aux enseignant·es sans concertation
- Créer un CAPES d’éducation socioculturelle et un CAPES de français langue de scolarisation pour les élèves allophones ; créer une agrégation des professeur·es documentalistes
- Créer une base de données de ressources pédagogiques libres de droits pour une utilisation en classe, déconnectée des éditeurs privés
Recruter mieux en redonnant de l’attractivité au métier :
- Mettre en œuvre un plan de pré-recrutement ouvert dès l’année de terminale et en licence afin de favoriser l’accès des jeunes de tous les milieux sociaux aux métiers de l’Education nationale
- Adopter un plan pluriannuel de recrutement pour l’ensemble des concours
- Ouvrir des formations rémunérées de préparation aux concours afin de faciliter les reconversions professionnelles dans les métiers de l’Éducation nationale et reconnaître l’expérience professionnelle des salarié·es en reconversion
Offrir des perspectives d’évolution de carrière au plus grand nombre :
- Doubler les postes ouverts à l’agrégation interne
- Assurer des horaires aménagés aux enseignant·es engagé·es dans la recherche ou préparant des concours
- Offrir aux enseignant·es la possibilité de consacrer les deux dernières années de leur carrière au suivi des élèves en difficulté, à la coordination des projets de l’établissement et à la formation des enseignant·es stagiaires
- Donner aux personnels qui le souhaitent le droit à obtenir un détachement dans d’autres métiers de la fonction publique
- Rétablir les commissions paritaires pour garantir la défense des droits des personnels et une gestion transparente des carrières et des mutations
Transmettre les savoirs :
- Rompre avec la logique de la réforme du collège de 2016 : replacer les disciplines au cœur des apprentissages en rétablissant des horaires suffisants et fléchés, y compris pour des dédoublements, pour chacune d’entre elles ; prévoir les moyens pour proposer partout des options (seconde langue vivante en 6e, langues anciennes, etc.) sans mettre en concurrence les disciplines
- Abroger la réforme du lycée général ; repenser son organisation afin de ne plus contraindre les élèves à renoncer à des enseignements disciplinaires indispensables à leur formation intellectuelle et à leur poursuite d’études ; renouer avec une organisation fondée sur le groupe classe, avec une équipe pédagogique composée d’un·e seul·e enseignant·e par discipline et un emploi du temps cohérent
- Renforcer les enseignements généraux dans la voie professionnelle
- Garantir la variété des langues vivantes enseignées et leur apprentissage dès le CP
- Assurer un soutien scolaire gratuit par le service public d’éducation ; renforcer les dispositifs de rattrapage scolaire en créant 100 000 emplois jeunes, placés sous la responsabilité des enseignant·es, afin de mener des actions éducatives de rattrapage pour la génération d’élèves dont la scolarité a été perturbée par la crise sanitaire
Octroyer plus de temps et mieux accompagner l’orientation :
- Étendre l’instruction obligatoire à 18 ans, en proposant une garantie d’autonomie aux élèves de la voie professionnelle dès 16 ans
- Permettre pour tous les parents qui le souhaitent le droit à la scolarisation dès 2 ans dans le cadre d’un service public de la petite enfance
- Donner la possibilité de prolongation d’un an de la scolarisation des élèves allophones en classe d’intégration
- Rendre au Service public d’orientation son caractère national, et développer le réseau des centres d’information et d’orientation (CIO) en s’appuyant sur l’expertise des psychologues de l’Éducation nationale
- Créer une bourse publique des stages afin de lutter contre les discriminations
Apporter une culture commune :
- Ouvrir 5 000 classes à projet artistique associant enseignant·es, artistes et professionnel·les de la culture et passer de 100 à 300 résidences d’artistes dans les écoles et collèges ; multiplier par trois le nombre des classes à horaires aménagés
- Étendre le corps des professeur·es d’éducation socioculturelle de l’enseignement agricole à tous les établissements de l’Éducation nationale dotés d’internats et de l’éducation prioritaire
- Créer des associations culturelles dans l’ensemble des établissements du second degré (sur le modèle des associations sportives) ainsi que des associations culturelles et sportives dans le 1er degré
- Renforcer la culture manuelle et technique, notamment pour faire face au défi climatique, en proposant à tous les niveaux un enseignement polytechnique associant théorie et pratique
- Assurer la gratuité des droits de diffusion des œuvres culturelles en milieu scolaire
- Créer une carte nationale de l’élève permettant l’accès gratuit à la santé ainsi qu’à des activités sportives et culturelles
- Favoriser les jumelages d’établissements (urbains/ruraux ; montagnards/littoraux ; hexagonaux/ultramarins) et développer les échanges entre classes visant à élargir l’horizon social et culturel des élèves
- Valoriser et renforcer la pratique sportive dans les programmes scolaires et les activités périscolaires
Accroître la qualification pour répondre aux défis de demain
À l’heure du défi climatique et des mutations du système productif, les voies professionnelle et technologique sont indispensables à la hausse du niveau de qualification nécessaire à la planification de la bifurcation écologique. Nous voulons reconstruire les filières de l’enseignement technologique et professionnel, aujourd’hui dévastées, pour en faire des voies d’excellence. Pour cela, nous proposons de :
Développer l’enseignement professionnel et technologique public :
- Construire des lycées professionnels dotés d’équipements de qualité, afin d’augmenter les capacités d’accueil, de garantir un maillage fin sur l’ensemble du territoire et de permettre de véritables choix d’orientation aux élèves
- Proposer une garantie d’autonomie au-dessus du seuil de pauvreté à partir de 16 ans (soit 1 063 euros pour une personne seule détachée du foyer fiscal de ses parents)
- Créer 8 000 classes supplémentaires dans les lycées professionnels
- Augmenter les moyens humains et financiers des lycées agricoles
- Supprimer les aides à l’apprentissage versées aux entreprises de manière à privilégier la formation professionnelle sous statut scolaire
- Réserver la taxe d’apprentissage aux établissements publics
- Interdire la délivrance de diplômes professionnels privés
- Ouvrir un lycée professionnel maritime dans chacun des 30 départements du littoral et les intégrer au ministère de l’Éducation nationale
- Intégrer les lycées agricoles au ministère de l’Éducation nationale dans le respect de certaines de leurs spécificités (animation socio-culturelle et coopération internationale)
- Ouvrir des places d’internat gratuites aux élèves de la voie professionnelle et aux apprenti·es sous statut scolaire, en donnant la priorité aux plus éloigné·es de leurs établissements ou lieux d’apprentissage
Élever le niveau de qualification des filières professionnelle et technologique :
- Rétablir le bac professionnel en 4 ans et le CAP en 3 ans
- Renforcer la place des enseignements généraux dans la filière professionnelle
- Créer des centres polytechniques professionnels du CAP au BTS, afin de mailler le territoire national d’établissements intégrant lycée et enseignement supérieur, et former les jeunes aux métiers d’avenir, en particulier pour la bifurcation écologique et sociale
- Créer les filières professionnelles qui répondent aux besoins de la bifurcation écologique
- Refonder la voie technologique afin d’offrir une palette diversifiée de spécialisations de haut niveau
- Garantir davantage de places pour les bachelier·es professionnel·les et technologiques dans les classes de BTS, les DUT et les licences professionnelles, afin de favoriser les poursuites d’études
L’école de la citoyenneté
L’école doit permettre aux élèves de s’investir dans des missions d’intérêt général et, avec l’abaissement du droit de vote à 16 ans, de se préparer à devenir des citoyen·nes. Afin d’atteindre cet objectif, nous proposons les mesures suivantes :
Éduquer à la citoyenneté :
- Mettre en œuvre des formations en droit du travail avant la fin de la scolarité obligatoire
- Permettre l’inscription sur les listes électorales à 16 ans au lycée
Encourager la démocratie scolaire :
- Renforcer le droit d’association et de réunion ainsi que la liberté d’expression à l’intérieur des lycées
- Renforcer la démocratie lycéenne en donnant plus de poids dans les décisions aux instances lycéennes
- Garantir dans tous les établissements les moyens et l’administration lycéenne des Maisons des lycéennes et des lycéens
Faire des parents d’élèves des acteurs de la vie des établissements :
- Créer un statut des parents d’élèves délégués donnant droit à la formation et à congé de représentation opposable à l’employeur
- Garantir l’application de la loi sur la présence d’espaces parents, de la maternelle au lycée, animés par les parents d’élèves délégués, organiser les interventions des personnels médicaux sociaux, psychologues de l’Éducation nationale, des personnels de vie scolaire, afin de favoriser la continuité éducative entre familles et école.
Une école laïque et libérée des influences
Laïcité et neutralité sont inséparables de notre projet d’école émancipatrice et ouverte. Pour garantir ces principes, nous proposons les mesures suivantes :
Étendre la laïcité :
- Réserver les fonds publics à l’école publique, en abrogeant la loi Carle et en interdisant les subventions extralégales des collectivités territoriales ; renforcer le contrôle des établissements privés
- Abroger le Concordat en Alsace-Moselle et les statuts spécifiques en Outre-mer
- Mettre en œuvre un plan de construction d’établissements publics dans les déserts scolaires
Débarrasser l’école des lobbies et garantir sa neutralité :
- Réformer la représentativité dans les Commissions professionnelles consultatives afin de lutter contre la soumission de la formation aux intérêts des grandes entreprises et de garantir la présence des représentant·es de salarié·es en leur accordant les moyens nécessaires (droit à absence et indemnités)
- Supprimer les « campus des métiers et des qualifications » et libérer les lycées agricoles de la tutelle des chambres d’agriculture et des lobbys
- Sortir l’école du dogme néolibéral en supprimant l’ensemble des partenariats entre l’Éducation nationale et le Medef ; développer et mettre à la disposition de tous les établissements des outils numériques gratuits et garantissant la protection des données ; généraliser l’équipement en logiciels libres
- Interdire les financements de projets pédagogiques par les fondations « philanthropiques » des entreprises du CAC 40
Repenser la gouvernance de l’Éducation nationale :
- Refonder l’ensemble des instances de l’Éducation nationale pour les rendre véritablement représentatives et démocratiques
- Recréer une instance indépendante chargée de l’évaluation du système éducatif